M. Pietrasanta vient de nous inviter à raison garder ; cela vaut également pour ceux qui évoquent une augmentation de ce budget. Restons modestes ! Hors pensions, l'augmentation en question n'est que de 0,2 % et, l'an prochain, d'après les prévisions, le budget, sera en diminution. Il n'y a tout de même pas de quoi être euphorique.
Je me contenterai ce soir d'évoquer la contrainte pénale, dispositif applicable depuis le 1er octobre 2014. Jusqu'en 2017, cette peine concerne seulement les auteurs d'infractions et de délits passibles de moins de cinq ans de prison. Au-delà de cette date, elle s'appliquera à tous les délits.
Avec quelque malice et gourmandise, permettez-moi de rappeler que l'étude d'impact annexé au projet de loi créant le dispositif, étude produite par votre ministère, madame la garde des sceaux, tablait sur 8 000 à 20 000 contraintes pénales prononcées par an. Force est de constater que nous en sommes très loin : un an après l'entrée en vigueur du dispositif, 950 mesures de contraintes pénales ont été prises. Je note que 37 tribunaux, parmi lesquels ceux de Perpignan ou Lyon, qui ne sont pas des petites villes, n'en ont prononcé aucune. Quant au TGI de Paris, il en a prononcé six en tout et pour tout. La contrainte pénale peine à s'imposer. Quelle est votre sentiment à ce sujet, madame la ministre ?
Avant cette réunion, j'ai relu le compte rendu de nos débats dans l'hémicycle sur le projet de loi relatif à la prévention de la récidive et à l'individualisation des peines qui a créé la contrainte pénale et qui a supprimé les peines planchers. Au sujet de ces dernières, vous disiez à l'époque que si les juges ne les appliquaient pas, c'est qu'il s'agissait de mauvaises dispositions. Tenez-vous le même raisonnement s'agissant de la contrainte pénale ? (Sourires.)
Vous ne pouvez pas prétendre que nous ne vous avions pas prévenue. Les juges vous disent qu'ils ont du mal à identifier les mesures de contraintes à prescrire. Tout est à inventer : les obligations, le suivi personnalisé… Quant aux conseillers d'insertion, ils sont censés faire du « sur-mesure », mais ils n'y arrivent pas. Les juges qui le savent parfaitement se désintéressent de ce dispositif qui, selon vous, devait révolutionner le champ pénal en matière délictuel.
La personnalisation des mesures ou l'évaluation, tout cela prend du temps, et la charge de travail est énorme. Je crois que nous n'avons pas les moyens d'un tel suivi. Les magistrats craignent d'ailleurs que ce dispositif ne soit pas à la hauteur, et ils préfèrent ne pas prononcer de contrainte pénale. Que comptez-vous faire pour que la contrainte pénale, ce joyau que vous avez offert à la République, soit à la hauteur des ambitions que vous aviez pour elle ?