Monsieur le député, on trouve toute sorte de choses désagréables à notre égard, y compris dans la presse : il n'y a pas que Bercy ! Mais cela ne nous empêche pas d'être tous là, collectivement, pour défendre nos convictions et défendre ce droit à réparation auquel, vous le savez, je suis attaché, même si je trouve que certaines mesures, notamment fiscales, ne sont pas souhaitables – j'y reviendrai tout à l'heure.
Votre rapporteur spécial, M. Hammadi, s'interroge sur la pérennisation et le devenir de l'Institution nationale des Invalides (INI), dont j'ai débattu avec plusieurs parlementaires. Je rappelle que j'en ai fait un dossier prioritaire dès mon entrée en fonctions. J'ai reçu le 25 novembre les partenaires sociaux, puis rencontré la gouvernance de l'INI, le directeur du Service de santé des Armées, et les personnels au mois de décembre sur le site même. J'ai encore reçu le médecin général inspecteur Plotton, nouveau directeur de l'INI, à deux reprises au mois d'octobre.
L'INI est une institution de référence dont l'avenir doit être garanti. Je m'y emploie avec force. À ce titre, je soutiens un projet de pérennisation de l'Institution, afin qu'elle s'inscrive en complémentarité avec les autres structures du parcours de soins, et qu'elle continue d'offrir des prestations de grande qualité aux anciens combattants, pensionnaires et blessés en opérations. Je pense que nous ne sommes pas loin d'aboutir, et nous aurons l'occasion, si vous le souhaitez, d'y revenir dans quelques mois.
Vous avez également évoqué l'aide différentielle aux conjoints survivants (ADCS).
Je veux dès à présent réaffirmer que, contrairement à ce que je peux lire ou entendre ici et là, la suppression de ce dispositif ne signifie pas la suppression de la politique d'action sociale de l'ONAC-VG, encore moins celle des moyens alloués à cette politique, à laquelle, je le rappelle, 2 millions d'euros supplémentaires seront consacrés en 2016, soit une augmentation de 26 % depuis 2012. Cette augmentation de l'enveloppe permettra de maintenir le soutien apporté aux veuves, et prendra par ailleurs en compte la situation des plus démunis de nos anciens combattants.
Ce qui change, en réalité, ce sont les critères d'attribution de l'aide. Désormais harmonisés pour prendre en compte tous les facteurs de fragilité et d'isolement de chacun des ressortissants de l'Office, ils permettent une plus juste répartition de l'aide, dans un souci d'équité.
En 2014, 3 730 veuves ont perçu ce qui s'appelait encore l'ADCS. Sur les six premiers mois de 2015, 3 125 ont continué de la percevoir. Un courrier a d'ores et déjà été envoyé à toutes les bénéficiaires, les informant du nouveau dispositif d'attribution. Le nombre de veuves bénéficiant de l'aide sociale en 2016 ne diminuera donc pas. Par ailleurs, la politique d'action sociale de l'ONAC-VG est sanctuarisée et renforcée.
Vous m'interrogez, monsieur le rapporteur, sur la revalorisation du point de pension militaire d'invalidité (PMI).
Depuis la LFI pour 2005, la valeur du point PMI est révisée proportionnellement à l'évolution de l'indice d'ensemble des traitements bruts de la fonction publique de l'Etat. C'est ce qui permet sa revalorisation régulière. En effet, ce mécanisme intègre non seulement les revalorisations générales du point « fonction publique », mais aussi les mesures catégorielles accordées à divers corps de fonctionnaires de l'Etat, comme la revalorisation des grilles des agents de catégorie C. Un arrêté portant la valeur du point PMI à 14,00 euros au 1er janvier 2015, contre 13,97 euros précédemment, est ainsi en cours de publication. Il n'est pas envisagé de revenir sur ce mécanisme de revalorisation, mis en place en concertation avec les associations et après de longs travaux interministériels. Pour mémoire, une revalorisation forfaitaire du point PMI d'un euro coûterait environ 145 millions d'euros en année pleine, ce qui est strictement incompatible avec l'objectif actuel de redressement des finances publiques.
Concernant les 17,5 millions d'euros consacrés aux harkis et rapatriés sur lesquels vous m'interrogez, la répartition est la suivante : 87 % de ces crédits sont dédiés à l'allocation de reconnaissance instituée par la loi du 23 février 2005 et revalorisée l'année dernière à l'occasion de la mise en place du plan « harkis ». Le reste concerne les autres mesures en faveur des rapatriés. Cela comprend des dispositifs variés tels que des aides à la formation professionnelle, des aides au désendettement, des aides spécifiques aux conjoints survivants, des remboursements de cotisations de retraite complémentaires, des mesures de sauvegarde du toit familial.
S'agissant des enjeux de modernisation du code pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, nous obéissons à deux mots d'ordre : clarifier et simplifier. La refonte de ce code est le résultat d'un groupe de travail auquel l'ensemble des associations du « G12 » a été associé. Le projet d'ordonnance sera présenté en conseil des ministres en novembre, publié d'ici au 31 décembre et il devrait être ratifié par le Parlement avant juin 2016.
J'en viens au monument OPEX. C'est aujourd'hui une obligation morale pour mon ministère de rendre hommage à tous ceux qui sont tombés en opérations extérieures et de faire vivre leur mémoire, malheureusement trop souvent oubliée. Ces combattants de la quatrième génération du feu méritent que leur mémoire soit valorisée et entretenue par l'Etat. Avec la nouvelle carte du combattant que j'ai personnellement remise à des dizaines d'hommes depuis le 1er octobre, nous avons fait un premier geste concret de reconnaissance.
Mais cette reconnaissance doit s'inscrire dans la pierre, pour que les générations suivantes n'oublient pas. C'est pour cela que nous avons décidé d'édifier un mémorial national à tous les morts pour la France tombés en OPEX. Le financement du ministère de la défense est acquis et tous nos services sont mobilisés.
Nous avions voulu que ce monument soit au plus près du haut lieu de la mémoire combattante que sont les Invalides, place Vauban. Mais l'opposition des habitants à ce nouveau monument nous a conduits, en accord avec la Ville de Paris, à choisir le parc André-Citroën, à quelques pas seulement de Balard, où vit aujourd'hui la Défense française. Nous sommes actuellement, ainsi que la Ville de Paris, en discussion avec les concepteurs du parc, architectes et paysagistes, qui ont la propriété intellectuelle du lieu. Le projet ira au bout, je vous l'assure. C'est une obligation morale dans laquelle je suis pleinement investi.
Je voudrais enfin aborder divers points qui, je le sais, suscitent encore des interrogations, parfois même des inquiétudes.
Comme chaque année, certains d'entre vous déploreront l'absence d'augmentation du nombre de points de la retraite du combattant. Je rappellerai donc que, pour un bénéfice individuel légèrement supérieur à un euro par mois, cette augmentation représenterait pour les finances publiques un coût de l'ordre de 16 millions d'euros en année pleine. Nous avons plutôt fait le choix, depuis 2012, d'élargir le nombre de bénéficiaires de la carte du combattant et donc in fine de la retraite du combattant : ainsi, à travers la carte « à cheval » dans le cadre de la LFI pour 2 014, bénéficiant à quelque 10 000 personnes, et à travers la carte « OPEX » dans celui de la LFI pour 2 015, bénéficiant à 150 000 personnes environ.
S'agissant de l'indemnisation des orphelins de la Seconde Guerre mondiale, deux dispositifs spécifiques ont été adoptés pour certains orphelins de 1939-1945, en plus du dispositif prévu par le CPMIVG pour l'ensemble des orphelins. Le Gouvernement est en effet très sensible à la souffrance des orphelins de guerre et de tous les conflits dans lesquels la France s'est engagée. Il entend donner sa pleine portée aux dispositifs existants, et s'est donc engagé en faveur d'une application éclairée des deux décrets de 2000 et de 2004, et d'un réexamen au cas par cas des dossiers en cause, afin de garantir une égalité de traitement des situations les plus proches.
Toutefois, je me dois de réaffirmer le caractère spécifique de l'indemnisation prévue par les décrets de 2000 et de 2004 et de vous redire qu'il n'est pas envisageable aujourd'hui, sur le plan tant symbolique que financier, d'étendre largement l'indemnisation des orphelins. Je rappelle que les orphelins qui avaient moins de vingt et un ans à l'époque des faits bénéficient, soit du versement d'un capital de 27 400 euros, soit d'une rente viagère mensuelle de 544 euros.
Permettez-moi enfin de dire un mot de l'abaissement du bénéfice de la demi-part fiscale à 74 ans, qui a été adopté par votre assemblée.
La première partie du PLF pour 2016, adoptée mardi dernier par votre assemblée, contient une disposition fiscale concernant les anciens combattants, qui ne figurait pas dans le texte initial du Gouvernement : l'abaissement de 75 à 74 ans du bénéfice de la demi-part fiscale pour les titulaires de la carte du combattant.
Comme je vous l'avais dit lors de mon audition devant la commission de la défense, le 6 octobre dernier, je n'étais pas favorable – et je ne le suis toujours pas – à la réouverture du dossier de la fiscalité, car je souhaite conserver l'équilibre qui avait été trouvé entre dépenses budgétaires et fiscales en période de redressement de nos finances publiques.
Le coût de la disposition dont nous parlons est évalué à quelque 45 millions d'euros, qui s'ajouteront aux 789 millions d'euros que représentent déjà l'ensemble des dispositifs fiscaux existants, à savoir : outre la demi-part, l'exonération d'impôt touchant les prestations versées – retraite du combattant, pensions militaires d'invalidité, retraite mutualiste – et la déduction des versements effectués en vue de la retraite mutualiste.
Mesdames et messieurs les députés, le budget 2016 est un bon budget. Je comprends la volonté de certains de le rendre encore meilleur. Mais nous avons fait le choix de dispositifs ciblés, afin d'améliorer la situation des plus démunis et de renforcer l'équité de certains dispositifs dans un cadre budgétaire contraint. La mesure que vous avez adoptée profitera au contraire, par construction, aux ménages ayant les revenus les plus élevés au sein de la population qui nous intéresse, sans compenser de charge spécifique. Espérons que son financement n'obligera pas in fine à des choix difficiles.
Sans plus attendre, je me tiens à votre disposition pour répondre à vos questions.