Intervention de Jean-Louis Roumegas

Séance en hémicycle du 27 octobre 2015 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Roumegas :

En ces jours où nous commémorons la naissance de la Sécurité sociale, compte tenu des contraintes budgétaires et de l’explosion de maladies chroniques – j’insiste sur ce dernier point – l’enjeu est bien la pérennité de notre modèle social.

Au cours des deux premières années du quinquennat, le groupe écologiste a soutenu la réduction des déficits et la maîtrise des dépenses parce qu’elles lui paraissaient nécessaires et qu’elles étaient réalisées dans un souci de justice dès lors que le niveau des prestations sociales était maintenu, voire augmenté, pour les plus faibles.

Mais, depuis l’application du pacte de responsabilité et le projet de loi de finances rectificative pour 2014, la logique a changé. Le Gouvernement s’est engagé dans une politique de l’offre fondée strictement sur la compétitivité, qui s’est traduite par une exonération de cotisations sociales pour les entreprises sans contreparties ni conditions.

C’est encore cette logique qui prévaut dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016, avec la baisse des cotisations sur les salaires inférieurs à 3,5 SMIC et une nouvelle baisse de la contribution sociale de solidarité des sociétés à hauteur d’environ 1 milliard, alors que l’ONDAM progressera de 1,75 %, passant d’environ 475 à 478 milliards, soit plus de 3 milliards d’augmentation.

Ces mesures sont à la fois injustes, car elles ne ciblent pas suffisamment les TPE et PME, et inefficaces, puisqu’elles ne produisent aucun résultat sur la réduction du chômage. Elles sont le fruit d’une logique purement comptable.

Qu’il ne soit pas reproché aux écologistes une posture de simple protestation : bien entendu, nous saluons plusieurs des mesures contenues dans ce projet, qu’il s’agisse de la lutte contre l’abus de médicaments par la promotion des génériques, de la lutte contre le gaspillage en général, du développement de l’ambulatoire, de l’action engagée contre la redondance des examens, de l’effort consenti en faveur de l’autonomie des personnes handicapées ou de la volonté de renforcer l’accès à la contraception et l’autonomie des femmes.

Mais à l’amputation des recettes et à la réduction des dépenses de l’assurance maladie, nous préférons un changement de paradigme qui s’attaque aux causes de l’épidémie de maladies chroniques – je veux parler de l’impact des pollutions de l’environnement sur notre santé – et à celles de l’augmentation des dépenses – le poids des lobbies sur notre politique de santé.

Alors même que la loi de santé a introduit le concept d’exposome, nous restons convaincus que les bons choix d’aujourd’hui seront les économies de demain. Faut-il rappeler l’impact sanitaire de nos modes de transport sur la qualité de l’air que nous respirons – 97 milliards par an, selon la commission d’enquête sénatoriale ? Sans parler de la qualité de l’air intérieur, que nous respirons à 80 % de notre temps, et dont l’impact sanitaire a été évalué par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail à 19 milliards par an ! Faut-il rappeler l’impact de nos habitudes alimentaires sur l’augmentation du diabète, de l’obésité ou des maladies cardio-vasculaires ?

Nous regrettons par conséquent que le Gouvernement n’ait pas soutenu nos amendements visant à réorienter notre politique de santé vers la prévention des maladies liées à la pollution, notamment pour limiter l’usage du diesel, du tabac ou de l’huile de palme.

De même, on ne peut que s’interroger sur les relais actifs, au sein de l’Assemblée, de groupes de pression industriels, pharmaceutiques, agroalimentaires, trop longtemps nourris à la mamelle des aides publiques et dictant, pour chaque molécule nouvelle, son prix et son niveau de remboursement.

Nous déplorons donc le rejet de nos propositions visant à prévenir les risques de l’usage abusif du médicament, la multiplication des campagnes de vaccination et les conflits d’intérêts dans nos agences sanitaires, ou à renforcer la transparence des instances de fixation du prix et du taux de remboursement des médicaments.

Nous accueillons en revanche favorablement l’annonce d’une protection universelle et continue par le Président de la République, réforme tenant compte de l’évolution des changements de vie et des ruptures potentielles de couverture. Vous comprendrez donc que les écologistes aient une position nuancée qui se traduira par un partage des votes entre abstention et soutien. Nous voulons rappeler au Gouvernement que nous sommes prêts à le soutenir pour des mesures de long terme, de précaution et de prévention au service de la protection des populations et des générations futures.

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