Intervention de Thierry Gaiffe

Réunion du 12 décembre 2012 à 16h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Thierry Gaiffe, président de la commission défense du Comité Richelieu, président de la société Elno :

J'en viens aux perspectives de plus long terme que doit notamment retracer le Livre blanc. Le savoir-faire particulier de notre Comité, c'est l'innovation et la haute technologie. Nos adhérents autofinancent plus de 15 % de leur chiffre d'affaires en recherche et développement.

La DGA a depuis longtemps modélisé l'impact de l'innovation au travers d'un indicateur portant sur le niveau de maturité technologique – Technology readiness level (TRL). Un TRL de 1 correspond à une recherche très en amont, pouvant présenter des débouchés à 20 ans. A l'autre bout de l'échelle, un TRL de 10 correspond à un produit prêt à être livré aux forces. Dans les degrés de 1 à 4, on est dans le « R » de la R&D : cela correspond au programme d'Accompagnement spécifique des travaux de recherches et d'innovation défense (ASTRID) de la DGA, qui bénéficie essentiellement aux laboratoires étatiques comme le CEA à hauteur de 12 millions par an. Les projets intermédiaires notés de 5 à 7, supportés par le Régime d'appui pour l'innovation duale (RAPID) représentaient jusqu'à présent 40 millions à destination essentielle des PME, sous la forme de subventions partielles à hauteur de 50 %. Le ministre vient d'annoncer que ce montant serait porté à 50 millions. Enfin, avec un niveau de maturité le plus souvent proche de 7, le Programme d'études amont (PEA) représente 680 millions à destination exclusive des grands groupes.

Cette vision de la DGA nous convient et nous sommes très satisfaits de bénéficier du RAPID. Malheureusement, en période de crise, la tentation naturelle de tout mauvais gestionnaire est de réduire de manière drastique les dépenses de R&D. Virer les ingénieurs, est, comme chacun le sait, la plus grave erreur qui peut être commise mais elle reste fréquente. Il faut au contraire mettre le paquet sur l'innovation et ce qui est vrai à l'échelle d'une entreprise vaut aussi pour une nation. Cela permet d'être au top des produits et de la compétitivité au moment de la sortie de crise.

La survie de notre industrie de défense va dépendre, dans les prochaines années, de notre capacité à mettre l'accent sur la recherche amont. Or, depuis 1997, nous l'avons négligée au profit de l'aval. En 1996, M. Jean-Yves Helmer a réformé la DGA en supprimant la direction des recherches, études et techniques (DRET), sorte de petite DARPA à la française et force vive que le monde entier nous enviait. Avant cette décision, il y avait une véritable vision en faveur de la recherche amont et cela tirait l'ensemble des entreprises.

Il nous semble qu'il est temps de recréer une structure équivalente. L'idée est, à iso budget, de se doter d'un management efficace. Si les programmes sont relativement bien gérés, il n'y pas véritablement de vision, de veille technologique ni de benchmarking au sein d'une entité bien identifiée de la DGA. Il faudrait concentrer les budgets et accepter que le RAPID descende sous le TRL 5. Il suffit de se rendre à Grenoble ou à Evry pour vérifier que les PME font aussi de la recherche amont. Toute la recherche amont pourrait être pilotée par une nouvelle DRET, l'Agence de l'innovation de défense (AID), sans augmentation de crédits mais sous l'impulsion managériale forte du DGA lui-même.

Tels sont les principaux éléments que le Comité Richelieu peut apporter au Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale.

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