Intervention de Virginie Duby-Muller

Réunion du 27 octobre 2015 à 17h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVirginie Duby-Muller, rapporteure pour avis :

Chacun d'entre vous a relevé la vitalité du cinéma français, et je rappellerai à cet égard que les films français représentent plus de 40 % des parts de marché. Vous avez également tous souligné votre attachement à préserver ce vecteur de diffusion culturelle, le plus important dans notre pays.

Il faut en effet, Madame Annie Genevard, innover en matière d'aides. Des annonces ont déjà été faites au congrès de la Fédération nationale des cinémas français, à Deauville, en ce qui concerne la transmission de salles, en vue d'accompagner les nouveaux entrants, un vieillissement des exploitants étant constaté. Ces mesures seront lancées dès le mois de décembre, avec la création d'une filière – un module de formation – à l'École nationale supérieure des métiers de l'image et du son, et surtout celle d'un fonds d'avances remboursables, géré par l'Institut du financement du cinéma et des industries culturelles, ce qui sera sécurisant pour les futurs investisseurs, tant l'investissement pour reprendre une salle est lourd.

Je suis un peu surprise par la question concernant les bibliothèques et le fait de moduler les crédits du concours particulier de la dotation générale de la décentralisation en fonction des plages horaires des bibliothèques, dans une volonté d'encourager leur ouverture à des heures tardives ainsi que le dimanche. Des plages horaires plus larges sont un moyen d'ouvrir ces lieux et de lutter contre l'illettrisme. Il faudra poser la question à la ministre de la culture et de la communication pour s'assurer que ces mesures n'auront pas d'effets négatifs pour les finances des collectivités territoriales.

S'agissant de la Hadopi, M. Rudy Salles a déploré un budget insuffisant tandis que Mme Isabelle Attard constatait que son bilan était nul. Le budget pour 2016 s'élève à 8,5 millions d'euros. Il a été divisé par deux entre 2011 et 2014. Si, en 2012 et 2013, les réserves budgétaires ont été utilisées, il y a eu une évolution significative de son activité en 2015, ainsi qu'en 2016, afin de répondre aux missions définies par la loi. Le bilan n'est donc pas nul. En cinq ans, 5,4 millions de courriels ont été envoyés, donnant lieu à un premier avertissement, 500 000 personnes ont récidivé et ont donc reçu un deuxième courriel, 2 844 ont reçu un troisième courriel, et, au final, 400 dossiers ont été transmis à la justice. Ces chiffres indiquent que la Hadopi et la riposte graduée sont efficaces et ont un effet dissuasif. Il faut également rappeler que la possibilité de suspendre l'accès à internet a été supprimée en 2013.

La question de la chronologie des médias, posée par M. Rudy Salles et Mme Claudine Schmid, est controversée. L'exclusivité du film est une condition du succès en salle et nous y sommes attachés. Il pourrait cependant être envisagé d'abaisser la fenêtre d'exploitation de quatre à trois mois pour certains films, lorsque les entrées lors des quatre premières semaines d'exploitation sont insuffisantes – on a par exemple évoqué le chiffre de 20 000 entrées. Lorsque le départ sur ces premières semaines est raté, le délai d'exclusivité pourrait être écourté et la chronologie des médias assouplie.

Il a beaucoup été question également de l'importance du cinéma d'art et d'essai. Le danger vient moins de la numérisation des films que des films d'art et d'essai dits porteurs. En effet, les multiplexes diffusent eux aussi des films d'art et d'essai porteurs, et concurrencent ainsi les salles dédiées. Pour répondre à M. Stéphane Travert sur la menace représentée par des multiplexes, il faut rappeler que la loi du 18 juin 2014 exige un accord en CDAC lorsque la salle compte plus de huit salles : cette régulation est positive. Claudine Schmid a posé la question d'un soutien particulier au cinéma d'art et d'essai : il existe déjà des aides spécifiques prévues par le CNC, et cela fonctionne assez bien.

Mme Gilda Hobert a fait le lien entre les trois rapports, en indiquant que la mutation liée au numérique appelait un changement de modèle. Elle a aussi posé la question du spectacle vivant. Les salles de cinéma diffusent désormais ce que l'on appelle « le hors-film » : opéras, concerts… Les exploitants nous disent que c'est intéressant mais que cela doit rester marginal, et qu'il faut si possible éviter de diffuser ces programmes le week-end, à des moments plus porteurs pour les films. Il convient cependant d'utiliser les salles de cinéma pour diffuser d'autres modes de culture.

M. Hervé Féron a rappelé les propositions du sénateur Serge Lagauche et celles-ci nous paraissent assez intéressantes, notamment l'articulation au niveau régional. Il peut y avoir une différence de vues entre un aménagement purement commercial et un aménagement culturel, et la difficulté, comme je l'ai rappelé en préambule, est que les CDAC comptent moins de représentants du monde culturel que d'élus.

M. Hervé Féron a également indiqué que toutes les salles n'étaient pas équipées en numérique. Je n'ai pas les mêmes chiffres que lui : en métropole, 100 % du parc est équipé, y compris en zones rurales. L'étape suivante concerne les outre-mer. La loi de 2010 a permis de pérenniser nos salles, alors que, dans d'autres pays européens, tels que l'Espagne, 20 % des salles ont dû fermer.

Les modalités du taux de location, madame Sophie Dessus, sont fixées par le code du cinéma et de l'image animée et le taux est négocié de gré à gré entre distributeurs et exploitants. La durée de la période d'amortissement de l'équipement numérique représente un vrai souci ; il faut sans doute s'en remettre au comité de suivi parlementaire institué par la loi de 2010, dans lequel siègent nos collègues Michel Herbillon et Marcel Rogemont. En ce qui concerne la cinquième semaine d'exploitation, la question nous a beaucoup été posée, car c'est en effet souvent un moyen pour les distributeurs de contourner le paiement de la contribution dite VpF.

Julie Sommaruga a posé la question des actions pouvant être menées, comme le Printemps du cinéma, qui sont assez porteuses et fonctionnent, et celle de la politique tarifaire. Le prix moyen d'un billet, à 6,38 euros, reste assez accessible. Le tarif différencié de 4 euros pour les moins de quatorze ans, contrepartie de la diminution à 5,5 % de la TVA en 2014, a plutôt bien fonctionné. Mme Julie Sommaruga a également rappelé l'importance de l'Éducation nationale et je suis d'accord avec elle : il faut davantage associer celle-ci et travailler sur l'éducation à l'image. Les cinémas d'art et d'essai nous ont rappelé qu'ils étaient disponibles pour recevoir des classes scolaires.

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