Les crédits du programme 177 s'élèvent à 1,44 milliard d'euros dans le projet de loi de finances pour 2016, soit une augmentation de 5,1 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2015. Un amendement gouvernemental ajoutera à cette somme près de 70 millions d'euros, portant le niveau des crédits à plus de 1,5 milliard d'euros. Ces crédits supplémentaires financeront des places d'hébergement et d'intermédiation locative.
Cette hausse est principalement absorbée par le financement des centres d'hébergement d'urgence, tel celui d'Ivry-sur-Seine, que j'ai pu visiter. Les crédits qui y sont alloués augmentent de 15 % pour faire face à une demande croissante, liée à l'augmentation de la précarité et à la prise en charge de familles.
Je suis pleinement consciente du contexte budgétaire restreint auquel nous faisons face aujourd'hui, mais cette mise à l'abri des personnes vulnérables est absolument primordiale. Néanmoins, sans places suffisantes en centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) et en logement adapté, le retour au logement de droit commun de ces personnes ne peut s'effectuer et le nombre de places en hébergement d'urgence est voué à s'accroître sans cesse.
Il y a là une tension structurelle permanente entre les deux objectifs du programme qui sont, d'une part, permettre aux personnes vulnérables de faire face à l'urgence et, d'autre part, les accompagner vers un retour au logement de droit commun. À cet égard, je salue les plans gouvernementaux tels que le plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté, ainsi que le plan triennal de réduction des nuitées hôtelières, instauré par Mme la ministre en février dernier, qui a permis la création de places en dispositif alternatif, dont des places en logement adapté et des hébergements alternatifs pour les demandeurs d'asile.
Je souhaite maintenant partager avec vous quelques réflexions sur le thème qui s'est imposé tout naturellement cette année, l'accueil des réfugiés, même si, à l'origine, je souhaitais traiter les questions de santé en hébergement d'urgence afin d'optimiser le logement pérenne et l'insertion.
L'Europe fait face à une forte hausse des flux migratoires : 710 000 migrants sont entrés en Europe en 2015, dont une partie arrive de pays en guerre tels que l'Erythrée, la Syrie ou encore l'Irak. Face à cette crise humanitaire sans précédent dans l'histoire récente, la France a souhaité prendre sa part : elle accueillera d'ici à 2017 plus de 30 000 demandeurs d'asile supplémentaires, dans le cadre du dispositif européen de relocalisation.
Afin de préparer ces arrivées, le Gouvernement a prévu la création de nombreuses places réparties entre différentes structures, notamment en centres d'accueil des demandeurs d'asile (CADA), mais également en hébergements financés par le programme 177, une fois que ces personnes auront acquis le statut de réfugié.
J'ai eu l'occasion de visiter l'un des centres accueillant en tout premier lieu ces migrants, le centre Kellermann, et je tiens ici à souligner la qualité du travail qui y est mené par les associations du secteur, qu'il s'agisse de l'accès aux soins, de l'aide aux démarches administratives, de l'apprentissage du français, et de bien d'autres choses. Une fois l'asile obtenu, les réfugiés sont ensuite orientés vers des solutions d'hébergement situées sur l'ensemble du territoire, en adéquation avec les possibilités d'emploi.
J'insiste sur le fait que l'idée d'une concurrence des publics, régulièrement évoquée, voire exploitée dans le débat public, est largement évitée : les différents plans gouvernementaux impulsent en effet une expansion du parc de logements financés sur le programme 177, et non une réduction du nombre de places.
L'accueil des réfugiés constitue au contraire une opportunité pour repenser le programme, au moins sur deux aspects, sur le plan organisationnel et sur le plan budgétaire.
Sur le plan organisationnel d'abord, car l'élan de solidarité et le dynamisme déployé par la société civile et les services de l'État dans l'accueil des réfugiés donnent naissance à de nouvelles idées. Pour citer un exemple parmi d'autres, le dispositif de relocalisation des réfugiés sur l'ensemble du territoire national pourrait-il, madame la ministre, bénéficier aux personnes vulnérables qui sont aujourd'hui fortement concentrées sur le territoire francilien ?
En second lieu, sur le plan budgétaire, une pérennisation des financements est-elle envisageable, afin de réévaluer les crédits du programme 177 et d'éviter ainsi les effets pervers induits par la sous-dotation récurrente des crédits ? Une telle mesure permettrait notamment aux associations du secteur d'avoir une meilleure visibilité sur les crédits effectivement alloués pendant l'exercice et d'engager des actions à long terme.