Je commence par m'associer aux remerciements exprimés par Mme la ministre des outre-mer pour la qualité des rapports et des interventions.
Si je suis ici ce soir, c'est d'abord pour décevoir ceux qui voudraient imaginer une quelconque divergence entre Bercy et le ministère des outre-mer : les annonces qui viennent d'être faites par Mme la ministre expriment une position commune, issue d'un travail commun mené dans une ambiance cordiale comme dans le respect des règles qui s'imposent à tous. Nous faisons le point régulièrement sur sujets qui posent question – car il est tout à fait légitime que des questions surgissent.
Je voudrais également apporter quelques précisions supplémentaires sur l'avenir, mais aussi sur le présent, de la défiscalisation.
Le Gouvernement souhaite avancer vers davantage de sécurité et de visibilité.
Nous sommes ici pour nous dire tranquillement les choses : il faut plus de sécurité pour tout le monde – pour les acteurs économiques des territoires concernés comme pour les utilisateurs des procédures de défiscalisation, qui sont des contribuables qui utilisent une partie de leur épargne pour investir. Quelques fruits abîmés ne doivent pas gâter l'ensemble de la récolte. Nous avons rencontré des difficultés, il ne faut pas se le cacher. Certains projets immobiliers n'ont pas été achevés dans les délais, certains n'ont pas été achevés du tout, alors que la défiscalisation avait déjà été mobilisée. Allons-nous demander aux contribuables concernés de rembourser ce qu'ils ont perçu ? Il est indispensable de sécuriser l'ensemble de la chaîne ; pour cela, il faut utiliser plus souvent des dispositifs de crédit d'impôt, comme l'a expliqué Mme la ministre tout à l'heure, en plein accord avec mon ministère comme – qui pourrait en douter une seule seconde ? – avec le Président de la République et le Premier ministre.
Nous devons aussi donner de la visibilité, c'est-à-dire permettre d'agir dans la durée. Nous vous proposerons, à l'article 43 de ce projet de loi de finances, de prolonger les dispositifs de crédit d'impôt jusqu'à l'année 2020. On peut toujours imaginer aller plus loin, mais c'est un délai qui paraît sensé ; une prolongation jusqu'en 2020 pour les programmes de logement, en particulier de logement social, ce n'est pas rien.
Pour ce qui est des dispositifs visant à favoriser l'investissement productif, nous vous proposerons une extension progressive du crédit d'impôt, dans le cadre de règlements et de pratiques qui ne changeront pas par rapport à la situation actuelle. Vous connaissez les problèmes qu'a pu poser la mise sous régime général d'exemption par catégorie (RGEC) d'aides européennes et nationales. Là encore, nous avons fait le choix de respecter les règles européennes, tout en restant souples, afin de permettre le prolongement des pratiques antérieures.
Ces mesures sont, je crois, de nature à rassurer tous les acteurs – ceux qui investissent comme ceux qui utilisent les fonds investis.
Quelques problèmes demeurent, que nous devrons régler ensemble. « C'est BQB », aiment à dire certains : c'est Bercy qui bloque… Je vous remercie, monsieur Ollier, d'être venu visiter nos services : vous avez pu constater que ce n'est pas toujours BQB, et que si certains dossiers n'aboutissent pas, c'est que certaines pièces, parfois fondamentales, manquent. Peut-on donner l'agrément à un dossier qui estime la viabilisation d'un terrain à 5 millions d'euros sans fournir le moindre justificatif ? Peut-on valider un dossier si nous ne recevons pas l'avis de tel ou tel ministère ? C'est ma responsabilité qui est engagée.
Il arrive qu'on me demande d'agréer une société, ou une opération, qui a déjà fait l'objet de plusieurs signalements par les fonctionnaires qui suivent ces dossiers, au titre de l'article 40 du code de procédure pénale – que vous connaissez tous. Quand un fonctionnaire choisit de transmettre un dossier au parquet parce qu'il estime y trouver des manquements graves dans l'utilisation des deniers publics, et surtout quand ces signalements se multiplient à propos d'une même opération ou d'une même société, je ne peux pas passer outre ! Je ne citerai évidemment aucun nom, alors que je pourrais en donner plusieurs… Dans de telles situations, vous comprenez bien que l'argument de l'intérêt économique ou de l'emploi ne suffit pas pour pousser le Gouvernement – et plus précisément ma pomme, pardon de le dire comme ça – à accepter de telles opérations.
Je vous le dis dans les yeux : ces cas-là ne sont pas majoritaires. Quelques opérations non abouties pour des raisons diverses, tantôt bonnes, tantôt mauvaises, ne doivent pas empêcher un dispositif dont nous savons tous ici l'utilité de se mettre en place.
Si l'on vous fait part de difficultés sur un dossier, et que vous avez l'impression que c'est BQB, alors vous avez mon téléphone : nous regarderons ensemble ce qui se passe, avec nos équipes, avec nos cabinets. Je tenais à vous le dire pour éviter toute ambiguïté. Il y a, je l'ai dit, une étroite collaboration entre nos ministères, et je souhaite une étroite collaboration entre mon ministère et l'ensemble des acteurs économiques ultramarins.
Enfin, ce projet de loi de finances comporte d'autres dispositifs qui concernent les outre-mer. Je pense notamment au financement des collectivités territoriales. Celles-ci doivent contribuer au redressement des finances publiques. Le Gouvernement propose, à l'article 58, une évolution du calcul de la DGF allouée aux collectivités territoriales. Je vous invite à prendre connaissance de ces dispositions que nous avons construites afin de prendre en compte la spécificité des territoires ultramarins. Sur les 112 communes des DOM, 91 sont gagnantes, selon les estimations actuelles : globalement, elles devraient gagner 16,4 millions d'euros, ce qui fait une moyenne de 150 000 euros supplémentaires de DGF pour les communes concernées.
Cette réforme fait l'objet de débats nourris ; il serait à mon sens utile que chacun d'entre vous – députés de la nation, mais aussi représentants de vos territoires – se penche sur le détail des mesures proposées. Nous avons notamment cherché à tenir compte de la densité de la population, caractéristique qui m'a fortement impressionné lorsque je me suis déplacé par exemple en Guyane.
Voilà ce que je tenais à dire pour compléter les excellents propos de ma collègue.