Monsieur Goasdoué, vous avez salué les efforts que le Gouvernement consent et vous vous interrogez sur certains aspects de ce budget.
S'agissant de la nécessité de travailler de manière plus transversale en matière de mutualisation des fonctions de support, j'ai déjà fourni des éléments en répondant à M. Popelin. J'ai indiqué les pistes de mutualisation que nous suivons, par-delà la création des SGAMI, du SAELSI, du service des technologies et des systèmes d'information de la sécurité intérieure, le ST (SI) 2, en expliquant qu'en matière de police scientifique et technique, de cybercriminalité, de groupement de la politique des achats, nous progressions. Je vous ferai parvenir un document précis qui vous fournira des éléments complémentaires.
Concernant les efforts demandés au personnel, je confirme que les forces de sécurité sont fortement mises à contribution. Compte tenu du niveau d'engagement qui est le leur, nous devons leur témoigner gratitude et reconnaissance. Les tensions sur les effectifs se sont considérablement accentuées au cours des dernières années du fait des sollicitations nouvelles en matière de lutte contre le terrorisme et contre l'immigration irrégulière.
La difficulté du métier des policiers et des gendarmes résulte aussi du fait que beaucoup s'exposent pour sauver la vie des Français. Il y a, il faut le dire, une augmentation considérable des violences commises à l'encontre des forces de l'ordre : rappelons que 7 000 policiers et gendarmes ont été victimes d'agressions au cours de l'année 2014. J'ai toujours considéré qu'il convenait d'avoir une parole responsable sur ces sujets. On ne saurait accepter de la part des forces de l'ordre le moindre écart par rapport aux principes et aux valeurs de la République ; les inspections de la police nationale et de la gendarmerie y veillent, et le ministère fait preuve de réactivité. Les manquements sont toutefois marginaux, les policiers et les gendarmes étant éminemment républicains. De la même manière, les violences dont les forces de l'ordre font l'objet doivent appeler de notre part une réaction extrêmement ferme. Je n'accepterai jamais qu'il y ait la moindre faiblesse à l'égard de ceux qui s'en prennent avec un tel degré de violence à ceux qui protègent les Français et qui, par l'uniforme qu'ils portent, incarnent le droit.
Il ne s'agit pas seulement de leur dire notre reconnaissance, il s'agit aussi de la matérialiser. C'est la raison pour laquelle le Président de la République a souhaité qu'une feuille de route, portant notamment sur les mesures catégorielles, permette de prendre des décisions rapides. Il a fixé un calendrier qui me conduira à piloter des réunions de dialogue et d'échanges sur la base desquelles je prendrai, au mois de mars, des mesures concernant divers sujets : revalorisation des carrières dans le cadre de l'application du protocole parcours professionnels, carrières et rémunérations (PPCR) applicable à la fonction publique, aménagements indemnitaires, refonte de la cotisation et de la nomenclature des postes à responsabilité, correction de certains blocages techniques embolisant les opportunités de promotion de grades dans certains corps, étude de mécanismes compensatoires de fidélisation.
Sur la soutenabilité du plan de lutte antiterroriste, je rappelle que, au-delà d'un renforcement des missions et de l'implication des services, ce sont aussi les moyens humains qui ont été accrus. Je vous communiquerai par écrit les chiffres que j'ai donnés tout à l'heure.
S'agissant des commissariats ruraux, je rappelle que le mécanisme de l'effectif départemental de fonctionnement annuel vise à répartir de manière équitable et objective entre les départements la dotation annuelle en effectifs allouée à la sécurité publique.
Bien entendu, la coordination entre police et gendarmerie, qui se développe de plus en plus, est une piste à suivre pour résoudre certaines difficultés conjoncturelles. En cas de crise ou de violences urbaines, le dispositif de la coopération opérationnelle renforcée dans les agglomérations et les territoires permet dans l'ensemble des départements de mieux prendre en compte les situations d'urgence et les phénomènes de délinquance communs. Il vise quatre objectifs principaux : améliorer la coordination opérationnelle dans une logique de continuité territoriale, identifier et combattre les phénomènes de délinquance communs, réagir avec méthode et efficacité à une situation d'urgence opérationnelle, optimiser l'emploi de services spécialisés et de capacités spécifiques.
M. Ciotti a évoqué les raisons pour lesquelles il ne votera pas les crédits de la mission « Sécurité ». Premièrement, il affirme que les statistiques de la délinquance augmentent, en s'appuyant sur un document du ministère de l'intérieur. En réalité, il n'a sélectionné que les chiffres qui l'arrangeaient : il n'a en effet pris en compte que les statistiques pour les trois derniers mois alors que c'est sur plusieurs mois que le travail de lutte contre la délinquance doit s'apprécier. Revenons donc aux chiffres des douze derniers mois : les homicides ont diminué de 7,3 %, les vols avec arme de 15,8 %, les vols violents sans arme de 9,6 %, les vols sans violence contre les personnes de 0,2 %, les cambriolages de logement de 4,4 %, les vols de véhicule de 1,5 %, les vols d'accessoires de véhicule de 8,8 %, les coups et blessures volontaires augmentant quant à eux de 0,7 %. Et c'est ce que M. Ciotti appelle un échec de la politique de lutte contre la délinquance ! Comme il avait l'air très angoissé, je compte sur vous, monsieur Larrivé, pour lui communiquer au plus vite ce tableau afin qu'il passe une meilleure semaine.
Deuxièmement, il s'est inquiété de certains chiffres du budget. Je dois dire que j'ai du mal à saisir son raisonnement. À l'entendre, quand les crédits de fonctionnement de la police et de la gendarmerie diminuent de 8 % pendant la période 2007-2012, c'est un renforcement des moyens, et, quand ils augmentent de 3,1 %, comme c'est le cas dans le budget pour 2016, c'est un affaiblissement de ces mêmes moyens. Quand on est dans l'opposition, on peut trouver toutes les raisons du monde pour ne pas voter un budget : encore faut-il rester rationnel. Quand les chiffres d'un budget augmentent, j'ai tendance à penser que c'est plutôt bien pour les acteurs concernés et, quand ils diminuent, que c'est plutôt mal.
Je dois constater que cette manière de faire est récurrente de la part de l'opposition. Quand j'ai décidé d'augmenter de 30 % l'indemnité journalière d'absence temporaire (IJAT) en faveur des forces mobiles, compte tenu des contraintes auxquelles elles sont soumises, la réaction de M. Ciotti a été de dire qu'il s'agissait d'une provocation. Les CRS, eux, ont su faire la différence entre la bonne manière qui consiste à ne procéder à aucune augmentation pendant quinze ans et la provocation qui consiste à augmenter en une fois de 30 % cette indemnité. Je pourrais multiplier les exemples.
J'en arrive à votre question, monsieur Larrivé. Je reprends vos termes qui sont très révélateurs de votre raisonnement : vous dites que votre majorité a consenti un « effort assumé de diminution de l'ensemble des effectifs ». Suivant la même logique que M. Ciotti, vous considérez donc qu'une diminution des effectifs revient à faire un effort et que les augmenter, comme le Gouvernement le fait, est une mauvaise manière. Vous continuez en affirmant que les moyens budgétaires ne pourront financer ces augmentations d'effectifs et les mesures catégorielles. Ce n'est pas juste : dans l'augmentation des crédits du titre 2 « Police nationale », vous oubliez de prendre en compte les modifications apportées par un amendement gouvernemental qui permet d'ajuster l'effort budgétaire à l'augmentation d'effectifs affectés au plan de lutte contre l'immigration irrégulière, grâce à 16 millions d'euros représentant 530 ETP.
Par ailleurs, monsieur Larrivé, vous qui alliez toujours précision et compétence – ce qui contribue à la richesse des échanges entre le Gouvernement et le Parlement –, vous savez parfaitement que les nominations interviennent en milieu d'année, à la sortie des écoles, et non en année pleine : même lorsque la gauche est au pouvoir, les policiers sont formés avant d'être affectés sur le terrain. Compte tenu de ces divers éléments, je peux vous assurer que les créations d'emploi ainsi que les mesures catégorielles annoncées sont bel et bien financées. Si les documents que je vais vous communiquer dans les heures qui viennent, qui portent notamment sur le séquencement du recrutement, suscitent la moindre interrogation de votre part, je vous répondrai point par point avec la même précision que celle que vous mettez dans vos questions.
Madame Le Dain, comme vous le savez, le Gouvernement est très fortement mobilisé par la sécurité routière. J'ai pris au mois de janvier vingt-six mesures, dont dix-neuf sont d'ores et déjà en application. Le comité interministériel de la sécurité routière a décidé la mise en oeuvre de cinquante-cinq mesures : vingt-deux mesures d'application rapide et trente-trois mesures opérationnelles d'organisation. Dans le contexte actuel de relâchement des comportements, il s'agit d'être beaucoup plus ferme afin d'obtenir des résultats. L'augmentation de la mortalité sur les routes en 2014 a été de 3,5 %. L'objectif de diminution du nombre de morts sur les routes passe par l'intensification de la lutte contre les comportements dangereux – éthylotests antidémarrage obligatoires, tests salivaires de consommation de stupéfiants, diminution du taux d'alcoolémie chez les primo-conducteurs – et la protection des plus vulnérables – mesures concernant les deux-roues, l'utilisation des téléphones portables et des oreillettes dans les véhicules. Il s'agit aussi de faire entrer la sécurité routière dans l'ère numérique, en utilisant tous les moyens technologiques à notre disposition pour améliorer les contrôles de sécurité et faire en sorte que personne n'échappe aux contrôles afin de renforcer l'égalité devant la loi.
Vous m'interrogez, monsieur Serville, sur la sécurité routière en Guyane. Le taux de mortalité routière s'y est stabilisé en 2013-2014, mais il reste plus élevé qu'en métropole, particulièrement pour ce qui concerne les deux roues. Notre objectif est de mettre en place des mesures de sécurité routière spécifiques au département à travers la mise en place d'un plan de lutte local qui reprend les préconisations du Gouvernement en les adaptant, notamment en tenant compte des facteurs de risque principaux, l'alcool et la vitesse.
Quant au commissariat de Cayenne, il a été décidé de le relocaliser. La construction est prévue pour mai 2018. Nous nous heurtons toutefois à une difficulté liée à l'emprise foncière. Les négociations en cours avec les acteurs locaux avancent de manière rapide, ce qui nous laisse espérer une issue positive.
Mme Descamps-Crosnier a consacré son intervention aux suites financières données à la commission d'enquête sur la surveillance des filières et des individus djihadistes. La plupart des recommandations du rapport d'enquête remis en juin, qui s'inscrivent dans le droit fil du plan de lutte antiterroriste arrêté par le Gouvernement en janvier dernier, sont mises en oeuvre. Je citerai en particulier les renforts d'effectifs au bénéfice de la direction générale de la sécurité intérieure, à hauteur de 500 ETP, et du service central de renseignement territorial, à hauteur de 350 ETP.
Afin d'améliorer la coordination entre les différents services, j'ai décidé de mettre en place un état-major opérationnel de prévention du terrorisme (EMOPT) dans une logique de complémentarité avec les services des directions générales. Il est chargé de piloter la totalité du dispositif de détection et de suivi des individus radicalisés susceptibles de commettre un acte terroriste.
Au-delà des effectifs, je veux souligner d'autres éléments importants dans cette mission de surveillance des filières et des individus djihadistes relevant du plan de lutte antiterroriste. Tout d'abord, un département de lutte contre la radicalisation a été créé au sein de l'unité de coordination de la lutte antiterroriste (UCLAT), composé désormais de vingt-deux personnes, avec en son sein le Centre national d'assistance et de prévention de la radicalisation (CNAPR), qui recueille les signalements effectués par les partenaires, via un numéro Vert – au 1er octobre, 3 247 demandes de signalement étaient enregistrées. Par ailleurs, le Fonds interministériel de prévention de la délinquance a été abondé de 20 millions d'euros, dont 8,6 millions consacrés à la prévention de la radicalisation.
Monsieur Decool, dans le courant des années 2000, diverses réflexions ont été conduites pour examiner une possible bonification pour la retraite de l'engagement comme sapeur-pompier volontaire. Ces réflexions n'ont pu aboutir, compte tenu de l'extrême diversité des situations des sapeurs-pompiers volontaires, qui sont soit étudiant, soit salarié, soit retraité, soit indépendant. En contrepartie, il existe une prestation de fidélité et de reconnaissance (PFR), qui s'est substituée en 2005 à l'allocation de vétérance. Cette prestation est versée aux volontaires engagés depuis au moins vingt ans, ce qui a contribué à augmenter la durée d'engagement désormais supérieure à onze ans. Grâce aux efforts que nous faisons, le nombre de sapeurs-pompiers volontaires a augmenté pour la première fois depuis quatorze ans : en 2014, 1 142 personnes ont rejoint leurs rangs. Nous souhaitons amplifier ce mouvement.
Mme Capdevielle m'a fait part de sa volonté de rapprocher les gendarmes et les policiers de la population. Le développement du dispositif des délégués de cohésion police-population, l'équipement des unités en caméra-piéton, le port apparent du numéro d'identification, la mise en place des plateformes internet de signalement sont autant d'actions qui nous ont permis d'aboutir à de premiers résultats, qu'il nous appartiendra d'amplifier en 2016 à travers de nouvelles actions que je présenterai dans le courant de l'année prochaine.
M. Morel-A-L'Huissier a appelé mon attention sur les plateformes uniques d'appel. À l'occasion du congrès des sapeurs-pompiers, j'ai indiqué qu'un numéro unique d'appel posait des problèmes techniques pour des raisons d'interopérabilité des systèmes de communication entre les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS). J'ai proposé que nous engagions, dans certains départements, une expérimentation destinée à rapprocher autant que possible le 17 et le 19. À son terme, nous examinerons les conditions opérationnelles qui permettraient d'aller plus loin. Je ne manquerai pas de tenir les commissions concernées informées.
Monsieur Aboubacar, sachez que la situation à Mayotte est pour moi un sujet d'extrême préoccupation. Compte tenu des dysfonctionnements existants, que vous avez vous-même pointés, j'ai décidé d'envoyer à Mayotte une mission rassemblant des membres de l'inspection générale de l'administration, de l'inspection générale de la gendarmerie nationale et de l'inspection générale de la police nationale afin qu'elle se consacre au problème de la délinquance. J'appliquerai la totalité des recommandations qu'elle formulera, y compris celles concernant le rehaussement des effectifs et des moyens des forces de sécurité de manière à les mettre en adéquation avec les difficultés auxquelles Mayotte se trouve confrontée.
S'agissant du commissariat de Mamoudzou, les travaux d'aménagement ont été engagés en 2013 et les services de police ont emménagé dans les locaux le 2 janvier 2014. Une réflexion est engagée avec le préfet de Mayotte pour évaluer les modalités d'un regroupement éventuel des services au sein de l'hôtel de police afin d'améliorer le fonctionnement des missions de support. Nous avons également procédé à la rénovation du CRA.
Je finirai avec la question de M. Baert. Je me suis rendu à Lille-Roubaix-Tourcoing il y a quelques semaines. J'ai pris des engagements concernant le rehaussement des effectifs et l'allocation d'unités de forces mobiles. Elles ont fait un travail considérable en matière de lutte contre les trafiquants. J'ai été obligé de les mobiliser il y a quelques jours à Calais et je les ai renvoyées hier dans le département du Nord : une partie d'entre elles sera utilisée à la résolution de la situation à Dunkerque et une autre sera réaffectée à la lutte contre le trafic de stupéfiants à Lille-Roubaix-Tourcoing. Vous me demandez s'il est possible d'allouer une partie des effectifs sortant des écoles à la circonscription de sécurité publique de l'agglomération de Lille. J'ai pris par écrit l'engagement de le faire, dans des proportions que j'ai indiquées aux parlementaires concernés et à la maire de Lille.
Je profite de la présence de M. Decool pour indiquer que je rendrai compte dans les prochains jours de la situation à Dunkerque, de la même manière que je l'ai fait pour Calais. Nous avons enregistré de premiers résultats que vous connaissez, monsieur le député, mais j'attends de savoir s'ils se confirment dans la durée avant de communiquer les chiffres. Cette semaine, nous avons obtenu une diminution significative du nombre de migrants dans les camps situés à Dunkerque.
Enfin, je précise que les créations nettes dans la circonscription seraient de 75.