Intervention de Paul Raoult

Réunion du 14 octobre 2015 à 16h15
Commission d'enquête visant à évaluer les conséquences sur l'investissement public et les services publics de proximité de la baisse des dotations de l'État aux communes et aux epci

Paul Raoult, vice-président de la FNCCR, président du SIDEN-SIANNOREADE :

Je ne peux que confirmer ces propos : en quatre ans, les subventions que Conseil départemental du Nord versait à mon syndicat et à l'ensemble des structures sont passées de 8 millions d'euros… à zéro. Les aides du département ont complètement disparu.

Se pose par ailleurs le problème des agences de l'eau, qui sont pratiquement les seules à aider les intercommunalités dans le cadre de leur programme d'investissement « eau et assainissement ». Or il est d'ores et déjà prévu de prélever 175 millions d'euros sur le budget des agences… En conséquence de quoi, l'Agence de l'eau Artois-Picardie à laquelle je participe depuis 27 ans, distribuera 11 millions d'euros de subventions en moins aux communes et intercommunalités.

Dans le même temps, les compétences des agences, celles que l'on pourrait qualifier de « générales », se sont élargies. Par exemple, cette année, nous avons mis 40 millions d'euros sur le pluvial, alors qu'auparavant nous en mettions une dizaine. Cela signifie qu'il y a une attente extrêmement forte sur le pluvial, à laquelle l'agence essaie de répondre. Mais comme il y a des choix à faire, nous avons dû diminuer les crédits sur l'assainissement collectif. Et je ne parle pas de ce que nous devons mettre sur les inondations, le trait de côte, l'érosion des sols, l'agriculture biologique ou la protection des champs captants…

De son côté, l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA), dont je suis vice-président, vit également du prélèvement sur les agences. Il faut dire que les besoins de cet office sont extrêmement importants puisque ses compétences s'étendent à la police de l'eau, au traitement des eaux et à la gestion des eaux dans les pays d'outre-mer. On nous annonce pour demain une belle « Agence française pour la biodiversité » à laquelle l'ONEMA sera intégré – autrement dit, on va nous demander de participer. Au final, c'est la redevance sur l'eau qui, par ricochet, financera cette nouvelle agence. Tous ces mécanismes un peu pervers aboutissent à une diminution insidieuse des contributions permettant de réaliser des travaux pour l'ensemble des communes.

En face, et contrairement à ce que l'on pourrait penser, les besoins restent extrêmement importants et en progression. En effet, malgré tout le travail qui a été fait depuis trente ou quarante ans, il y a encore beaucoup à faire sur le renouvellement des réseaux d'eau et des réseaux d'eaux usées, sur les branchements en plomb ou sur le traitement des eaux usées, du fait de toutes les nouvelles normes sur le phosphore, l'azote, etc. Toute une série de textes sont sortis en juin, juillet et août : les déversoirs d'orage, par exemple, ne peuvent plus fonctionner plus de vingt fois par an – ou accueillir à chaque fois plus de 5 % du volume d'eau autorisé. On a estimé que pour le Grand Lyon, il faudrait investir 400 millions pour se mettre aux normes. Dans mon syndicat, on n'a pas encore fait les comptes. Mais il est probable que dans les régions au climat océanique, plus aucun réseau ne sera conforme ! Il n'empêche que le décret est sorti. Par ailleurs, il faudra installer un appareil sur chaque déversoir pour calculer le volume d'eau qui y entre, et la qualité de l'eau qui en sort. Ces nouvelles normes ne feront qu'alourdir les investissements que les collectivités seront obligées de réaliser. Et je ne parle pas des services publics d'assainissement non collectifs (SPANC) qui feront eux aussi l'objet de nouveaux textes. Chacun devra par exemple indiquer comment il a géré son micro-traitement…

Des besoins en très forte progression, des recettes en diminution. J'ai bien peur que l'on ne puisse entrer dans les clous des normes que l'on nous impose désormais.

Un mot sur la défense extérieure contre l'incendie (DECI). J'ai pris la responsabilité, dans le cadre de mon syndicat intercommunal, de demander aux communes si elles voulaient adhérer pour prendre la compétence DECI. En un an, cent nouvelles communes ont adhéré. Mais maintenant, lorsque l'on analyse les schémas sur les bornes incendie, on voit bien que l'on n'est pas dans les clous.

Un décret est enfin sorti, et c'est très bien. Sauf que d'ici à deux ans, chaque conseil départemental va devoir sortir son schéma de DECI, que les communes devront ensuite appliquer. Et les cartes dont nous disposons montrent la masse de travaux à réaliser dans ces communes pour nous mettre en conformité.

Je terminerai, parce que j'en ai gros sur le coeur, par le décret qui interdit la fermeture des compteurs. Je trouve que l'on a été extrêmement généreux sur le compte des autres… Jour après jour, semaine après semaine, mois après mois, les impayés progressent. Nous sommes passés de moins d'1 % d'impayés aux alentours de 3 % ! Mais je dois équilibrer mon budget et j'attends que l'on me dise comment faire. Sans oublier que je dois faire face à une certaine démobilisation de mon personnel : après tout, si les gens ne paient plus, tant pis…

Dans un contexte déjà difficile, la diminution des dotations a inévitablement des répercussions sur le système de gestion de l'eau en France.

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