Intervention de Paul Raoult

Réunion du 14 octobre 2015 à 16h15
Commission d'enquête visant à évaluer les conséquences sur l'investissement public et les services publics de proximité de la baisse des dotations de l'État aux communes et aux epci

Paul Raoult, vice-président de la FNCCR, président du SIDEN-SIANNOREADE :

Pour ce qui est de la maintenance, on aurait effectivement pu faire plus et mieux. Mais je ne vous dis pas les difficultés auxquelles on s'est heurté quand il a fallu remplacer neuf kilomètres de réseau d'eau qui avaient été construits avec de l'amiante-ciment. J'ai dû protéger le personnel, et c'est normal. Peut-être n'aurait-il pas fallu mettre de l'amiante-ciment. Mais comme l'usine Eternit n'était pas loin – elle était à Prouvy, près de Valenciennes –, on a acheté de l'amiante. Et on en paie le prix aujourd'hui.

Dans l'Avesnois ou la Flandre intérieure, par exemple, il y a 25 kilomètres de réseau pour 2 000 habitants. Vous avez beaucoup plus de risques d'avoir des fuites quand vous êtes en milieu rural, où l'habitat est dispersé, que lorsque vous êtes dans le quartier Euralille, au pied d'une tour de 5 000 habitants. Et je ne vous parle pas de toutes les adhésions à notre syndicat qui sont intervenues progressivement depuis 1951. À chaque fois, il a fallu investir énormément. À Lallaing a été installée une belle station de lagunage en haut d'un terril, sans, bien évidemment, traiter l'azote ni le phosphore… Et aujourd'hui, on nous dit qu'il faut absolument le faire. Encore faut-il trouver un terrain.

Nous avons choisi l'interconnexion pour sécuriser le ravitaillement en eau de nos communes rurales. Comme de Dunkerque aux portes de Lille il n'y a pas de nappes phréatiques, il faut aller chercher l'eau dans la nappe de la craie, de l'Artois ou dans l'Avesnois. On aura fait 200 kilomètres de réseau en 700 millimètres, partant des portes de Dunkerque jusqu'au fin fond de l'Avesnois. On est en train de réaliser la dernière tranche : elle coûte 55 millions d'euros. J'aurais pu utiliser cette somme pour renouveler le réseau, mais j'aurais pris le risque de l'insécurité du ravitaillement en eau. Les infrastructures dépendent donc aussi de la géographie hydrogéologique du territoire.

À cela s'est ajoutée l'affaire de l'eau contaminée par le perchlorate, héritage de la guerre de 14-18, paraît-il… Dans certaines communes, on a donc dû refaire les interconnexions.

Ces quelques exemples précis montrent que le renouvellement des réseaux n'est pas aussi rapide qu'on le souhaiterait.

J'en viens au feuilleton des impayés… Quand vous avez 600 communes rurales de moins de 1 000 habitants et qui n'ont pas de CCAS, comment faites-vous ? À Lille, Roubaix ou Tourcoing, pas de problème : leur CCAS est organisé. Mais l'immense majorité de mes communes n'en ont pas, ou c'est epsilon. Il faut donc recourir au Fonds de solidarité pour le logement (FSL). Mais on ne lui a pas donné les volumes financiers suffisants. Normalement, pour régler ce problème, une enquête sociale est nécessaire. Mais avec 700 communes rurales réparties sur 300 kilomètres, il est impossible de savoir ce qui se passe dans chaque foyer. Il faut donc trouver une autre solution, sachant que sur 100 foyers qui ne payent pas, 20 % sont réellement en difficulté ; pour les 80 % restant, c'est de la négligence : ils s'en fichent. Ce n'est que lorsque l'on vient fermer le compteur que les gens vous donnent leur chèque. Aujourd'hui, nous n'avons plus de moyen rapide pour obliger les négligents à payer. Certes, il y a des procédures. Mais encore faut-il que le receveur se mette en branle, qu'il dispose de suffisamment de personnel pour engager le processus… Et au final, il vous envoie la note pour classer le dossier en admission en non-valeur !

Quant à la simplification des décrets, en tant que vice-président de la FNCCR, j'ai eu un rendez-vous avec le fonctionnaire chargé de rédiger le décret. Je lui ai dit, avec beaucoup de véhémence, que pas plus de vingt déversements par an pour un déversoir, c'est délirant. Pourtant, le décret est tout de même paru et le fonctionnaire en question a eu une promotion puisqu'il a été nommé à Bruxelles ! Mais au bout du compte, c'est à nous de faire avec ce décret. Il faudra qu'on m'explique comment on fait quand on est dans un territoire où il pleut un jour sur deux…

En fait, la vraie question, c'est de savoir si le déversoir modifie la qualité du milieu naturel dans lequel il va se déverser en cas d'orage. Dans une région de climat méditerranéen, il y a un effet de chasse quand le tuyau n'a pas fonctionné depuis des mois et des mois, comme on vient malheureusement de le voir. Par contre, dans ma région, l'effet de chasse est négligeable. L'important, c'est de voir comment le milieu naturel sera modifié par le volume d'eau qui va passer dans le tuyau. Or on a fixé une règle stricte, tout cela parce que le grand Londres avait été condamné par Bruxelles. Notre ministère, qui lave plus blanc que blanc, a ouvert le parapluie – c'est le cas de le dire – et a sorti un beau décret que je ne qualifierai pas. Mais au bout du compte, il faudra réaliser des investissements, sinon on nous dira que notre réseau n'est pas conforme, avec toutes les conséquences qui peuvent en découler.

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