Intervention de Arnaud Richard

Réunion du 2 novembre 2015 à 21h00
Commission élargie : finances - affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaArnaud Richard :

Avant l'examen en nouvelle lecture du projet de loi relatif à la santé la semaine prochaine, nous nous retrouvons pour voter les crédits de la mission budgétaire « Santé ». Nous nous voyons donc régulièrement, madame la ministre, dans l'hémicycle ou en commission, mais nous sommes toujours incapables de saisir les objectifs de votre politique en matière de santé publique – du moins, au groupe Union des démocrates et indépendants.

Alors que le projet de loi de modernisation de la santé était présenté comme la grande loi du quinquennat en matière d'organisation de l'offre de soins sur le territoire, force est de constater qu'il ne résout en rien la question de la désertification et ne prépare nullement notre système de santé pour l'avenir. A son image, le PLFSS et ce projet de budget manquent cruellement d'ambition. Après une baisse de 25 % entre 2014 et 2015, les crédits alloués au programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » vont connaître une nouvelle diminution de 12,1 millions d'euros. Parallèlement, ceux du programme 183 « Protection maladie », qui permettent la mise en oeuvre de l'aide médicale de l'État, augmentent de près de 11 %. Cet arbitrage du Gouvernement peut paraître surprenant – Dominique Tian l'a dit à l'instant – dans la mesure où les crédits du programme 204 constituent le socle de notre politique de santé publique.

J'appelle votre attention, madame la ministre, sur les crédits de l'action n° 14 « Prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades », qui diminuent de 13 %. Avec 8,3 millions d'euros en moins, cette action contribue davantage aux efforts d'économie que toutes les autres réunies. Elle vise pourtant à donner une nouvelle impulsion à l'accompagnement des malades atteints d'une maladie neurodégénérative. Plus de 850 000 personnes sont atteintes de la maladie d'Alzheimer – elles seront plus de 1,3 million en 2020 –, 150 000 de la maladie de Parkinson, et plusieurs dizaines de milliers de la sclérose en plaques. Nous sommes tous concernés, dans nos propres familles, par ces maladies. L'accompagnement des malades et de leurs proches mériterait d'être amélioré par une politique de prévention plus active, par une information à tous les stades de la maladie, ainsi que par des aides susceptibles d'apporter un répit aux aidants. Or votre projet de budget, madame la ministre, ne permettra pas ces avancées.

Par ailleurs, les subventions versées à l'Institut national du cancer (INCa) baissent de 6,5 millions d'euros par rapport à 2015. Vous l'expliquez par des efforts de maîtrise des dépenses de fonctionnement et par des économies sur certaines dépenses de recherche et développement, d'études et de communication. Le signal envoyé, reconnaissez-le, est tout de même surprenant, à l'heure où le Président de la République, comme ses prédécesseurs, annonce un plan cancer – ce sera le troisième – et l'engagement d'actions lourdes.

Quant aux autres économies, elles contribuent incontestablement à fragiliser le socle de notre politique de santé publique.

Je terminerai par quelques mots sur les crédits de la mission 183 « Protection maladie ». Bien évidemment, notre groupe ne souhaite pas la suppression de l'AME, nous l'avons dit en diverses occasions, notamment lors de l'examen de plusieurs textes budgétaires, mais cette hausse de 68 millions d'euros peut être mal comprise par nos concitoyens. Si l'augmentation des crédits s'explique exclusivement par l'augmentation du nombre de bénéficiaires, elle n'en doit pas moins être contenue par un plan de santé publique global, cohérent et efficace, accompagnant les populations concernées dans un souci humanitaire. Depuis la suppression de la franchise de 30 euros se pose également une question d'équité vis-à-vis de celles et ceux qui doivent s'en acquitter, mais nous en débattrons demain, lorsque nous examinerons dans le cadre du CEC le rapport d'évaluation et de contrôle de nos collègues Christophe Sirugue et Claude Goasguen.

Devant contribuer à réduire les inégalités sociales et territoriales de santé et à soigner les plus fragiles, la mission « Santé » est essentielle, mais nous déplorons, madame la ministre, l'absence de solution globale et pérenne pour accompagner les mutations que connaît notre système de soins, confronté à l'augmentation des maladies chroniques, au vieillissement de la population, à l'évolution des attentes des patients et aux progrès scientifiques. Il est urgent de s'attaquer à des questions aussi essentielles que la désertification médicale, le rapprochement entre le public et le privé, la carte hospitalière, la répartition territoriale équitable des établissements de santé et leur nécessaire modernisation, la sécurité sanitaire ou encore l'innovation et la recherche.

Pour toutes ces raisons, le groupe Union des démocrates et indépendants ne votera pas les crédits de la mission « Santé ».

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