Intervention de Didier le Bot

Réunion du 8 septembre 2015 à 17h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Didier le Bot, secrétaire général administratif de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie, APF :

Le nombre de personnels payés par l'APF a diminué de deux unités depuis deux ans – deux unités sur treize, cela représente un effort conséquent. Un conseiller parti à la retraite n'a pas été remplacé, non plus qu'une secrétaire démissionnaire.

J'en viens à ce qui a été fait depuis deux ans afin de structurer et dynamiser l'action de l'APF. Dès son arrivée, il y a deux ans, le nouveau secrétaire général parlementaire, M. Pascal Terrasse, a eu la volonté d'« avancer avec un horizon de travail », ce qui, concrètement, a consisté à rédiger et faire adopter un cadre stratégique – une première pour l'APF – pour les années 2014 à 2018. Ce cadre fixe des objectifs, le principal étant de faire mieux avec autant, et expose les moyens de les atteindre. Il est sous-tendu par une double volonté : d'une part, desserrer la contrainte financière, d'autre part, rechercher une meilleure implication de l'APF dans les relations internationales.

Pour dégager une marge de manoeuvre sur le plan financier, nous avons réalisé des économies de fonctionnement – j'ai déjà évoqué celles relatives au personnel –, mais aussi développé trois moyens plus originaux. Il s'agit, pour commencer, de la signature, en début d'année, d'un nouvel accord financier avec l'OIF. Cet accord, longuement négocié, s'est voulu gagnant-gagnant. Il présente une triple caractéristique. Tout d'abord, il confirme le maintien du montant de la dotation de l'APF à un niveau similaire à celui des années précédentes, à savoir 850 000 euros, alors même que l'OIF subissait une baisse très importante des contributions budgétaires de la part des États membres. Cela constitue une grande marque de confiance. Ensuite, cet accord garantit une fongibilité des crédits au sein d'une enveloppe globale. Jusqu'en 2015, l'APF signait chaque année cinq protocoles financiers avec l'OIF, concernant cinq programmes différents, dont le programme Noria. Avec ce nouveau protocole désormais unique, l'APF se voit accorder une souplesse de gestion permise par la fongibilité des crédits au sein d'une enveloppe globale. Le SGP a souhaité arrêter la segmentation des budgets et privilégier la transversalité. L'objectif était de casser les silos : ainsi, l'APF pourra, en cours d'année, redéployer et modifier la répartition des crédits afin de mettre en oeuvre ses programmes et actions de manière performante et s'adapter à l'évolution de la situation internationale – par exemple, le redéploiement d'un programme rendu impossible par l'expansion de l'épidémie de fièvre Ebola ou la nécessité de consacrer un séminaire à une thématique revêtant un caractère prioritaire. Le programme de coopération parlementaire sera adopté par le bureau d'hiver de l'APF après concertation préalable avec l'OIF.

Le deuxième moyen de desserrer la contrainte financière a consisté à introduire une politique d'évaluation. Le contrôle exercé par l'OIF sur l'utilisation des dotations octroyées était essentiellement un contrôle a posteriori et comptable. M. Pascal Terrasse a souhaité y ajouter une évaluation qualitative : pourquoi une action est-elle réalisée, à quoi sert-elle et vaut-elle vraiment ce qu'elle coûte ? L'efficacité de cette politique d'évaluation passe par une démarche en amont, consistant à se fixer des objectifs. Les progrès se mesurent notamment à l'aide d'indicateurs divers, qualitatifs et quantitatifs, dont le choix et l'usage approprié sont bien évidemment déterminants. L'OIF est d'autant plus intéressée par cette démarche qu'elle s'efforce elle-même de mettre en place une démarche similaire, fondée sur la gestion axée sur les résultats (GAR). D'ores et déjà, le SGP a souhaité une meilleure lisibilité et transparence dans l'adoption du budget, qui incluait pour la première fois en 2015 une programmation complète et détaillée des actions.

Le troisième moyen d'obtenir une marge de manoeuvre financière réside, plus classiquement, dans la recherche d'une meilleure synergie et de partenariats. Outre le partenariat avec l'OIF que j'ai déjà évoqué, nous en avons signé trois autres à Berne : un avec l'Association des secrétaires généraux des parlements francophones (ASGPF), un avec l'Association des ombudsmans et médiateurs de la francophonie (AOMF), et un avec la State University of New York (SUNY), qui est un opérateur de la United States Agency for International Development (l'USAID, Agence des États-Unis pour le développement international) – SUNY ayant pris en charge une grande partie des actions que nous avons conduites en Côte d'Ivoire. C'est une manière pour nous de mettre en valeur l'expertise francophone dans un univers que l'on pourrait croire a priori exclusivement anglophone.

D'autres partenariats sont en cours de négociation, par exemple avec le parlement panafricain ou le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). L'idée est de trouver des financements extérieurs ou d'agir en synergie. Nous le faisons déjà avec l'université Senghor d'Alexandrie pour des séminaires de formation organisés chaque année au bénéfice de fonctionnaires parlementaires : nous fournissons des intervenants parlementaires ou fonctionnaires, tandis que l'université fournit des intervenants universitaires.

L'APF ne souhaite pas renoncer au renforcement de sa présence sur la scène internationale, et s'est pour cela fixé trois objectifs. Le premier consiste à assumer une solidarité avec les pays en sortie de crise : l'APF a, au cours de ces dernières années, développé des programmes multilatéraux de développement, considérant que lorsqu'un pays revient vers la démocratie, c'est le moment de l'aider. Les besoins en la matière sont tellement importants que l'APF ne peut agir seule : elle va donc s'efforcer de jouer un rôle de coordination entre ce qu'elle peut elle-même apporter, et ce que ses membres peuvent apporter.

Le processus est le suivant : lorsqu'un pays sortant de crise souhaite être aidé et s'adresse pour cela à l'APF, nous mettons sur pied, conjointement avec l'Association des secrétaires généraux des parlements francophones, une mission d'évaluation dont nous tirons un rapport d'évaluation, mais aussi et surtout des propositions d'action très concrètes – généralement une trentaine. Lors de la session suivante, nous exposons le rapport à nos membres en précisant la part que nous allons assumer et en leur demandant ce qu'ils peuvent faire de leur côté. De tels plans de développement ont été réalisés au profit de la Côte d'Ivoire ; le Mali et Madagascar en bénéficient actuellement et, demain, Haïti, le Burundi, le Burkina Faso pourraient également en profiter.

Le deuxième objectif consiste à renforcer notre action politique dans la gestion de crise et l'accompagnement des transitions. Là encore, nous devons nous appuyer considérablement sur l'OIF, en lui faisant comprendre qu'en cas de crise, toute mission de contact doit automatiquement comprendre un parlementaire – pour cela, le SGP est très attentif à une collaboration optimale avec la nouvelle secrétaire générale de l'OIF, Mme Michaëlle Jean. Nous avons ainsi obtenu qu'un parlementaire soit intégré à la mission de contact envoyée au moment où a éclaté la crise du Burkina Faso – qui symboliquement, avait commencé par l'incendie de son assemblée nationale.

Nous demandons également à être associés aux missions d'observation électorale initiées par l'OIF. Nous n'avons pas les moyens de mettre sur pied nos propres missions d'observation, mais l'APF souhaite jouer un rôle grandissant au sein de ces missions, notamment en réclamant d'en assumer plus fréquemment les présidences. Là encore, l'idée est d'insuffler le réflexe d'une présence parlementaire au sein des missions de l'OIF.

Le troisième objectif de l'APF consiste à faire davantage entendre sa voix dans les grands débats internationaux. Nous nous efforçons de calquer nos travaux sur l'agenda international. Ainsi, dans la perspective de la COP21, nous avons suscité l'adoption d'une déclaration des parlements francophones ; d'une manière générale, nous nous efforçons régulièrement de susciter des prises de position communes sur des sujets d'actualité, telle l'abolition de la peine de mort. Afin d'être plus présente dans les grandes réunions internationales, l'APF prend en charge, lorsque le secrétaire général parlementaire ne s'y rend pas, 50 % des frais liés au déplacement et à l'hébergement de son représentant auxdites réunions, le solde étant laissé à la charge de la section concernée.

Vous le voyez, l'APF dispose de moyens limités. La possibilité d'augmenter ses ressources propres semblant aujourd'hui difficile, nous devons faire preuve d'imagination et d'ouverture pour agir plus efficacement. C'est ce à quoi l'équipe dirigeante, au premier chef le secrétaire général parlementaire Pascal Terrasse, s'efforce de répondre en mettant en avant les notions de transversalité, de responsabilité et de synergie.

Le soutien de la France est primordial. Une diminution de ce soutien déséquilibrerait fortement le fonctionnement de l'APF et aurait des conséquences très négatives sur sa capacité à remplir ses missions. Le président Abdou Diouf aimait à répéter que les Français ne savaient pas encore tout ce qu'ils pouvaient offrir à la francophonie, ni surtout tout ce que la francophonie pouvait leur offrir. Il espérait que viendrait un jour où il serait évident pour un Français de déclarer son amour pour celle-ci « sans crainte de paraître réac ou ringard ». Force est en effet de constater que la francophonie n'est pas un thème très populaire en France. Mon dernier message sera donc le suivant : il faut continuer à nous aider. Cela ne coûte pas très cher, car nous sommes une petite structure, mais ce que l'APF apporte à la démocratie parlementaire est irremplaçable.

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