Mon amendement vise à supprimer l'article 4 ter, qui a été introduit au motif que la loi Évin serait source d'instabilité juridique s'agissant des informations touristiques concernant certains territoires. Or, en vingt-cinq ans, seuls cinq articles de la loi Évin ont fait l'objet d'une décision de justice, soit un article tous les cinq ans. On ne peut donc pas dire que l'instabilité juridique soit importante !
Dans notre pays, c'est une particularité, nous nous sommes fait voler la communication en matière de santé publique concernant l'alcool. Et tant la majorité actuelle que la précédente en sont responsables. Qui a inventé « Sam, celui qui conduit, c'est celui qui ne boit pas » ? Les alcooliers. En effet, on dit au conducteur qu'il ne doit pas boire, mais on laisse les trois ou quatre autres occupants de la voiture boire autant qu'ils le souhaitent ! Qui s'est approprié le slogan « boire avec modération » ? Le lobby des alcools. En enfonçant un coin dans la loi Évin, nous ferions une grave erreur en termes de santé publique.
Je le dis très tranquillement et sans passion : les associations défendant les régions viticoles, entre autres « Vin et société », ont été davantage reçues que les réseaux luttant contre les addictions. Or, selon moi, quand on est parlementaire, on doit entendre toutes les parties. Pour ma part, j'ai entendu très longuement ces réseaux, notamment la Fondation Addiction et le docteur Alain Rigaud, président de l'Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (ANPAA). Nous pourrions penser que les choses sont contrôlées et que l'image d'une bouteille apparaissant à côté d'un soleil qui se lève sur les vignes ne va pas entraîner une consommation accrue. Eh bien si ! Cela s'appelle l'acquis : lorsqu'une image devient évidente, banale, le fait de consommer ce à quoi elle renvoie le devient tout autant.
Lors de l'examen du projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires (HPST) présenté par Mme Bachelot, il avait été question, souvenez-vous, d'une étude anglo-saxonne très intéressante. On avait fait regarder un même film à deux groupes de jeunes choisis au hasard, qui se rendaient ensuite à une soirée. Au premier groupe, on avait montré une version du film dans laquelle les acteurs buvaient de l'alcool – de manière non pas outrancière, mais tout à fait banale. À l'autre groupe, on avait montré une version dans laquelle les acteurs buvaient non pas de l'alcool, mais de l'eau ou du jus de fruit. Résultat : à la sortie de la soirée, le premier groupe était en moyenne plus alcoolisé que le second.
Je redis mon attachement à la loi Évin. Ne profitons pas du fait que cinq de ses articles ont fait l'objet d'une décision de justice pour revenir sur ce texte, alors que d'autres pays envisagent actuellement d'adopter une législation équivalente.