Les amendements identiques nos 2 , 190 et 209 posent des questions de différentes natures.
Les questions de nature juridique me paraissent mal posées par les auteurs des amendements. La décision de la Cour de justice et celle de la Cour de cassation ne portent toutes deux que sur les contributions sociales – CSG, CRDS – sur les revenus du travail, et non sur les revenus immobiliers. De plus, les deux décisions précisent bien que la CSG et la CRDS ont le statut de cotisations sociale au sens communautaire. Ces décisions ne peuvent cependant être opposées à la décision du Conseil constitutionnel, qui définit la CSG comme une contribution de toute nature, c'est-à-dire comme un impôt. Le dépôt d'un recours devant le Conseil constitutionnel n'est pas de nature à inquiéter le Gouvernement, bien au contraire : au moins les choses seront-elles rappelées et clarifiées, et le débat juridique évacué. Là n'est pas, d'ailleurs, l'essentiel de la question posée par l'article 25 et les amendements visant à sa suppression.
Au-delà du débat juridique, il y a un débat de bon sens. Selon M. Mariani, les citoyens n'acquitteraient l'impôt qu'à raison de l'utilité qu'ils seraient en droit d'attendre de leur geste. En fait, la question qu'il pose est la suivante : pourquoi payer la CSG quand on ne bénéficie pas soi-même du système de protection sociale ? Par extension, ce raisonnement peut mener loin. Ainsi, les parlementaires ici présents, quand ils ont des enfants ne fréquentant plus ni l'école ni l'université, seraient-ils en droit de considérer qu'ils doivent être exonérés de la part de leur impôt affectée à l'éducation nationale, au motif que le service public de l'éducation nationale n'est plus d'aucune utilité à leur famille ? Ce serait là une conception consumériste et utilitariste, opposée à la conception universelle de l'impôt – la seule à laquelle le Gouvernement se réfère. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Enfin, il y a un débat fiscal, qui a déjà eu lieu dans cet hémicycle. On oppose traditionnellement deux conceptions du droit fiscal : d'une part, celle faisant prévaloir la nationalité, d'autre part, celle faisant valoir la territorialité. Les États-Unis se réfèrent à la conception faisant prévaloir la nationalité : où qu'il réside, où que se trouvent les biens qu'il possède, un citoyen américain doit acquitter l'impôt aux États-Unis. Partout ailleurs dans le monde, notamment en Europe, on se réfère à la conception territoriale, selon laquelle les impôts sont acquittés là où les revenus – du capital ou du travail – sont produits.
Je trouve étrange de voir un député des Français de l'étranger défendre la conception faisant prévaloir la nationalité, au détriment de la conception faisant prévaloir la territorialité. La mise en oeuvre de la conception que vous défendez, monsieur Mariani, aurait en effet pour conséquence d'amener les Français de l'étranger à acquitter en France la totalité de leurs impôts.