Le secteur du transport maritime est sans doute l'un de ceux qui sont le plus exposés à la concurrence internationale et européenne. Dans ce contexte, notre marine marchande s'est affaiblie et n'occupe plus aujourd'hui que le vingt-huitième rang mondial, loin de la place qui fut la sienne dans les échanges internationaux.
La proposition de loi qui nous est soumise, dans le prolongement du rapport d'Arnaud Leroy Osons la mer, a pour objectif de contribuer à améliorer la compétitivité des entreprises concernées, à simplifier et à moderniser notre dispositif législatif relatif aux activités maritimes afin de les rendre plus opérationnelles. Je ne peux que partager cette ambition. Néanmoins, à ce stade de notre discussion, j'ai quelques interrogations sur le contenu de certaines dispositions.
Le secteur est soumis à une concurrence sauvage. Il est presque une caricature de l'économie libérale mondialisée. Le moins-disant social est souvent la norme pour les marins et l'immatriculation de certains navires relève du pavillon de complaisance. Dans ces conditions, comment lutter ? Céder à la tentation d'accompagner ce mouvement en pratiquant nous-mêmes le dumping social conduirait à mettre en cause les conditions de vie et de travail des personnels, à précariser les parcours professionnels. À ce petit jeu, personne n'est gagnant, et il y a toujours un acteur du secteur pour tirer la situation encore un peu plus vers le bas.
L'autre option est de miser sur le haut niveau de qualité du service, qui fait la différence, et d'agir sur d'autres coûts que ceux liés au travail. Les organisations syndicales de marins ont déjà réagi à cette proposition de loi. Si elles se félicitent que la représentation nationale se préoccupe de moderniser et de développer l'économie bleue, elles manifestent néanmoins des inquiétudes. Par exemple, vis-à-vis de l'évolution proposée à l'article 2 pour le rôle. Celui-ci n'avait jusqu'à présent qu'une seule forme légale, le « rôle d'équipage » valant également titre de perception des cotisations sociales. La suppression de la notion d'équipage, le rattachement à l'entreprise et non plus au navire font craindre des incidences sur le plan de carrière des marins embarqués et sur le calcul de leur pension.
L'article 3, qui porte sur la gouvernance des ports français, met en place un conseil des investisseurs publics et privés assurant la coordination des investissements. Cette nouvelle instance écarte en particulier les organisations professionnelles et les syndicats, qui auraient pourtant leur mot à dire sur le développement économique de nos ports.
Figurent également dans le texte des mesures contestables, qui touchent à l'indemnité de nourriture due aux marins, au contrat de travail et à ses obligations légales, à l'avenir du régime d'assurance vieillesse des marins et aux risques d'extension de la précarité.