Monsieur Gilles Lurton, la protection sociale des marins français naviguant sous pavillon étranger est une création de charge qui relève à l'évidence du PLFSS. Sur ce sujet, vous connaissez ma position, et il me ramène à l'ENIM. Nous avons là, avec ce régime spécial pour les gens de mer, un outil qu'il faut faire évoluer. En l'état actuel des choses, si certains d'entre vous peuvent reprocher un manque d'ambition à la proposition de loi, c'est parce qu'il n'y a pas eu d'ambition du tout pendant dix ans sur la question maritime. Certes, il y a eu la modernisation du Registre international français (RIF), qui est un élément important, mais elle aussi a manqué de souffle.
Je veux engager, non pas une partie de ping-pong, mais la recherche d'un consensus, afin de pousser en avant cet atout pour notre pays qu'est la mer. Cela concerne l'emploi, cela concerne la jeunesse. Monsieur Lurton, il y a certainement des lycées maritimes dans votre circonscription. Les jeunes qui ont fait « l'Hydro » ont du mal à embarquer, ils ont des attentes auxquelles nous devons répondre. Dans ce pays de terriens, nous sommes trop peu d'amis de la mer pour nous diviser, entre droite et gauche, sur la question maritime. Vous connaissez comme moi la difficulté qu'il y a en France à faire partager un diagnostic et à avancer. Je suis à votre disposition, Messieurs les députés de l'opposition, pour discuter toute proposition d'amendement.
S'agissant du domaine fluvial, Monsieur Jean-Marie Sermier, un plan a été annoncé récemment par Alain Vidalies. Oui, nous devons travailler sur le lien entre le fluvial et les ports maritimes ; considérer les besoins de financement en matière d'équipements, de péniches, pour nous mettre au niveau de nos compétiteurs ; examiner la question des écluses. Si vous avez des propositions d'amendements, je suis à votre disposition pour les examiner dans un esprit positif, car je crois sincèrement au transport fluvial.
Je crois, de même, à la SEMOP. Mais la réforme portuaire commence à dater et aujourd'hui, cet outil n'a encore jamais été testé. D'où l'ambition que je nourris pour le conseil des investisseurs publics et privés, au regard de l'investissement dans nos ports, Monsieur Fromantin. Quand on voit les montants que nos concurrents espagnols, belges, néerlandais ou allemands consacrent annuellement à leurs ports, on comprend que c'est une question d'échelle. Nous devons avoir un débat sur ce que nous voulons faire de nos ports. Faut-il les spécialiser ? Comment les relier ? Je pense aux liaisons ferroviaires, auxquelles Guillaume Pepy avait reconnu, lors de son audition à l'Assemblée nationale, ne pas avoir prêté assez d'attention. Il s'agit là d'un chantier de dix à quinze ans.
La compétition est rude entre les ports, et les besoins d'investissements sont beaucoup plus fréquents. Il y a dix ans, la taille des navires n'entrait pas en ligne de compte. Il faut voir, en quinze ans, ce que sont devenus notamment les porte-conteneurs. Les modèles économiques, eux aussi, sont bousculés par les fermetures ici d'une raffinerie, là d'un terminal multi-usages. Nous devons faire attention à cela. J'ai contacté l'Agence des participations de l'État (APE), j'en ai discuté avec les services compétents au ministère des transports. Les régions sont aussi concernées. Sur cette question des ports, nous devons avancer ensemble et être beaucoup plus ambitieux.
En ce qui concerne la simplification, il ne faut pas se tromper sur les articles 13 à 15. Contrairement à ce qu'a dit Guillaume Chevrollier, il ne s'agit pas de compliquer les choses, mais de protéger des zones très particulières liées à la production conchylicole ainsi que les zones humides. Ce sont des zones très fragiles qui, aujourd'hui, pâtissent, comme l'ensemble de l'espace maritime, des pollutions telluriques. Cela impose d'être plus strict en matière d'urbanisme et d'aménagement. Elles sont, de surcroît, menacées aussi par le changement climatique. Face à cette nouvelle menace, les huîtres et les moules constituent des bio-indicateurs. Je suis de ceux qui se battent pour pérenniser cette activité, qui est importante pour nos territoires, qu'il s'agisse de la Charente-Maritime, de la Gironde ou du bassin d'Arcachon.
Le nombre d'heures que nous avons passées à travailler avec les services compétents en témoigne, il s'agit bien d'une véritable simplification. S'agissant des droits des marins, par exemple, tout a été fait dans cette PPL pour les conserver. En tant que député de la majorité, je n'ai pas l'habitude de m'attaquer à des droits acquis. (Sourires) Par contre, il faut faire évoluer certains outils. Telle est l'idée qui sous-tend la fin du rôle d'équipage et la création d'un état des services qui, demain, servira au marin pour revalider son brevet – puisque les conventions internationales nous l'imposent – de manière plus simple et plus lisible pour l'administration et pour lui-même.
S'agissant de la gouvernance, Monsieur Yannick Moreau, je suis d'accord avec vous, mais la Constitution ne permet pas de toucher, dans une PPL, à l'organisation des services de l'État. De nombreux rapports sur la création de garde-côtes européens ont été faits, qui n'ont pas abouti. Déjà, au niveau français, il est très compliqué d'avoir une structure unique pour assurer la sûreté, la surveillance et la sécurité de nos approches maritimes. Il y a la douane, la gendarmerie maritime, parfois la marine nationale, et peut-être, demain, des brigades équipées de bateaux dans les aires marines protégées. Cela fait des années que l'on songe aux garde-côtes européens pour rationaliser tout cela. La question était déjà en discussion juste après la catastrophe de l'Erika, en 1999. Au niveau français, on n'y arrive déjà pas, alors, à vingt-huit autour d'une table, on n'est pas près de trouver une solution !
Monsieur Jean-Christophe Fromantin, je partage votre avis sur la SNSM. J'ai d'ailleurs déposé un amendement dans le cadre du projet de loi de finances visant à pérenniser le financement de cette association essentielle à la sécurité et au secours en mer, gardienne d'une tradition de solidarité des gens de mer.
S'agissant de l'indemnité de nourriture, Monsieur Patrice Carvalho, l'accroche de l'article 7 porte sur l'absence de convention collective dans le secteur de la pêche. Nous, les politiques, nous devons envoyer le signal nécessaire pour arriver à la mise en place d'une convention. Cet article est un peu comme un hameçon, si vous me permettez la métaphore, pour engager la discussion sur cette affaire. Il faut que les acteurs du secteur de la pêche s'assoient autour d'une table pour arriver à élaborer une convention collective.
C'est important pour les salariés et pour les jeunes qui s'embarquent. Il est difficile de garder des gens pour travailler en mer, car c'est un métier très dur, avec un taux d'accidentologie élevé. Ce n'est pas du ressort de la loi, mais je pense que c'est politiquement important, alors que nous sommes en pleine discussion sur l'avenir des branches, que l'ensemble du secteur de la pêche se mobilise pour arriver à un accord collectif, qui permettra de faire les ajustements nécessaires. Si vous regardez l'article auquel j'ai renvoyé dans cette disposition, il est depuis très longtemps fait référence à un accord collectif pour obtenir des éléments dérogatoires pour le secteur de la pêche.
S'agissant des rapports, Monsieur Stéphane Demilly, le premier pose la question de la sur-transposition. C'est un mal français, très présent dans le domaine maritime. Aujourd'hui, quand on fait l'inventaire de ce que l'on peut faire, à coût constant, cet élément est gratuit, et je pense qu'il aiderait tout le monde, que ce soit l'administration dans son rôle régalien ou simplement pour appuyer le secteur et les professionnels qui sont, notamment, les armateurs. Nous devons nous discipliner collectivement pour aboutir à des décrets simples et lisibles.
Quand on fait un benchmark entre les ports de Dunkerque et d'Anvers sur les normes Seveso ou installation classée pour la protection de l'environnement (ICPE), on voit qu'il y a un différentiel qui joue un rôle dans la compétitivité. On ne peut plus l'expliquer par le dialogue social ou les mouvements sociaux. C'est du passé. Aujourd'hui, nos ports sont passés à autre chose. J'ai rencontré l'ensemble des partenaires sociaux ; ils veulent tous aller de l'avant. Les limites auxquelles ils se heurtent sont des problèmes d'investissement. C'est tomber dans la facilité que rejeter la faute sur les dockers, si les ports français ne marchent pas. Le problème est beaucoup plus complexe que cela. De la même façon, j'ai refusé, dans mon rapport Osons la mer, de « taper » sur le surcoût du marin français. Nous devons regarder l'intégralité des faiblesses de notre modèle portuaire maritime pour pouvoir avancer.
Monsieur Stéphane Demilly, rassurez-vous, certains rapports seront supprimés au cours de la discussion des amendements. Il s'agira donc bien de simplification.