Les questions sur la stratégie d'Air France rejoignent celle concernant le profil de ses dirigeants. Les décideurs placés à la tête de la compagnie sont plutôt issus du monde politique mais ils ont un profil de financiers. Ils conduisent donc une politique essentiellement fondée sur des considérations financières et, en la matière, ils sont assez forts. Pour afficher une bonne rentabilité financière à court terme, il vaut mieux tailler dans les coûts et réduire la voilure plutôt que de prendre des risques et de proposer du développement. C'est leur profil qui est un problème : nous avons des financiers alors que nous voudrions des entrepreneurs. Est-ce que leur profil tient au fait qu'ils sont nommés par l'État ? Je ne sais pas et je ne prendrai pas parti là-dessus.
Que faire pour atteindre une rentabilité proche de celle de compagnies telles que Lufthansa ou Iberia ? Il faut investir, oser, se développer. En fermant des lignes, comme les dirigeants d'Air France le font depuis cinq ou six ans, il n'y a aucun espoir d'atteindre les niveaux de rentabilité de nos concurrents qui, eux, osent. En tant que navigant, je vois tous les jours les avions se multiplier sur les aérogares : d'autres compagnies osent pendant qu'Air France réduit la voilure.
Pour répondre à votre question, Mme Carlotti, je vais vous raconter une conversation que nous avons eue avec le président Gagey. Alors que nous l'incitions à développer Transavia au départ des régions, il nous a répondu : ne me demandez pas d'ouvrir des lignes long-courrier au départ de la province. En fait, prendre un risque, essayer quelque chose, faire ce que font les autres, c'est contraire à l'ADN de nos dirigeants. Transavia n'est pas dans les villes de province et il n'y a pas d'offre long-courrier dans les régions. On a fermé les lignes internationales ou moyen-courrier au départ des régions.
Sachez que nous avons subi ces décisions. Pour notre part, nous n'avons jamais souhaité la fermeture des bases régionales d'Air France, bien au contraire. Dans le flou qui a régné au moment où il était question de le faire, nous n'arrivions pas à trouver un accord avec la compagnie en raison d'un problème de dialogue social. Nous considérons que le développement de ces bases régionales est absolument indispensable. De même, nous ne sommes pas opposés au développement de l'offre low cost, à condition que cela consiste à développer une clientèle à part, ayant toute sa raison d'être, et non à siphonner les passagers d'Air France pour les transformer en clients low cost.