Intervention de Pierre-Henri Lienemann

Réunion du 4 novembre 2015 à 9h30
Commission des affaires sociales

Pierre-Henri Lienemann, de l'Union nationale des syndicats autonomes de l'aérien, UNSA Aérien :

Pourquoi Lufthansa réussirait-elle mieux que nous ? Premier facteur : le manque de capacité d'anticipation dont a fait preuve notre direction depuis plusieurs années. Sans jeter des anathèmes, je rappelle que le remplacement de Pierre-Henri Gourgeon, ancien directeur général du groupe Air France-KLM, n'a pas été le fruit du hasard : il lui a notamment été reproché des stratégies mal définies, et une lenteur de réaction notamment dans le domaine informatique. Rappelons qu'Air France a été l'une des dernières compagnies à s'outiller pour la vente de billets par internet. On parle des cabines BEST mais Lufthansa a pris dix ans d'avance sur nous dans ce domaine du très haut de gamme, ce qui a contribué à relancer sa recette unitaire. Et contrairement à Air France, Lufthansa a déjà équipé ses appareils en wifi.

Deuxième facteur : notre entreprise a peur du risque ; elle n'ose pas. Nous devrions investir beaucoup plus pour améliorer la fluidité dans les aéroports. On parle beaucoup des vols et des services à bord, mais chacun sait que le parcours dans l'aéroport est l'aspect le plus rasoir du voyage. À l'ère du numérique, des personnels équipés de tablette seraient capables de prendre le client très en amont pour l'informer et le guider. Proposer un service de qualité de ce type permet de fidéliser le client : le passager se sent pris en main, adopté par la compagnie dès son arrivée dans l'aéroport.

Troisième facteur : nous sommes une entreprise ultra-bureaucratisée. Nos cadres passent leur temps à faire du reporting. Il y a une telle trouille de prendre la moindre initiative que les cadres se retrouvent à justifier chacun de leurs actes. On ne leur demande pas de prendre des initiatives et d'aller au-delà de la consigne quand ce serait nécessaire. S'il y a un incident ou un dérèglement – et Dieu sait si cela peut se produire dans le transport aérien ! – il ne s'agit pas de faire face mais de respecter la consigne et ensuite de pouvoir se justifier. La démotivation touche particulièrement les cadres qui se sentent infantilisés. Cela joue négativement sur la productivité, la polyvalence et l'efficacité des personnels.

Il y a un point sur lequel nous n'avons peut-être pas suffisamment insisté : l'immense différence qui existe entre Air France et KLM sur le plan social. Lors d'une audition, il y a six ou sept ans, le président Jean-Cyril Spinetta expliquait très bien pourquoi le dialogue social se situait à des niveaux totalement différents dans les deux entités et que cela poserait inévitablement de graves problèmes.

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