Intervention de Marie-Christine Steckel-Assouère

Réunion du 4 novembre 2015 à 9h00
Commission d'enquête visant à évaluer les conséquences sur l'investissement public et les services publics de proximité de la baisse des dotations de l'État aux communes et aux epci

Marie-Christine Steckel-Assouère, maître de conférences HDR, présidente de la commission « Réforme territoriale » du GRALE-CNRS :

Il me semble que reporter la réforme de la DGF en 2017 présente l'avantage de pouvoir coller aux schémas actuellement en cours de préparation par les communes, et qui seront mis en oeuvre en 2017. De nombreuses communautés de communes vont être transformées en communautés d'agglomération, avec transfert de plein droit de la fiscalité professionnelle unique, et il est donc préférable d'attendre plutôt que d'être contraint de revoir a posteriori une réforme qui n'aurait pas tenu compte des fusions.

En ce qui concerne le choix entre épargne brute et épargne nette, cette dernière est mieux adaptée, car elle reflète la véritable situation des communes. Pour le reste, tout est lié à des arbitrages politiques. Notre rôle d'universitaires consiste uniquement à décrire des situations, à expliquer les conséquences des règles juridiques, les répercussions qu'elles peuvent avoir au plan institutionnel, et mon analyse est la suivante : comme je l'avais déjà dit en 2011 lors du congrès national de droit constitutionnel de Nancy, et sans me prononcer sur le fond, il me semble que l'État et les gouvernements successifs, ne parvenant pas à réorganiser la carte territoriale par des réformes institutionnelles, ont utilisé la réforme financière. La suppression de la taxe professionnelle, remplacée par la contribution économique territoriale (CET) et par une imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau, le fait de ne plus permettre aux départements ni aux régions de moduler leurs taux – sauf pour une partie de la taxe foncière –, à quoi il faut ajouter une interprétation très extensive des ressources propres ont abouti – volontairement ou non ? – à asphyxier financièrement les collectivités territoriales. Dans la mesure, par ailleurs, où les différentes réformes territoriales et la récente loi NOTRe ont accentué la spécialisation fonctionnelle des différentes strates de territoire, les collectivités territoriales ont dû recentrer leur budget sur les dépenses obligatoires.

En tant que citoyenne, la solidarité intergénérationnelle et la solidarité à l'égard de ceux qui sont en difficulté me paraissent évidemment une nécessité, mais ce sont des considérations qui ne peuvent orienter mes analyses de juriste. Il vous appartient, à vous, élus, de dire clairement quelles conséquences aura la baisse des dotations et comment, compte tenu des contraintes financières qui pèsent sur le pays, doit se répartir le poids de la contrainte financière entre l'État, les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale. Car il faut faire des économies, nous n'avons pas le choix : c'est un impératif économique et une obligation juridique, qui appelle donc un arbitrage politique.

En ce qui concerne, enfin, la solidarité nationale, elle est, comme l'équilibre financier, une obligation juridique mais également le ciment de la cohésion sociale. Il faut donc la défendre. Les citoyens, qui sont aussi des contribuables, y sont prêts et consentiront à payer dès lors qu'ils pourront bénéficier des services publics. D'où ma question précédente : souhaitons-nous vivre, à l'horizon 2020, dans un pays composé de grandes métropoles – puisque ce sont elles que favorisent les dernières réformes – entourées de déserts ruraux ?

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