Cet amendement réécrit entièrement l'article 1er. Je signale d'emblée qu'il doit être rectifié : il convient en effet, au 1° du III de l'article L. 230-4, de supprimer les deux occurrences des mots « de parties communes ».
Nul ne peut nier que le besoin en énergie varie selon le climat. Or, aujourd'hui, ce fait n'est pas pris en considération : quelle que soit la région, chaude ou froide, on touche le même SMIC mais on ne paie pas la même facture d'électricité ou de gaz. Nul ne peut nier non plus que l'on consomme d'autant plus d'énergie que l'on est plus nombreux à habiter un logement. Nul ne peut nier enfin que la consommation varie aussi selon le mode de chauffage utilisé.
Le bonus et le malus ne doivent donc pas être déclenchés au même niveau de consommation quels que soient le climat, la composition de la famille et le mode de chauffage. D'autres critères pourraient certes être pris en considération ; cela a été proposé. Mais puisque vous me demandez avec insistance de faire simple, restons-en à ces trois critères essentiels et incontestés. Je le redis aussi : ce texte consacré aux seules énergies en réseau n'est qu'une première étape.
Ces trois critères figuraient toutefois déjà dans le projet initial. Quels changements l'amendement apporte-t-il donc ?
Premièrement, la collecte des données relatives au climat, à la composition de la famille et au mode de chauffage se fera, non plus au moyen de la déclaration de revenus, mais au moyen d'une déclaration auprès d'un organisme public. Il en coûtera quelque 2 euros par an et par foyer – à rapporter aux 200 euros qu'il faut dépenser pour un diagnostic de performance énergétique.
Deuxièmement, le mode de calcul du volume de base a été modifié à la lumière des débats qui ont eu lieu au Sénat. En première lecture, je vous avais proposé d'établir une liste de dépenses d'énergie considérées comme indispensables, liste à partir de laquelle le volume de base serait défini après concertation et par voie réglementaire. Cette proposition avait suscité de votre part de nombreuses remarques justifiées. De fait, outre que le législateur ne peut se dessaisir d'une question aussi importante en la renvoyant au pouvoir réglementaire, le procédé envisagé était sujet à caution, à interprétation et à débats infinis. Je propose donc aujourd'hui une approche strictement statistique, dépendant uniquement d'un calcul mathématique. Pour chaque mode de chauffage sera déterminé un volume de base que nous sommes en mesure de calculer au niveau national ; nous le diviserons par le nombre d'unités de consommation concernées puis nous ramènerons le résultat à une base 100. Le seuil de déclenchement du malus sera fixé au sortir du premier quartile – la 25ème personne sur une échelle allant de 0 à 100. Autrement dit, le premier quartile vaudra bonus.
Troisièmement, nous avons beaucoup adouci la progression du malus. Puisqu'il doit s'agir avant tout d'un signal pédagogique, 75 % des consommateurs paieront un tarif identique ou inférieur à aujourd'hui. En effet, il n'y aura malus net qu'au-delà de trois fois la valeur correspondant à la limite du premier quartile, soit en cas de consommation extravagante. Pour les trois quarts des consommateurs donc, le dispositif n'aura rien de pénalisant, mais le déclenchement précoce du signal de malus ouvrira la voie à l'accompagnement personnalisé dont nous avons déjà parlé. À M. Chassaigne, qui craignait que le dispositif ne soit socialement injuste, je précise qu'il y aura parmi les 10 % de ménages les plus pauvres 87 % de « gagnants », contre 66 % parmi les 10 % les plus riches.
Le système est donc beaucoup plus pédagogique qu'auparavant, légèrement redistributif même si ce n'est pas sa vocation première, et fondé sur un calcul mathématique incontestable puisque reposant sur la consommation constatée.
Nous revenons en outre sur deux sujets qui ont fait débat en première lecture, puis sur lesquels le Conseil d'État s'est prononcé dans son avis.
Tout d'abord, il est apparu impossible, sous peine d'inconstitutionnalité, d'exclure les résidences secondaires du dispositif comme nous l'avions fait en première lecture. Je précise à ce propos qu'une résidence secondaire n'est pas nécessairement destinée au tourisme ou aux loisirs : il peut s'agir de la chambre d'un étudiant rattaché au foyer fiscal ou du logement complémentaire utilisé par un couple dont les membres travaillent à deux endroits distants l'un de l'autre.
Nous proposons donc de tenir compte de tous les compteurs en laissant au foyer le soin de répartir les unités de consommation entre les différents logements dont il dispose. Dans le cas d'un foyer disposant de deux logements, si toutes les unités de consommation sont rattachées à la résidence principale, il n'y aura pas de bonus au titre de la résidence secondaire et l'effet malus sera déclenché dès 50 % du volume de base pour la consommation dans cette résidence. En effet, pourquoi bénéficierait-on d'un bonus dans un endroit où l'on n'habite pas souvent ? Si en revanche un foyer de quatre personnes disposant, outre une résidence principale, d'un logement étudiant et d'un logement occupé par l'un des membres du foyer pour des raisons liées à son lieu de travail, décide de situer une unité de consommation dans la chambre d'étudiant et une autre dans la résidence complémentaire, ces logements se verront appliquer la règle de calcul précédemment définie, au même titre que la résidence principale – comme si le foyer avait plusieurs résidences principales.
S'agissant ensuite de l'habitat collectif avec chauffage collectif sans compteur individuel, donc sans possibilité de moduler individuellement le chauffage, l'objectif est de rendre très rapidement obligatoires ces compteurs individuels. Il est donc possible que l'échéance de 2017 prévue par la loi soit avancée, afin de responsabiliser les consommateurs et de les inciter à contrôler leur consommation. L'amendement aménage toutefois une période transitoire pendant laquelle le bonus ou le malus sera calculé suivant les règles normales pour l'ensemble de l'immeuble, puis réparti entre les différents logements, soit suivant la règle des tantièmes, soit suivant une autre règle que la copropriété sera maîtresse de fixer.
Cette disposition permet de ne pas exclure du dispositif les copropriétés qui ne disposent pas de compteurs individuels, ce qui poserait – la loi sur la taxe carbone ne l'a que trop bien démontré, monsieur Pancher – des problèmes d'inconstitutionnalité.
Je ne serai pas plus long. Vous avez compris que je suis allé au plus simple ; j'attends maintenant vos questions.