Intervention de Jacques Stern

Réunion du 18 novembre 2015 à 9h30
Commission des affaires économiques

Jacques Stern, membre du collège de l'ARCEP :

En ce qui concerne la neutralité de l'internet, je veux rappeler tout d'abord qu'en tant que régulateur technico-économique, l'ARCEP s'est saisie de cette question à l'été 2009. Elle a ainsi approfondi la définition du principe de neutralité, exploré les exceptions à ce principe et, surtout, leur encadrement très strict, de sorte que l'on peut dire de l'ARCEP qu'elle fait figure de précurseur parmi les régulateurs européens. Nous nous félicitons donc de l'adoption du règlement européen sur les télécommunications ainsi que de l'inscription du concept d'internet ouvert et de neutralité de l'internet dans le projet de loi pour une République numérique.

Ces deux textes constituent un acte fondateur très fort, puisqu'au-delà de la neutralité de l'internet – c'est-à-dire l'obligation d'acheminer les contenus indépendamment de leur origine, de leur destination et de leur nature –, le règlement reconnaît aux citoyens le droit d'accéder à toutes les données disponibles sur le réseau et de contribuer à les alimenter. C'est pourquoi il est peut-être plus judicieux de faire référence au concept d'internet ouvert, plus englobant que celui de neutralité de l'internet, qui est essentiellement technico-économique. Cet acte fondateur a une portée plus importante que les mesures prises dans ce domaine par d'autres pays, notamment les États-Unis, où la Commission fédérale des communications (FCC) a établi un acte administratif à droit constant, cet acte devant encore être validé par les juridictions fédérales.

Notre autorité se voit, en outre, confier un nouveau rôle, puisqu'elle sera la gardienne de ce droit et devra contrôler les exceptions au principe de neutralité. Ces exceptions sont au nombre de deux. La première a trait à la gestion du trafic, qui est absolument nécessaire pour faire face à des périodes de congestion du réseau. Elle doit être proportionnée, transparente et non discriminatoire et ne saurait donc être simplement fondée sur des objectifs commerciaux.

La seconde exception concerne les services gérés, qui ne sont pas une autre voie d'accès à internet, plus coûteuse et plus rapide. Il s'agit, non pas d'autoriser un réseau à deux vitesses, mais de pouvoir s'écarter de l'internet du meilleur effort pour des services qui, fonctionnellement, ont besoin d'une optimisation spécifique. En outre, la mise en place de ces services ne doit pas dégrader la qualité de l'internet général. Quels sont ces services ? Pour l'instant, nous en connaissons principalement deux : les services de télévision et de voix sur IP (VoIP), à quoi s'ajouteront probablement, dans l'avenir, les services de télémédecine.

Le règlement européen et le projet de loi sur lequel vous aurez à vous prononcer ne sont certainement que la première pierre de l'édifice. Une fois que le règlement entrera en application, nous aurons neuf mois pour établir avec nos homologues européens des lignes directrices. Vous aurez, quant à vous, en tant que parlementaires, à faire évoluer ce règlement, qui n'est qu'un premier pas.

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