Intervention de Jean-Louis Touraine

Séance en hémicycle du 24 novembre 2015 à 15h00
Modernisation du système de santé — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Touraine, rapporteur de la commission des affaires sociales :

Nous sommes collectivement heureux et fiers d’oeuvrer à ce texte attendu par nombre de nos concitoyens, désireux de voir se résorber les inégalités dans le domaine de la santé et s’affirmer un tournant en matière de prévention.

En première lecture, les parlementaires ont complété le projet de loi pour qu’il prenne mieux en compte les attentes des professionnels de santé et les besoins de nos concitoyens. Le titre dont je suis le rapporteur s’articule autour de deux axes principaux : le développement d’un environnement favorable à la recherche et l’évolution des métiers de la santé.

De fait, les évolutions scientifiques et technologiques doivent être intégrées rapidement, et elles obligent à repenser le système de prise en charge des patients. Le projet de loi comporte en particulier un ensemble de dispositions visant à moderniser les statuts de plusieurs professions, dans la lignée des mesures prises depuis 2012 par le Gouvernement. Le statut des masseurs-kinésithérapeutes ou des pédicures-podologues sera ainsi rénové, et certaines professions de santé, telles que assistant-dentaire ou orthophoniste, seront reconnues dans le code de la santé.

Je salue également les articles adoptés au Sénat, sur amendements gouvernementaux, visant à réorganiser la filière de santé visuelle : cette réforme était très attendue par les acteurs comme par les Français. En renforçant la complémentarité entre ophtalmologistes et opticiens-lunetiers, et en donnant des compétences accrues aux orthoptistes, nous créons les conditions d’un meilleur accès aux soins visuels de nos compatriotes, pour qui les délais d’attente avant un rendez-vous chez l’ophtalmologiste sont devenus de plus en plus longs.

Le projet de loi donne également des compétences accrues aux sages-femmes en matière de vaccination et leur ouvre la possibilité de pratiquer des interruptions volontaires de grossesse médicamenteuses. Il étend le champ des professionnels de santé habilités à prescrire des substituts nicotiniques aux chirurgiens-dentistes, aux sages-femmes ou aux médecins du travail. C’est là une mesure importante, qui complète l’ambitieux programme national de réduction du tabagisme présenté par Mme la ministre et décliné dans ce texte. En première lecture, j’ai souhaité compléter le dispositif par la mise en place, à titre expérimental pour une durée de trois ans, de consultations et de suivis spécialisés des femmes enceintes tabagiques. La France détient en effet le triste record, en Europe, du nombre de femmes qui fument pendant la grossesse, avec les conséquences graves que cela peut avoir pour le nouveau-né. Il serait donc coupable de ne rien faire face à ce phénomène.

Enfin, nous répondons à une attente exprimée de longue date par les professionnels paramédicaux en proposant le développement de l’exercice en pratique avancée. Il s’agit là d’un progrès essentiel. Grâce à la création du métier d’infirmier clinicien, les auxiliaires médicaux formés à la pratique avancée verront leurs missions élargies au sein des établissements de santé ainsi que dans les centres et maisons de santé. Concrètement, ils pourront intervenir dans des domaines aussi variés que la prévention ou les actes techniques et d’évaluation, et prescrire certains produits de santé ou examens complémentaires.

Le titre III comprend aussi plusieurs dispositions visant à rendre plus attractive la recherche biomédicale en France. D’ores et déjà, le Gouvernement a ramené les délais de mise en oeuvre des essais cliniques de dix-huit à deux mois. Le projet de loi généralise le dispositif de la convention unique à l’ensemble des établissements de santé. Cette mesure simplifiera et accélérera la mise en place des essais cliniques à promotion industrielle, dans un contexte de forte diminution et de concurrence internationale accrue. Tout au long de l’examen du texte, nous avons écouté les acteurs de la recherche pour améliorer le dispositif afin de le rendre plus efficient, qu’il s’agisse de la possibilité donnée aux médecins investigateurs de viser la convention signée par le responsable de l’établissement de santé et le promoteur, ou alors du renforcement du droit à l’information des patients qui participent à une recherche. De même, le texte soutient, par un dispositif dédié, l’application de thérapeutiques innovantes.

Je veux également souligner l’importance des mesures visant à lutter contre les ruptures d’approvisionnement de médicaments. Au cours des cinq dernières années, le nombre de produits de santé en rupture a en effet été multiplié par dix. Les risques croissants de pénuries justifient l’intervention des pouvoirs publics et les obligations imposées aux acteurs de la chaîne d’approvisionnement.

Dans un autre article, un amendement de Mme Valérie Fourneyron rend désormais possible la prescription d’activités physiques adaptées aux personnes atteintes d’une affection de longue durée. Il s’agit d’un complément indispensable au rétablissement de nombreux patients, voire à la prévention des récidives. J’espère donc qu’une place croissante sera accordée à ces préoccupations. Je regrette que les sénateurs n’aient pas saisi tous les enjeux que revêt une telle mesure, heureusement rétablie par notre commission des affaires sociales.

Enfin, je souhaite conclure en évoquant rapidement une disposition qui me tient à coeur et qui figure dans le titre IV, rapporté par Mme Geoffroy. L’article 46 ter a vocation à relancer l’activité de transplantation dans notre pays. Plus de 20 000 patients, en France, sont en attente d’une greffe, et le manque de greffons disponibles réduit chaque jour davantage leurs chances de survie. C’est pourquoi nous avons décidé de clarifier le droit qui encadre le prélèvement d’organes en renvoyant à un décret les modalités de refus du prélèvement, tout en précisant que le registre national des refus demeure le principal moyen d’expression de la volonté de chacun.

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