Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission, mesdames, messieurs les rapporteurs, hier lors de l’examen, en nouvelle lecture, du projet de loi de financement de la sécurité sociale, j’ai déploré les conditions dans lesquelles son examen allait être bouclé en quelques heures. Aujourd’hui, c’est l’examen de ce projet relatif à la santé, de façon tronçonnée – plusieurs des orateurs du groupe Les Républicains l’ont déjà souligné – que je dois déplorer. Nous sommes censés y travailler ce soir, demain soir, et, éventuellement, vendredi après l’hommage national qui sera rendu aux victimes des attentats du 13 novembre. Cela rend le travail très compliqué, d’autant que plus de sept cents amendements doivent être examinés. Il n’est pas satisfaisant que la discussion en soit ainsi tronçonnée.
Madame la ministre, les professionnels de santé sont vent debout contre votre projet de loi. Vous avez très souvent eu l’occasion de les rencontrer. Depuis plusieurs mois, ils essaient de vous faire passer un message que vous n’entendez pas. Ce message est pourtant simple : ils pensent que votre projet remet profondément en cause notre système de santé. En généralisant le tiers payant, vous déconnectez définitivement les patients du coût de leurs soins et vous achevez de fonctionnariser totalement les professionnels médicaux. Il est indéniable que le tiers payant va conduire à une surcharge de travail pour les médecins au détriment de leurs patients.
Personne n’est mieux placé que les médecins pour vous adresser ce message, et leurs syndicats sont unanimes sur ce point. Hélas, ce message, vous ne l’entendez pas ! Les professionnels de santé doivent être remerciés d’avoir, dans les circonstances que l’on sait, interrompu leur grève du 13 novembre – nous les en remercions tous. L’ensemble des problèmes reste cependant posé et vos réponses ne les satisfont pas.
Je voudrais, madame la ministre, vous poser deux questions. Pouvez-vous indiquer à la représentation nationale quand sera publié le rapport, initialement prévu pour le 30 octobre, détaillant la façon de parvenir à un guichet unique de paiement des médecins ?
Un hebdomadaire révélait récemment que l’assurance maladie réfléchissait à « envoyer une facture de 50 euros aux assurés toutes les cinquante visites chez le médecin » afin de récupérer auprès des patients le montant des franchises de 50 centimes par boîte de médicament et du forfait de 1 euro par consultation. Pouvez-vous indiquer à la représentation nationale comment vous ferez pour récupérer ces franchises auprès des patients ? Je rappelle que le Sénat a estimé le montant des franchises à 870 millions d’euros.
S’agissant du tabac, point qui a déjà été longuement abordé, vous voulez imposer le paquet neutre dès 2016. Il s’agit selon nous d’une simple opération de marketing destinée à vous faire de la publicité et à détourner l’attention des vrais sujets. De plus, cette mesure est contraire aux accords signés avec les buralistes, dont la profession est très menacée. Je déplore que ce projet de loi relatif à la santé ne comporte aucun volet prévention, notamment – ce qui me scandalise – en milieu scolaire.
La médecine scolaire française est l’une des plus lamentables d’Europe, alors même que le taux de suicide des jeunes en France est parmi les plus élevés en Europe. Toutes les études montrent que l’alcoolisme et la consommation de drogues progressent chez nos jeunes. Beaucoup avouent avoir fumé leur premier joint au lycée ou même au collège, avant l’âge de treize ans. Et certains estiment être des fumeurs réguliers. Ne croyez pas qu’en instaurant votre paquet neutre, vous pourrez vous exonérer en ce domaine, même si vous avez indiqué en commission que la médecine scolaire n’était pas du ressort de votre ministère, mais de celui de l’éducation nationale. Peu importe, il est préoccupant qu’une nouvelle fois, une loi relative à la santé ne traite pas de la médecine scolaire. C’est dommage, car c’est l’avenir de nos jeunes, lycéens et collégiens, qui est en jeu. Nous aimerions une réponse de votre part sur ce point.
S’agissant de l’expérimentation des salles de shoot, à défaut que le projet soit abandonné, le groupe Les Républicains aurait préféré que vous vous aligniez sur la position plus modérée du Sénat, à savoir que le lieu choisi soit intégré dans un hôpital et placé sous la responsabilité de professionnels de santé. Puisque vous semblez ne pas vouloir renoncer à expérimenter des salles de shoot, notamment à Marseille – ce que nous pensons être une décision néfaste –, il nous semble que les professionnels de santé seraient mieux à même de suivre et d’aider les drogués, dont il ne faut pas oublier que la vie est en danger. Le personnel médical pourrait mieux jouer son rôle dans l’enceinte d’un hôpital.
Dans l’article 26 du projet de loi, vous redéfinissez la notion de service public hospitalier – SPH – ainsi que les missions des établissements de santé assurant ce service, les urgences notamment.
Vous confirmez l’interdiction pour les médecins de pratiquer des dépassements d’honoraires dans les établissements de santé privés et les cliniques, ce qui est tout à fait anormal puisque vous continuerez à le tolérer dans les hôpitaux publics, ce qui constitue une discrimination insupportable.