L'année 2014 a été une année de transition pour Radio France puisque le groupe a connu un changement de direction. Dès ma prise de fonctions le 12 mai, j'ai engagé un travail pour repenser profondément la grille des programmes des différentes antennes. Les nouvelles grilles, mises en place à l'été 2014, ont rencontré un beau succès puisque l'ensemble des chaînes, à l'exception de Mouv', ont vu leur audience progresser.
2014 est aussi une année particulière car elle coïncide avec l'ouverture au public de la Maison de la radio après des travaux commencés en 2011. Pour son premier week-end d'ouverture le 14 novembre, elle a accueilli 25 000 visiteurs, notamment dans l'auditorium qui offre 1 460 places pour faire rayonner la musique classique et les quatre formations musicales de Radio France.
2014 est donc une date importante pour le chantier de réhabilitation. En 2008, le coût de celui-ci avait été évalué à 328 millions d'euros, montant qui a été réajusté à 385 millions par le conseil d'administration en avril 2014. Cette enveloppe permet la poursuite du chantier dont l'ouverture au public n'est qu'une étape. La fin du programme de réhabilitation est prévue pour 2018.
Sur le plan social, l'année 2014 est également une année importante. Les négociations du nouvel accord d'entreprise ont abouti en décembre 2014 à un relevé de négociations qui prévoit des évolutions de la classification des emplois des personnels techniques et administratifs. Un nouvel accord collectif pour les journalistes a été signé en 2015 tandis que l'accord sur les personnels techniques et administratifs se prolonge jusqu'en avril 2016.
2014 est enfin la première année de déficit. En octobre 2014, j'avais annoncé en conseil d'administration un possible déficit en fin d'année entre 5 et 20 millions d'euros. In fine, celui-ci a été limité à 2,1 millions d'euros. Le budget 2015, qui a été voté avec un mois de retard en janvier, prévoit un déficit de 21 millions d'euros.
C'est en 2014 que j'ai découvert l'ampleur du déficit d'exploitation et les problèmes de trésorerie qui pesaient sur l'entreprise du fait du chantier de réhabilitation et d'un moindre financement de l'État en 2012, 2013 et 2014 : 87 millions d'euros de crédits, inscrits dans le précédent COM, n'ont pas été versés à Radio France.
J'en viens au COM 2015-2019 qu'il est temps de signer et de mettre en oeuvre puisqu'il est censé couvrir l'activité de l'entreprise depuis le début de l'année 2015.
Il prévoit un déficit de 21 millions d'euros pour cette année et, au terme de négociations difficiles avec l'État, un retour à l'équilibre sous trois ans.
Pour y parvenir, nous comptons poursuivre la politique de réduction des dépenses, en particulier au travers de la politique d'achat mise en place par mon prédécesseur. Nous avons également l'intention de revenir sur les modes de diffusion anciens – en ondes moyennes et longues –, ce qui nous permettra d'économiser en année pleine 13 millions d'euros. Enfin, nous devons faire des économies sur la masse salariale, qui représente 60 % des dépenses du groupe. La radio publique, à la différence de la télévision publique, présente, en effet, la particularité de produire elle-même l'intégralité de ses programmes.
Le conflit social du printemps avait notamment pour cause le plan de départs volontaires que nous avions envisagé pour retrouver l'équilibre d'exploitation sous deux ans. L'année supplémentaire qui nous est accordée pour atteindre cet équilibre nous permet de substituer à ce plan qui portait sur 300 équivalents temps plein, une politique de non-remplacement systématique des départs naturels – Radio France connaît entre 150 et 180 départs par an. Afin de suivre la trajectoire inscrite dans le COM, nous prévoyons le remplacement d'un départ sur deux pour les exercices 2016 et 2017, de deux sur trois à partir de 2018, avant le retour à un remplacement pour un départ. Cette politique de non-remplacement permet une économie de 22 millions d'euros et une stabilisation de la masse salariale au cours du COM. En 2014, le coût de la masse salariale s'élevait à 399 millions d'euros ; il devrait être de 395 millions en 2019 ; nous absorbons ainsi la hausse mécanique de la masse salariale.
Au-delà des efforts de l'entreprise, l'État nous apporte son soutien – nous en mesurons l'importance dans le contexte actuel – pour achever le chantier de réhabilitation par le biais d'une dotation en capital de 55 millions d'euros auxquels s'ajoute un complément de contribution à l'audiovisuel public d'investissement à hauteur de 25 millions. Par ailleurs, l'État nous autorise à recourir, en tant que de besoin, à l'emprunt à hauteur de 90 millions d'euros ; toutefois, 70 millions devraient suffire.
La trajectoire financière, qui repose sur les efforts de l'entreprise et le soutien de l'État, doit nous permettre de développer un projet structurant et stratégique pour l'entreprise. Le volet financier compte évidemment, mais le volet éditorial du COM constitue aujourd'hui la feuille de route de l'entreprise.
Le COM comporte trois axes.
Le premier correspond au coeur de métier radiophonique. Il vise à conserver et à renforcer notre place de premier groupe radiophonique français en l'adaptant à l'ère numérique. Notre offre éditoriale doit affirmer la complémentarité de nos sept chaînes pour toucher un public le plus large possible.
Pour ce faire, nous devons mener une politique numérique offensive et audacieuse, notamment dans notre présence sur les réseaux sociaux. L'objectif est au minimum de stabiliser l'âge de l'audience globale du service public qui se situe aujourd'hui entre 55 et 57 ans. La moyenne d'âge des consommateurs de radios généralistes est supérieure de dix ans à celle de la population française. Il est donc important de développer une offre numérique et éditoriale – je pense notamment à la refonte de Mouv' qui vise aujourd'hui les 13-24 ans – pour compléter notre gamme.
Deuxième axe du COM, affirmer notre rôle de prescripteur et de diffuseur musical, et plus généralement culturel, autour de la Maison de la radio. Vous l'avez rappelé, les investissements que nous faisons visent à moderniser l'outil de production de Radio France et à mettre aux normes la Maison de la radio. Mais l'enjeu porte aussi sur la démocratisation culturelle et l'accès à la culture, en particulier à la musique, avec nos deux grandes salles – l'auditorium et le nouveau studio 104 – pour faire partager la musique classique autour de nouveaux formats accessibles au plus grand nombre. Il s'agit de positionner Radio France comme un opérateur culturel, en plus du média de masse qu'il est, puisque, je le rappelle, il rassemble chaque jour 14 millions d'auditeurs.
Le troisième axe du COM est financier. Il porte sur les moyens pour appliquer notre politique en direction des publics que je souhaite placer au coeur de notre stratégie. Le volet financier repose sur des économies, sur le soutien de l'État mais aussi sur le développement des activités de diversification. La nouvelle Maison de la radio va là aussi nous permettre d'engranger de nouvelles recettes.
Le texte du COM est à dessein ramassé autour de treize objectifs et onze indicateurs, contre quarante-six précédemment. Nous avons souhaité, avec les ministères de tutelle, disposer d'un outil plus simple à suivre. Je pense que la représentation nationale y sera sensible. Le COM doit être un outil de pilotage pour l'entreprise ainsi qu'un outil de suivi pour les tutelles, notamment le conseil d'administration.
Le COM pour les cinq prochaines années porte une ambition pour cette entreprise à laquelle les Français sont attachés – ils nous l'ont montré en deux occasions au cours de l'année écoulée : lors de l'incendie du 31 octobre 2014 mais aussi lors du conflit social du printemps 2015 qui a privé les auditeurs de leur radio. Les résultats d'audience, publiés demain, confirmeront cet attachement.