Intervention de Denis Baupin

Réunion du 18 novembre 2015 à 16h30
Mission d'information sur l'offre automobile française dans une approche industrielle, énergétique et fiscale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDenis Baupin :

Je prolongerai les questions de Mme la rapporteure concernant la fixation des normes. Vous nous avez indiqué très honnêtement que vous recueilliez l'avis des constructeurs en la matière – ce qui ne surprendra guère. Mais vous ne nous avez pas précisé en quel sens ils influaient : est-ce dans le sens de normes plus exigeantes ou au contraire moins exigeantes, d'un point de vue environnemental ? Car ceux-ci affirment généralement qu'ils sont favorables à l'accélération de la mise en application de ces normes.

S'agissant de savoir qui était au courant de l'existence de logiciels de trucage, j'ai commis une tribune la semaine dernière dans laquelle je cite cet extrait d'un article d'Auto Moto datant de 2005 : « La multitude de capteurs calculateurs installés aujourd'hui dans les voitures constituent autant d'espions électroniques facilitant les petits ajustements avec la réglementation. Capables de déterminer si le véhicule est en train de passer un cycle de dépollution, ils permettent le plus simplement du monde de basculer l'électronique moteur sur le programme spécial homologation ». Ce propos a été publié il y a dix ans dans un journal qui est loin d'être confidentiel et qui ne doit pas être inconnu de vos services ! Peut-on raisonnablement penser que depuis dix ans, personne, à part les journalistes auteurs de cette citation, ne s'est posé ce type de question et n'a imaginé qu'il pouvait y avoir des logiciels de trucage dans les véhicules ? Toutes les personnes que nous interrogeons nous répondent qu'elles ne savaient rien. Je peux comprendre que l'on n'ait pu savoir s'il allait s'agir de Volkswagen ou d'un autre constructeur. Mais comment se fait-il que ce type de constat ait été effectué il y a dix ans et que depuis lors, personne ne se soit préoccupé de savoir si les tests effectués étaient non pas représentatifs – car on savait qu'ils ne l'étaient pas – mais aussi truqués ?

Vous nous avez parlé du rôle de l'État actionnaire des deux entreprises que sont les constructeurs nationaux. Quelles orientations ont-elles été données de la part de l'État au sein du conseil d'administration de chacune de ces entreprises pour mettre en oeuvre la transition énergétique ? Nous avons la chance d'être actionnaires de ces entreprises. Et nous sommes face à des enjeux écologiques majeurs dans une industrie en difficulté, qui cherche à trouver un nouveau souffle et doit cependant répondre à des besoins de mobilité essentiels dans notre pays. Or, on sait que l'acheteur d'un véhicule neuf a cinquante-quatre ans en moyenne en France. Il existe donc un décalage très important entre les véhicules que l'on vend aujourd'hui et les enjeux à la fois écologiques et sociaux auxquels nous sommes confrontés. Lorsque vous nous indiquez que les enjeux du véhicule « deux litres aux cent kilomètres » concernent en priorité le poids, les matériaux et les performances des véhicules, je suis toujours surpris – même si les constructeurs nous ont tenu le même langage lorsque je les ai auditionnés en tant que rapporteur pour l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST). Est-il toujours nécessaire qu'un véhicule puisse rouler à 180 kilomètres par heure ? Un véhicule automobile doit-il forcément être conçu pour transporter une famille en vacances alors que 99 % du temps, il transporte une personne seule ? Ces questions sont-elles abordées dans le cadre de la définition, par le comité stratégique de filière, de perspectives de long terme ? Comment l'État actionnaire apporte-t-il sa part en la matière ? Transmet-il de tels messages aux constructeurs ? Nous avons adopté une loi de transition énergétique et nous savons que nous ne pourrons respecter les engagements climatiques de la France, parmi lesquels le facteur quatre, si nous ne parvenons pas à faire évoluer la mobilité et notamment les véhicules.

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