Par ailleurs, il est clair que poser ainsi des objectifs précis et chiffrés après 2030 serait au mieux hasardeux : j’y vois surtout la preuve de l’inconséquence macro et micro-économique de cette majorité.
Nous avions proposé, lors de l’examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, de fixer une trajectoire de développement des énergies renouvelables, les ENR, avec un objectif non-contraignant de 15 % à 20 % d’ici 2020.
Il s’agit d’objectifs réalisables au regard des avancées technologiques actuelles qu’il faudrait poursuivre tout en simplifiant les règles existantes pour le déploiement des ENR matures, en laissant le marché arbitrer le prix des énergies et en privilégiant fiscalement les énergies vertes qui s’intègrent le plus harmonieusement au réseau existant, de manière à limiter les perturbations sur celui-ci.
S’agissant ensuite de l’agro-écologie en tant qu’alternative à notre mode de production agricole, votre résolution veut faire de ce mode de production l’alpha et l’oméga de notre agriculture. Or, si l’agro-écologie peut conduire à des expérimentations intéressantes, elle ne peut, à elle seule, constituer l’unique socle de la politique de développement agricole et assurer la totalité de la production alimentaire, que ce soit en France ou dans le reste du monde.
L’agro-écologie en Vaucluse, premier département – que je connais bien – agricole de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, est menacée par la prolifération des parasites. L’an dernier, la production d’huile d’olive s’est effondrée à cause de la bactérie Xylella fastidiosa. La production de cerises – qui a baissé de 40 % l’an dernier – est menacée par la drosophile Drosophila suzukii. Et certains vignerons bio ont décidé de faire machine arrière, compte tenu de la prolifération d’un autre parasite, le black-rot.
Nous avons besoin, au contraire, d’assurer la transition de l’agriculture vers des systèmes à la fois plus compétitifs et plus vertueux sur le plan écologique. Cela suppose de renforcer nos dispositifs de recherche et d’expérimentation, afin de faire face à ces parasites, et d’accélérer l’innovation dans nos filières, tout en les croisant avec les besoins et les initiatives locales. Je constate cependant, dans mon département, qu’à l’inverse les laboratoires d’expérimentation agricole sont confrontés à une baisse continue de leurs ressources, ce qui ne leur permet pas de faire face aux menaces.
De plus, que dire de la concurrence internationale, intra et extra-européenne, qui fait fi de notre réglementation interne et qui déverse allègrement sur le marché français des produits moins qualitatifs et qui ne respectent pas nos normes ? Ces dernières sont pourtant très restrictives en matière de produits phytosanitaires.
Je prendrai pour exemple le cas du diméthoate, pesticide utilisé dans la culture de la cerise, que les agriculteurs concernés ne peuvent utiliser avant une certaine date : cela, en tout cas en Vaucluse, fait baisser la production, alors que, dans le même temps, les étals se remplissent de cerises provenant de Turquie et dont les producteurs ne sont pas du tout frappés de la même interdiction qui est vue, dans notre pays, comme un problème sanitaire.
Cette situation aboutit à ce que les consommateurs français consomment, quoi qu’il en soit, du diméthoate : madame la ministre, nous marchons complètement sur la tête ! Il faut donc revenir au principe de réalité, face à une concurrence bien souvent déloyale au niveau mondial.
S’agissant enfin de l’économie circulaire, la promotion de celle-ci, aux côtés de la croissance verte et du développement local des énergies renouvelables, est, je vous le répète, tout simplement contradictoire.
Comme je vous l’avais fait remarquer lors de l’examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, les énergies renouvelables sont très dépendantes des ressources naturelles et font massivement appel aux ressources métalliques, comme le néodyme et le dyprosium – utilisés dans les aimants permanents des génératrices d’éoliennes – et le gallium, l’indium, le cadmium, ou le cuivre – utilisés dans la fabrication de panneaux photovoltaïques. Or il s’agit de terres rares qui, en tant que ressources finies, valent bien, madame la ministre, l’uranium.
En construisant ainsi des panneaux photovoltaïques et des éoliennes, nous prenons tout simplement le chemin de l’importation de ces ressources qui se trouvent en Chine. Prendre le tournant d’une économie circulaire revient donc à tourner en rond, sans compter les problèmes écologiques et sanitaires que posent certaines installations, que ce soit pour la faune, la flore ou, évidemment, le voisinage.
Pour toutes ces raison très pratiques et très concrètes, notre groupe ne soutiendra pas votre texte et votera donc clairement contre celui-ci.