Intervention de Thierry Repentin

Séance en hémicycle du 15 janvier 2013 à 15h00
Contrat de génération — Présentation

Thierry Repentin, ministre délégué chargé de la formation professionnelle et de l'apprentissage :

Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, ainsi que le rappelait fort à propos Michel Sapin dans son intervention, les jeunes, quel que soit leur niveau de diplôme, sont aujourd'hui, hélas ! les principales victimes de la précarité sur le marché du travail.

On ne peut se résoudre à accepter cette situation paradoxale. C'est en effet au début de la vie active que l'on a besoin de sécurité professionnelle pour acquérir un logement, disposer de moyens de mobilité, enraciner un couple, bref : démarrer sa vie avec une dose légitime d'espoir et de confiance. En remettant au centre du jeu le CDI comme modalité première d'embauche des jeunes, le contrat de génération va constituer une formidable locomotive pour la sécurisation de leurs parcours professionnels.

Cependant, il n'est pas rare que l'embauche, même en CDI, ne suffise pas à stabiliser un jeune dans une entreprise. Dans certains cas, il peut se sentir mal intégré, avoir du mal à tisser des liens de sociabilité professionnelle. Le savoir académique ou professionnel qu'il a acquis durant sa formation initiale n'est pas, à lui seul, suffisant pour qu'il s'approprie les règles de savoir-faire ou de savoir-être propres à l'entreprise. L'échec est possible, même en CDI, et, faute d'accompagnement, l'intégration professionnelle peut se trouver brutalement abrégée.

C'est pourquoi je souhaite pouvoir mobiliser les leviers de la formation continue au service de l'intégration durable dans l'emploi des jeunes bénéficiaires d'un contrat de génération. En la matière, la nouvelle convention-cadre 2013-2015 que nous nous apprêtons à signer avec les partenaires sociaux gestionnaires du désormais célèbre Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels – le FPSPP, dont nous avions beaucoup parlé dans le cadre de l'examen du texte sur les emplois d'avenir – va jouer un rôle important, puisqu'elle prévoit le soutien des actions de professionnalisation des jeunes bénéficiaires d'un contrat de génération, dès les premiers mois de leur CDI.

D'autre part, l'accord national interprofessionnel relatif au contrat de génération en date du 19 octobre 2012 prévoit que « tout jeune recruté bénéficiera d'un parcours d'accueil dans l'entreprise et d'un référent ». Le FPSPP interviendra également positivement sur ce plan en finançant l'élaboration de référentiels interbranches relatifs au rôle de tuteur et de référent qui faciliteront l'accueil des jeunes dans l'entreprise ainsi que la transmission des savoirs et des expériences. Grâce aux outils de la formation au sens large, le rôle intégrateur du CDI sera renforcé et le pacte intergénérationnel s'en trouvera conforté au sein de l'entreprise.

Outre le contrat de génération et ses attributs en matière de formation, il est un autre vecteur de l'emploi durable des jeunes auquel, vous le savez, le Gouvernement est très attaché : je veux parler du contrat en alternance. Loin de se concurrencer, comme certains ont pu le craindre – et parfois, le craignent encore –, grâce à ce texte, les contrats de génération et les contrats en alternance seront complémentaires et joueront gagnant-gagnant. En effet, il est utile de préciser que le recrutement d'un jeune en contrat de professionnalisation en CDI sera éligible au contrat de génération, tout comme la pérennisation en CDI au sein de l'entreprise d'un contrat d'apprentissage ou d'un contrat de professionnalisation précédemment conclu en CDD.

De plus, l'accord national interprofessionnel, dont les dispositions sur ce point seront déclinées dans les textes d'application de la loi portant création du contrat de génération, prévoit que les entreprises de plus de 50 salariés devront engager la négociation d'un accord collectif intergénérationnel qui précisera les modalités de recours ou de développement des contrats en alternance dans l'entreprise et fixera des objectifs chiffrés en matière de recrutements de jeunes en CDI, y compris lorsque le CDI succède à une formation en alternance.

Ainsi, la dynamique du contrat de génération favorisera la croissance du nombre de jeunes alternants accueillis au sein des entreprises françaises. Mais elle confortera aussi – je sais que certains y sont sensibles – la continuité du parcours des jeunes, en augmentant le taux d'embauche directe à l'issue des contrats en alternance.

La dynamique globale créée au sein de l'entreprise en matière de transmission de savoirs et d'expérience contribuera aussi à la qualité du suivi du jeune, facteur de succès. Car si le contrat de génération n'est certes pas un nouveau contrat en alternance, il n'en demeure pas moins qu'il emprunte à l'alternance la place accordée à l'intermédiation indispensable pour transformer le travail productif en compétences, grâce à un référent qui ne doit pas être forcément le senior maintenu dans l'emploi, mais dont le rôle ressemblera, quoi qu'il en soit, à celui d'un tuteur ou d'un maître d'apprentissage.

Dans la panoplie des moyens disponibles pour favoriser l'insertion professionnelle des jeunes, le contrat de génération tiendra donc une place de choix aux côtés des emplois d'avenir, votés il y a quelques mois et dont le déploiement est en cours, et des mesures de développement de l'apprentissage que le Gouvernement envisage de mettre en oeuvre d'ici à l'été prochain.

En matière d'insertion professionnelle des jeunes, je veux insister sur le sauvetage de l'AFPA, annoncé hier à Caen par le Premier ministre – chez vous, madame la présidente –, une AFPA que nous avons rénovée et sauvée alors qu'il est permis de se demander si sa disparition n'avait pas été programmée par le précédent gouvernement.

D'autres projets sont en cours. Je pense notamment à la mise en place du compte personnel de formation, sur le principe duquel les partenaires sociaux se sont récemment mis d'accord dans le cadre de l'accord sur la sécurisation de l'emploi, ainsi qu'à la prochaine loi de décentralisation, qui viendra renforcer les compétences des régions en matière de formation professionnelle. Vous aurez à vous prononcer sur ces dispositifs dans les mois qui viennent.

Enfin je veux rappeler que, dans le prolongement de la grande conférence sociale de juillet dernier, les présidents de conseils régionaux et les préfets de région ont été destinataires, il y a quelques semaines, d'un document-cadre préconisant la mise en place de « pactes régionaux pour la réussite éducative et professionnelle des jeunes », qui établiront des objectifs conjoints et chiffrés de réduction du nombre de jeunes se trouvant sur le marché du travail sans qualification professionnelle.

Comme vous le voyez, le grand ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ne néglige aucun des leviers susceptibles d'être actionnés lors de l'examen des textes présentés à l'Assemblée nationale. Ces leviers sont nombreux et divers, mais cohérents et complémentaires. Ils viennent soutenir le combat que nous menons pour l'emploi, dans un esprit de confiance à l'égard de la jeunesse de notre pays et dans une motivation constante pour le développement de la formation professionnelle, qui est l'un des éléments importants de la compétitivité de nos entreprises. Les contrats de génération sont inscrits dans une chaîne d'actions et de décisions dont la logique devait être rappelée. Il vous appartiendra, d'ici à la fin de la semaine, de lui donner corps par votre vote, ce dont je ne doute pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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