Rapporteur de la loi sur la sécurisation de l'emploi, visant à étendre l'ANI, j'ai consulté les partenaires sociaux, mais je reste convaincu que le Parlement reste souverain, car il est porteur de l'intérêt général, sur des sujets comme la protection sociale des travailleurs. Nous devons donc assumer ce que j'ai appelé une valse à trois temps. Il faut prendre en compte le lourd travail des partenaires sociaux, mais évaluer également dans quelle mesure la capacité à conclure de futurs accords peut être affectée par un écart trop important entre la loi et l'ANI.
La proposition n° 35 de votre rapport préconise de donner la priorité aux accords collectifs d'entreprise, dits alors « accords ACTES », lorsqu'ils sont relatifs aux quatre sujets prioritaires que vous identifiez. Ils pourraient ainsi traiter de la durée légale du travail, soulevant la question de la majoration des heures supplémentaires, ou encore du contrat de travail ou des salaires. Mais le Gouvernement a écarté ces questions. Auriez-vous d'autres sujets en tête ? Je crois qu'une négociation sur la durée maximale du travail se heurterait par exemple aux normes internationales. Quels sont les points sur lesquels une évolution permettrait de développer l'activité des entreprises tout en protégeant mieux les salariés ?
Dans la proposition n° 42, vous prônez l'institution d'une règle faisant prévaloir, dans l'intérêt général et l'intérêt collectif des salariés, les accords collectifs préservant l'emploi sur les contrats de travail. Pensez-vous seulement aux accords collectifs de réduction du temps de travail ou aux accords de maintien dans l'emploi ? Envisageriez-vous que cette règle puisse être inscrite dans le code du travail comme un principe général ?
Vous avez évoqué la réécriture du code du travail, à repeigner en fonction d'un partage entre règles d'ordre public et règles subsidiaires, par l'adoption d'une « loi balai ». Souscrivez-vous aux thèses défendues par Antoine Lyon-Caen et Robert Badinter dans leur ouvrage Le Travail et la loi ? Comment les comprenez-vous d'ailleurs ? S'agit-il de ne retenir que cinquante principes fondamentaux et de laisser tout le reste comme matière à la négociation collective ? Ou bien le code du travail ne contiendrait-il que cinquante articles, mais les accords et la jurisprudence en vigueur resteraient valables pour fixer les autres règles du droit du travail ?
Votre rapport n'évoque pas les sujets relevant du pouvoir de direction. Mais le plan de formation ne pourrait-il par exemple faire l'objet d'une négociation collective ?
Notre mission souhaite formuler un jugement sur les conséquences que les nouvelles formes de travail auront sur le paritarisme et la négociation sociale. Comment mesurez-vous l'ampleur de ces mutations du travail, notamment l'« ubérisation » de l'économie ? Sans qu'il y ait parfois de dépendance salariale, une subordination économique existe. Pensez-vous qu'il faille développer un nouveau statut de l'auto-entrepreneur ou que tout le monde puisse être soit salarié, soit chef d'entreprise ?
Enfin ne faudrait-il pas que le compte personnel d'activité relève d'un paritarisme de gestion, comme l'assurance-chômage, voire d'un système tripartite ou quadripartite ? Ou faut-il conserver les différents types de gestion qui sont en vigueur aujourd'hui ?