Intervention de Jean-Pierre Dufau

Séance en hémicycle du 26 novembre 2015 à 15h00
Mobilisation collective en faveur de l'aide au développement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Dufau :

Monsieur Pancher, je connais votre engagement et votre intérêt pour les crédits de l’aide publique au développement. Qu’il n’y ait donc aucune équivoque entre nous !

Permettez-moi cependant, en guise d’introduction, de vous dire que votre proposition de résolution m’a à la fois étonné et ravi. Je vais vous exposer les raisons de mon étonnement, celles de mon ravissement, et je conclurai par quelques réflexions personnelles.

Commençons par mon étonnement. La Conférence de Paris, la COP21, est manifestement une aubaine que les hasards des calendriers vous ont opportunément fournie. Cet étonnement est donc la reconnaissance d’un talent certain qui vous caractérise, celui de l’opportunité – je n’ai pas dit de l’opportunisme.

Je suis tout aussi étonné de constater que, tant dans l’exposé des motifs que dans les considérants de votre proposition de résolution, vous vous bornez à reprendre des constats, des thèmes, des souhaits dont la généralité le dispute parfois à la banalité pour ceux qui s’intéressent à ces questions. Mais c’est vrai que tout cela se révèle très « tendance », comme le souligne votre proposition de résolution « tendant à amplifier la mobilisation ».

Pour ne pas être trop long, je citerai deux passages de l’exposé des motifs. « Dix-huit ans après l’adoption du Protocole de Kyoto – seul instrument juridiquement contraignant à ce jour – il est indispensable de réunir la communauté internationale autour d’un accord ambitieux, qui concernera aussi bien les pays développés que les pays émergents », écrivez-vous. Un peu plus loin, vous observez que « Relever ce défi historique passera nécessairement par une relation équilibrée, de confiance et de solidarité entre les pays du Nord et les pays du Sud, leur partenariat étant la pierre angulaire de la mobilisation internationale en faveur du climat. »

Qui peut contester ces belles et nobles ambitions ? À vrai dire, je cherche en vain, à ce stade, la valeur ajoutée de cet exposé des motifs. Je ne l’ai pas trouvée, d’où mon étonnement.

Pour en terminer avec ce premier point, j’en viens aux considérants. Vous soulignez par exemple, avec une pertinence que je partage, l’importance du Fonds vert pour le climat ; mais il existe déjà et doit être abondé, avec ou sans votre résolution. On peut noter que la Grande muraille verte partant du Sénégal et longeant les zones sahéliennes d’Ouest en Est pour lutter contre l’extension des déserts est un projet intéressant et concret à soutenir. Vous n’en parlez pas.

Je m’étonne enfin que bon nombre de vos considérants soient issus de la loi sur le développement et la solidarité internationale, dont j’étais le rapporteur, que nous avons votée à l’unanimité en 2014. Ils y sont largement développés, notamment dans le document annexé à la loi, ce qui lui donne un poids sans commune mesure avec la résolution dont nous débattons. Souvent, la résolution précède la loi ; ici, elle la suit. C’est la loi qui contient des avancées significatives, par exemple lorsqu’elle met en exergue la « coopération décentralisée » dont cette proposition de résolution fait aussi l’éloge, et qui a donné un nouveau souffle aux crédits de l’aide publique au développement. Vous me direz que l’art de la pédagogie est celui de la répétition. En ce sens, vous faites preuve de pédagogie.

J’en viens à mon ravissement. Alors que depuis quarante-cinq ans, l’engagement de nombreux pays – dont la France – n’a pas atteint les 0,7 % du revenu national brut, objectif fixé par les États membres de l’ONU, l’article unique de votre proposition de résolution fixe à 1 % pour 2030 le montant de l’aide publique au développement. Quelle audace ! Pourquoi vous limiter à 1 % ? Je suis impressionné, impressionné et ravi. Vous me direz que cela ne mange pas de pain et que cela donne un cap. Je suis ravi que vous partagiez avec moi, et avec mon groupe, cette volonté de faire bouger les choses. Vous soulignez justement depuis de trop nombreuses années la baisse constante des crédits de l’APD, tous gouvernements confondus. Comment ne pas être ravi que ce triste constat soit partagé sur tous les bancs de l’Assemblée ?

Avez-vous oublié que cette année, en commission des finances d’abord, puis dans l’hémicycle, un constat a été fait, à l’origine par les députés SRC, et partagé par une large majorité ? Nous avons commencé – insuffisamment – à faire bouger les lignes. Le projet de budget pour 2016 prévoyait une réduction de l’APD d’environ 170 millions d’euros. Les députés SRC ont convaincu le Gouvernement que ce n’était pas acceptable. L’impulsion du Président de la République dans ses déclarations récentes, auxquelles vous avez fait allusion, et l’arbitrage du Premier ministre ont permis au Gouvernement d’annuler cette baisse en rétablissant 150 millions d’euros de crédits par deux amendements, que nous avons bien évidemment tous votés.

Les députés SRC ont persisté…

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