Je tiens avant tout à m’associer à tous les orateurs qui sont intervenus avant moi pour féliciter tous les signataires de ce texte, en particulier Philippe Gomes, pour le travail qu’ils ont accompli.
Le coût élevé de la vie dans les outre-mer, que nous appelons souvent entre nous « la vie chère », est une réalité bien connue mais qui nécessite de notre part une vigilance constante.
Si la problématique est partagée par la totalité des outre-mer, la Nouvelle-Calédonie représente un cas d’espèce puisque les prix élevés sont tout particulièrement dus à de nombreux obstacles qui se dressent face à la libre concurrence, ce qu’a confirmé officiellement en 2012 un rapport de l’Autorité de la concurrence.
Ainsi, et cela a été rappelé dans les interventions précédentes, lorsque le législateur, en 2013, a introduit au sein de la loi statutaire de 1999 la faculté pour la Nouvelle-Calédonie de créer des autorités administratives indépendantes, cette faculté visait précisément la mise en place d’une autorité spécifique et locale de la concurrence.
L’option d’une autorité administrative indépendante, parce que cette autorité devait être dotée de pouvoirs décisionnels, imposait de modifier les dispositions organiques formant le statut de la Nouvelle-Calédonie. C’est d’ailleurs ce qui avait été fait pour la Polynésie française en 2011.
En effet, si aucun obstacle constitutionnel n’existe à la création, par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie, d’autorités administratives indépendantes dans les domaines relevant de sa compétence, l’exercice par toute autorité d’un pouvoir de réglementation, de sanction ou de transaction appelait une modification de la loi organique.
Cette modification seule pouvait permettre au Congrès de créer un organe exerçant des compétences normalement dévolues au gouvernement local.
Le Parlement national a choisi d’ouvrir cette voie par un vote unanime de l’article 1er de la loi organique du 15 novembre 2013 portant actualisation du statut de la Nouvelle-Calédonie.
Au cours de la discussion parlementaire, le Parlement s’est attaché à fixer les conditions de l’indépendance et de l’impartialité des membres appelés à siéger au sein de cette autorité locale de la concurrence.
Il a été inscrit le principe de l’irrévocabilité des membres de cette autorité et prévu leur nomination après un avis adopté à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés du Congrès.
Parallèlement, les membres de cette autorité ont été soumis à un régime d’incompatibilité stricte, qui, jusqu’à ce jour, rend la fonction incompatible avec tout mandat électif, tout autre emploi public et toute détention, directe ou indirecte, d’intérêts dans une entreprise du secteur dont ladite autorité assure la régulation.
Suite à cette loi nationale, la Nouvelle-Calédonie a fait tout ce qu’il convenait de faire.
La loi du pays du 24 avril 2014 a ainsi marqué une nouvelle étape en créant une autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie, dotée d’un statut d’autorité administrative indépendante et comprenant un président et trois autres membres – dont un vice-président – nommés pour une durée de cinq ans. Le président exerce ses fonctions à plein temps, tandis les autres membres sont « non permanents ».
Au final, l’ensemble des textes législatifs et réglementaires ont été pris par les autorités locales et nationales pour mettre en place la Haute autorité. Pourtant, à ce jour, cette instance n’a pas pu être installée.
En effet, le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, autorité de nomination, a fait connaître ses difficultés à recruter des membres en raison des incompatibilités assez drastiques prévues par le législateur organique.
Pourtant, force est de reconnaître que la situation avait été plus ou moins pressentie et exposée en séance publique par le député UDI aujourd’hui rapporteur du texte, Philippe Gomes, qui avait rappelé, je cite, que « si cette incompatibilité ne soulève pas de difficultés s’agissant du président et du rapporteur qui exercent ces fonctions à temps plein, il n’en va pas de même pour les autres membres ».
C’est la raison pour laquelle il a déposé cette proposition de loi organique, cosignée par vingt députés du groupe Les Républicains, dont je fais d’ailleurs partie. De son côté, la sénatrice socialiste Catherine Tasca a fait de même, avec un texte initialement légèrement différent.
Toutefois, après l’adoption d’amendements identiques dans les commissions des lois des deux chambres, on a abouti finalement à un consensus.
Ce texte propose de modifier l’article 27-1 de la loi organique statutaire du 19 mars 1999 afin de limiter l’incompatibilité applicable aux membres d’une autorité administrative indépendante.
L’amendement du rapporteur, adopté en commission des lois, qui vise à prendre en compte les observations du Congrès de Nouvelle-Calédonie, permettra non seulement une adoption unanime mais, cette fois, une application effective du dispositif. De quoi s’agit-il ?
Tout d’abord, de définir des régimes d’incompatibilité professionnelle différents selon qu’on envisage le président de l’autorité administrative indépendante ou bien les autres membres de ces autorités.
La loi du pays, je l’ai rappelé tout à l’heure, a en effet placé le président de l’Autorité de la concurrence dans un régime spécifique puisqu’il est tenu d’exercer ses fonctions à temps plein et peut prendre certaines décisions seul.
Il n’est donc pas illogique, au contraire, que les incompatibilités professionnelles opposables au président soient plus étendues que celles opposables aux autres membres.
Ainsi, l’article unique de la proposition de loi interdit désormais au président d’exercer tout autre emploi public en Nouvelle-Calédonie, tandis que les autres membres de l’autorité pourront exercer parallèlement un emploi public, à condition toutefois qu’il ne relève pas de la Nouvelle-Calédonie, des provinces, des communes ou de leurs établissements publics.
Cette disposition permettra à ces autres membres d’exercer dans une juridiction ou, par exemple, à l’université.
Par ailleurs, et c’est encore une demande du Congrès de Nouvelle-Calédonie, le texte instaure un délai de carence de trois ans, empêchant que soit nommée une personne qui, au cours des trois années précédant sa désignation, aurait exercé les mandats ou fonctions, ou détenu des intérêts compris dans le champ des incompatibilités. Un meilleur équilibre général a sans nul doute été trouvé.
En conclusion, vous l’aurez compris, le groupe Les Républicains votera sans réserve cette proposition de loi organique qu’il souhaite voir aboutir au plus vite, dans l’intérêt de nos compatriotes calédoniens.