La création de l’ordre national des infirmiers – ONI – par la loi du 21 décembre 2006 avait suscité de très vives réactions de la part d’une grande majorité de ces professionnels, notamment des infirmiers salariés, qui représentent plus de 80 % de la profession.
Parmi les quelque 600 000 professionnels recensés – le chiffre est difficile à évaluer précisément –, environ 177 000 personnes sont inscrites à l’ordre, sans être nécessairement adhérentes, à jour de leur cotisation. Parfois, en effet, les établissements de santé effectuent ces inscriptions sous la contrainte, voire automatiquement.
Les différentes auditions que j’ai menées avec les rapporteurs ont montré que l’ordre national des infirmiers ne fait toujours pas consensus, qu’il n’est pas représentatif de la profession et qu’il continue à créer des tensions au sein d’une profession qui aurait besoin de se rassembler.
Les professionnels ont longtemps avancé des arguments liés à la gestion de l’ordre, car de réels problèmes se sont posés. Un défaut de représentativité comme de transparence reste en outre souligné. L’ordre se heurte ainsi à un constat d’échec s’agissant des différentes missions qui lui ont été confiées.
Cet amendement a donc pour objet d’apaiser les conflits au sein d’une profession divisée, qui oppose un refus de principe. Lors des auditions, nous avons ainsi pu écouter des positions bien tranchées, qui n’étaient pas conciliables : certains infirmiers sont favorables à l’ordre quand d’autres y sont entièrement opposés.
Il devient urgent de clarifier la situation juridique de ces infirmiers, qui est extrêmement précaire puisque 80 % d’entre eux ne sont pas inscrits à l’ordre, une inscription pourtant obligatoire. Ces personnes tombent donc sous le coup d’un exercice illégal de leur profession. Le risque élevé de contentieux qui en résulte est préjudiciable aux infirmiers comme aux patients.
Les missions dévolues à l’ordre national des infirmiers, qui mobilisent un budget important, pourraient être confiées à des instances existantes, comme c’est déjà le cas pour celles qui sont exercées en doublon avec d’autres structures, telles que la Haute autorité de santé – HAS –, le Haut conseil des professions paramédicales ou les ARS. La suppression de l’ordre suppose d’apporter des précisions réglementaires s’agissant du partage des compétences de chaque organisme. Nous pouvons cependant trouver des solutions, y compris pour clarifier la situation des salariés dans l’ordre.
La garantie des bonnes pratiques peut ainsi être assurée par la Haute autorité de santé ou par le Haut conseil des professions paramédicales, organismes qui émettent déjà un avis sur cette question. Quant à la régulation de la profession ou le recensement et le suivi démographique, ils sont assurés aujourd’hui par les ARS, en lien avec le fichier ADELI ou le répertoire partagé des professionnels de santé.
Des solutions existent donc. Cet amendement résout d’abord le problème de l’obligation d’inscription, donc le risque élevé de contentieux que les infirmiers et infirmières qui refusent d’adhérer à l’ordre encourent. En tant que législateur, nous devons prendre ce sujet en considération et lui trouver une solution ; j’ignore en effet comment l’on pourra contraindre 80 % des infirmiers à adhérer contre leur gré.
Ma proposition ne remet pas du tout en cause la liberté d’association et le souhait de certains infirmiers de se regrouper pour défendre leur profession. Elle permet également à l’Ordre national des infirmiers, non plus de contraindre, mais de convaincre les infirmiers d’adhérer, si tel est leur choix. Cela lui impose de faire la preuve de son action et de sa capacité à rassembler. Ma proposition concilie donc les différents points de vue, tout en réglant le problème juridique.