Je vous prie de m’excuser d’intervenir sur un amendement aussi technique à cette heure aussi tardive, mais j’ai été profondément interloqué par l’amendement no 738 .
Cet amendement modifie le texte adopté par le Sénat et risque de poser d’importantes difficultés pour la recherche clinique en France. Je m’en explique.
Il est précisé dans l’exposé sommaire que l’habilitation, qui a été supprimée par la commission des affaires sociales du Sénat, n’a pas pour objet d’opérer une refonte globale du droit applicable aux recherches biomédicales. Pourtant, nous savons tous qu’il faudra très prochainement procéder à cette refonte. Les modifications que vous introduisez par voie d’amendement, madame la ministre, ne seront donc que très temporaires.
Vous expliquez ensuite qu’il faut tenir compte de l’évolution du droit communautaire. Or cette évolution est précisément en cours : deux règlements européens sur les dispositifs médicaux et contenant des dispositions relatives à l’évaluation clinique de ses produits devraient être adoptés début 2016. Il nous faudra donc alors adapter à nouveau notre législation : début 2016, c’est dans un mois ! Cet amendement me paraît prématuré et inutile.
Quant aux dispositions de la loi dite « CNIL », je m’interroge, car cette loi n’existe pas ; il y a soit la Commission nationale de l’informatique et des libertés, soit la loi « Informatique et libertés ». Je pense par conséquent qu’il doit s’agir d’une erreur de rédaction de l’exposé sommaire.
Concernant les grands acquis de la loi Jardé, il s’avère que ceux-ci sont contraires à la réglementation européenne, qui n’accepte pas la création d’un régime juridique spécifique pour les études non interventionnelles de médicaments à visage humain. Cette incohérence de notre législation exige une réforme de notre droit.
Quant à un règlement européen applicable en 2016, il semble que l’entrée en application du règlement européen relatif aux essais cliniques de médicaments à usage humain ne sera pas applicable avant fin 2017, voire début 2018.
Il n’y a donc aucune urgence à prendre une ordonnance au cours de l’année 2016 ; cet amendement paraît même totalement prématuré au regard de la recherche clinique en France.
Enfin, pour que ce qui concerne l’argument concernant l’attente du règlement européen, je signale que ce dernier a été publié le 27 mai 2014 au Journal officiel de l’Union européenne, ce qui laissait au Gouvernement largement le temps pour publier les décrets de la loi Jardé. Seulement, comme cette dernière est contraire au règlement européen, il paraît nécessaire de refondre la législation française et, si possible, de la simplifier.
J’ajoute que la rédaction de l’exposé sommaire me paraît d’une extraordinaire légèreté, puisqu’elle est inachevée : l’argumentaire s’arrête au beau milieu d’une phrase. Est-ce un oubli ou un copier-coller malencontreux ?
En tout état de cause, il y a lieu, de mon point de vue, de s’en tenir à la rédaction du Sénat.