Intervention de Sergio Coronado

Réunion du 25 novembre 2015 à 10h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSergio Coronado :

Il ne fait de doute aux yeux de personne dans cette salle que les massacres perpétrés par la Turquie contre les Arméniens s'inscrivent dans l'histoire des génocides. Mais là n'est pas la question : elle est de savoir si, au fond, nous avons raison d'ajouter un texte supplémentaire à la liste des lois mémorielles et si, d'autre part, ce texte est solidement rédigé et franchira l'obstacle du Conseil constitutionnel – ce qui n'avait pas été le cas de votre texte précédent, madame la rapporteure.

Le débat sur la reconnaissance du génocide arménien a commencé, je le rappelle, entre 1997 et 2002. Le premier texte a été d'origine parlementaire : il a été voté à l'initiative d'André Aschieri, député des Alpes-Maritimes – je note d'ailleurs la sensibilité particulière des élus de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur sur cette question.

La rédaction que vous avez retenue, madame la rapporteure, contient encore un certain nombre d'éléments susceptibles d'être censurés par le Conseil constitutionnel. J'en mentionnerai quelques-uns. Ainsi, vous allez très loin en prévoyant la pénalisation non seulement de la stricte négation des crimes visés, mais aussi de leur « banalisation », de leur « minimisation grossière » et de la « tentative de les justifier ». Or vous n'apportez à aucun moment de définition précise de ce que vous entendez par là. Vous multipliez les termes flous : « allégations faisant appel à l'ignorance d'opinions rencontrant l'adhésion de personnes assez qualifiées ou éclairées », « dénaturation des indices recueillis » ou encore « absence de tentative loyale de réfutation des avis des experts ». J'ignore ce que cela signifie en termes juridiques et ce que pourrait en déduire un juge.

Certes, nous sommes persuadés que le massacre des Arméniens constitue un génocide, mais cette question fait l'objet de débats scientifiques entre historiens, et tout texte qui vient entraver ces débats me paraît inapproprié. L'avis des écologistes a évolué depuis 1997, car nous avons constaté les effets parfois contre-productifs de ces textes. Pour ma part, je ne voterai pas votre proposition de loi, madame la rapporteure. Vous faites preuve selon moi de bonne volonté, mais la rédaction que vous proposez n'est pas suffisamment solide et, surtout, les lois mémorielles présentent un danger pour le débat historique, lequel n'a pas vocation à être tranché, à mon sens, par une assemblée parlementaire.

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