Monsieur le ministre, je ne regrette pas d'être restée un jeudi matin à l'Assemblée nationale pour entendre les bonnes nouvelles que vous nous annoncez. J'allais partir un peu triste et désabusée, peut-être un peu pessimiste. En fait, mon voyage de retour sera placé sous le signe de l'optimisme : notre commission va regarder la situation sous un nouvel éclairage. Trêve de plaisanterie. Il va falloir faire vivre ces indicateurs dans la population, selon Monique Rabin. Devons-nous expliquer à nos concitoyens que les indicateurs et les paramètres évoluent en fonction des crises ? J'ai un peu l'impression qu'il s'agit de changer les règles du jeu en cours de match afin d'obtenir le score voulu. Voilà ce que je ressens à ce stade de nos débats et je vais illustrer mon propos en revenant sur le taux d'emploi et le taux d'endettement.
Pour notre pays, il paraît plus flatteur de retenir le taux d'emploi que le taux de chômage, et de le comparer avec le taux d'emploi moyen de la zone euro : le taux d'emploi est de 64,3 % en France contre 63,9 % dans la zone euro. Pour ma part, j'aurais aimé avoir d'autres références que les pays où le taux de chômage est encore plus élevé que chez nous. Retenez le taux d'emploi de pays comme l'Allemagne ou la Grande-Bretagne, par exemple, parce qu'il est important de se situer. À la rubrique « Quelle est l'action du Gouvernement au regard de cet indicateur ? », on trouve une liste relativement importante. Vous citez notamment la future réforme sur la place du dialogue social dans l'élaboration du droit du travail, qui peut contribuer à améliorer le taux d'emploi en France. Vous citez aussi la prime d'activité, qui sera créée l'année prochaine et dont nous ne connaissons pas encore toutes les modalités. Vous insistez surtout sur les 250 000 emplois d'avenir créés à ce jour, et dont le nombre devrait atteindre 320 000 à la fin de 2016. Certes ce sont des emplois, mais ils sont précaires. Il suffit pour s'en convaincre de rencontrer les jeunes qui les occupent.
Venons-en au taux d'endettement. Lors du Congrès réuni à Versailles, quand nous avons entendu le Président de la République nous dire que le pacte de sécurité l'emportait sur le pacte de stabilité, nous avons bien compris que la France ne respecterait pas les objectifs assignés en matière d'endettement. Pourtant, s'agissant de l'action du Gouvernement au regard de l'indicateur d'endettement, vous rappelez qu'il est « impérieux d'endiguer la dynamique de la dette publique ». C'est parfait mais je n'en mesure pas les effets à ce jour. De manière récurrente, de projet de loi de finances en projet de loi de finances rectificative, vous rappelez cet objectif. Dès lundi, vous nous répéterez probablement dans l'hémicycle que vous avez une maîtrise accrue des dépenses. Or, au vu du projet de loi de finances rectificative pour 2015, seules les dépenses des collectivités territoriales régressent réellement en volume et en valeur, le reflux ne concernant absolument pas les dépenses de l'État. À un moment donné, il faudra faire preuve d'un peu de sérieux. Il ne nous suffit pas de vous entendre répéter que tout va bien et que vous veillez sur tout pour être convaincus que notre pays va sortir des difficultés dans lesquelles vous l'avez plongé.