Intervention de Martine Martinel

Réunion du 23 octobre 2014 à 21h00
Commission élargie : finances - affaires culturelles - affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartine Martinel, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l'éducation pour l'audiovisuel et les avances à l'audiovisuel public :

Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur l'avenir de l'offre numérique du service public audiovisuel. J'ai consacré, cette année, la partie thématique de mon avis à Radio France, ce qui m'a permis de constater que le groupe public n'a amorcé que tardivement son virage numérique à compter de 2012, et que les résultats demeurent contrastés. De manière générale, l'audiovisuel public ne fait encore pas suffisamment figure de réfèrent dans l'univers numérique.

Il est urgent de mieux articuler les offres numériques de l'ensemble des opérateurs. L'idée de définir en commun les offres numériques des différentes sociétés de l'audiovisuel public – France Télévisions, Radio France, Arte, France Médias Monde et l'Institut national de l'audiovisuel (INA) –, qui se développent actuellement sans aucune coordination ni complémentarité, a été reprise par le Président de la République à l'occasion des cinquante ans de la Maison de la radio. Votre prédécesseur avait également plaidé pour la création de « synergies » entre les plateformes numériques des opérateurs de l'audiovisuel public.

Cette proposition est parfois caricaturée par ses détracteurs qui la présentent comme la première étape d'une fusion de l'ensemble des sociétés, et donc d'un retour à l'Office de radiodiffusion et télévision française (ORTF). Elle se fonde pourtant sur le constat que, dans l'univers numérique, marqué par la convergence des contenus – les sites de radio proposent du texte et des contenus vidéo, tout comme les sites de télévision –, on ne peut plus raisonner par type de média. C'est la stratégie retenue avec succès par les groupes audiovisuels publics dans de nombreux pays européens, comme la BBC en Grande-Bretagne ou la RTBF en Belgique.

Il s'agirait d'une véritable révolution culturelle dans un paysage audiovisuel public particulièrement cloisonné dans lequel le dialogue entre les sociétés est souvent difficile voire inexistant, et les relations davantage marquées par la concurrence que par la recherche de complémentarités. Comme l'a rappelé Mme Véronique Cayla, présidente d'Arte, que j'ai auditionnée le mois dernier, l'idée même de créer des renvois entre les sites des uns et des autres ou de faire des promotions croisées n'a jamais pu être menée à bien...

Il me semble donc que nous devons impérativement lancer ce chantier à la faveur de la négociation des nouveaux contrats d'objectifs et de moyens (COM) de l'ensemble des sociétés de l'audiovisuel public d'ici à 2016. Dans un contexte budgétaire contraint, il s'agit également d'un moyen d'éviter d'éventuelles « pertes en ligne » et de rendre le service public audiovisuel numérique plus efficace à moindre coût. Un tel chantier implique évidemment une impulsion décisive de la tutelle. Madame la ministre, quelle est votre position sur ce sujet ?

Notre commission a par ailleurs eu l'occasion, lors de l'audition du nouveau président de Radio France, M. Mathieu Gallet, le 18 juin dernier, d'exprimer sa vive inquiétude à l'égard de l'une des propositions de son projet stratégique, consistant à rendre les podcasts payants, après une première période limitée d'accès gratuit. De nombreux collègues ont estimé que cette proposition était en total décalage avec les principes du financement du service public audiovisuel. Elle me semble en effet de nature à fragiliser à la fois l'acceptation de la redevance et les fondements mêmes de la notion de service public audiovisuel à l'ère numérique. Pouvez-vous dire ce que vous en pensez ?

Je m'interroge également sur l'avenir du Mouv'. Pour cette station, le COM 2010-2014 devait être celui de la dernière chance. Alors que la radio a échoué à trouver son public, le nouveau président annonce une relance fondée sur une nouvelle ligne éditoriale en cours de définition. Il s'agirait de faire du Mouv' la radio des cultures urbaines, notion qui n'a pas été clarifiée lors des auditions. J'ai déjà eu l'occasion de dénoncer le caractère de chaîne « alibi » ou de chaîne « ghetto » de France Ô. Je pense que le rajeunissement et la diversification de l'audience doivent irriguer l'ensemble des antennes et surtout constituer un axe majeur de la stratégie numérique. Dans la mesure où la contrainte budgétaire oblige par ailleurs à opérer des choix, je m'interroge sur le maintien de cette chaîne, dont le coût s'élève à 20 millions d'euros par an. Si le choix est néanmoins fait de la conserver, il conviendra de bien clarifier son identité de service public par rapport à l'offre privée existante. Madame la ministre, quelle est votre position sur l'avenir de cette radio ?

Je conclus en formulant un avis favorable sur les crédits en faveur de l'audiovisuel public dans le présent projet de loi de finances.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion