Intervention de Isabelle Attard

Réunion du 23 octobre 2014 à 21h00
Commission élargie : finances - affaires culturelles - affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaIsabelle Attard :

La stabilisation du budget de la HADOPI équivaut à une asphyxie financière. L'an dernier, cette autorité administrative indépendante a fonctionné sur ses réserves, aujourd'hui épuisées. Pouvez-vous clarifier votre position à son sujet ? En janvier 2012, vous avez envoyé un tweet ainsi rédigé : « HADOPI remplacée : on efface tout, on réfléchit, on défend les créateurs, on arrête de charger les internautes. » Ou bien vous avez changé d'avis et, dans ce cas, expliquez-nous en quoi une institution que vous vouliez supprimer en 2012 est devenue soudain indispensable. Ou bien votre souhait n'a pas varié, et votre prochaine loi sur la création sera un bon véhicule pour supprimer la riposte graduée. Des études montrent que celle-ci n'a eu d'autre effet que d'éloigner les internautes des logiciels de partage de pair à pair. Le partage culturel ne cesse de progresser. Seuls les outils ont changé, et les plus récents profitent aux réseaux maffieux.

Récemment, vous avez projeté d'établir une liste administrative de sites contrefaisants. Que dirait-on si, usant du même procédé envers les magasins, la direction de la répression des fraudes publiait une liste de commerces jugés contrefaisants, en faisant l'économie d'une procédure contradictoire devant la justice ? Il existe d'autres solutions pour agir. La plus rapide et la plus économique pour assécher le financement des sites d'hébergement qui gagnent de l'argent sans le redistribuer aux auteurs est de cesser la chasse aux partageurs.

C'est en effet la mission la plus coûteuse de la HADOPI, alors que les deux autres, à commencer par le développement de l'offre légale, sont loin d'être inutiles. Si les majors prétendent que cette offre est suffisante en France, les faits sont têtus. Orange propose d'accéder en version sous-titrée à la série la plus regardée au monde, Game of Thrones, dès le lendemain de sa diffusion aux États-Unis. L'offre serait alléchante, s'il ne fallait pour y accéder souscrire à Orange Ciné Séries, qui est en fait un catalogue. Ne s'agit-il pas d'une forme déguisée de vente liée obligatoire, pratique interdite dans notre pays ?

Il faut repenser les droits, libertés et devoirs des internautes, qu'il appartient à l'État de faire respecter. Au XXIe siècle, la copie est non un problème, mais un fait. Nous devons trouver des sources de financement pour tous les créateurs et éviter que des intermédiaires ne s'arrogent, en prédateurs, une part déraisonnable de l'argent généré par la création.

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