Je peux partager l'idée de transmettre des informations à la direction de la SNCF ou de la RATP sur un certain nombre d'individus occupant des postes clés. Mais je suis en désaccord, pour plusieurs raisons, avec cet amendement tel qu'il est proposé.
D'abord, il y a une méconnaissance de ce qu'est la fiche S. Tous ceux qui sont fichés ne savent pas qu'ils sont surveillés : c'est un outil qui a pour objectif de donner du renseignement lors de contrôles d'identité. Il n'y a pas de numérotation, de critères sur la dangerosité des individus. La numérotation dans les fiches S concerne ce qui est demandé lors des contrôles d'identité, non la dangerosité des individus. Les services de renseignement sont totalement hostiles à la transmission d'informations sur les individus qu'ils surveillent, que ce soit à des entreprises publiques ou à des collectivités territoriales.
Ensuite, votre amendement est un cavalier puisque vous parlez d'employeurs publics ainsi que d'employeurs de secteurs dits « sensibles », sans faire aucunement référence au secteur des transports publics. C'est une difficulté en la matière puisque n'importe quel employeur public, et ils sont nombreux, pourrait être concerné, même si vous renvoyez cela à un décret en Conseil d'État. Le champ est trop large. Car, même si cela ne concernait que la SNCF et la RATP, le groupe SNCF compte 250 000 personnes. La SNCF à elle seule compte 150 000 agents et la RATP 60 000. Ce sont donc plus de 200 000 personnes qu'il faudrait habiliter… Cela n'est pas envisageable : on imagine la charge de travail qui pourrait revenir au ministère de l'intérieur. Et surtout, on ne peut pas traiter de la même manière un guichetier qui vend des billets de train ou de métro et un conducteur de TGV.
Cela étant, monsieur Gérald Darmanin, je partage votre point de vue. Un amendement de la commission des lois prévoit le criblage d'un certain nombre d'individus sur des postes sensibles. Vous avez raison pour ce qui est d'un conducteur de TGV ou d'un aiguilleur, mais il ne faut pas ratisser trop large. Il est impossible de donner une habilitation à 300 000 personnes. Il est nécessaire d'effectuer un criblage. Le rapporteur l'a évoqué, un travail commun est fait en la matière avec le ministère de l'Intérieur pour trouver la bonne formulation et le bon filet d'ici à la séance publique.
Si nous ratissons trop large, demain, il faudra demander l'habilitation des personnes qui remplissent les pots de confitures dans l'agroalimentaire, dans la mesure où l'on peut y introduire des substances toxiques… (Murmures)
Il faut opérer un ciblage, comme le prévoit un amendement que je défendrai tout à l'heure.