Intervention de Sylvie Tolmont

Séance en hémicycle du 9 décembre 2015 à 15h00
Expérimentation territoriale visant à faire disparaître le chômage de longue durée — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSylvie Tolmont :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, mes chers collègues, le chômage de longue durée est un drame d’une profonde gravité, dont les répercussions sont insidieuses et néfastes pour l’ensemble de la société. Il est un adversaire redoutable pour l’émancipation individuelle ; un frein pour le développement économique ; un contradicteur de taille eu égard aux volontés d’épanouissement d’un peuple.

La proposition de loi que nous examinons, dont l’innovation sociale et la dimension humaine sont absolument remarquables, porte la haute ambition de combattre ce fléau. Au sein du groupe socialiste, nous sommes particulièrement fiers de mener cette bataille, dont les motivations sont l’expression des valeurs fondamentales de la gauche.

Ce texte s’inscrit dans une démarche globale, repose sur des bases de réflexion solides et vise un objectif fort mais réaliste, celui de lutter contre la privation durable d’emploi. À ce titre, je veux saluer la méthode de travail collaborative, impulsée par notre rapporteur, Laurent Grandguillaume, privilégiant l’échange et la rencontre des idées entre le législateur et les associations partenaires, parmi lesquelles figurent la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale, la FNARS, Emmaüs, Caritas et ATD Quart Monde, qui est à l’initiative de ce projet.

Touchant près de 2,5 millions de citoyens, le chômage de longue durée ne cesse de progresser depuis 2008. S’il est source de précarité sur le plan social, il est, d’un point de vue économique, un fardeau pour la vitalité de nos entreprises et pour les vertus positives que la valeur travail transmet à toutes les générations. D’un point de vue humain, le statut de chômeur de longue durée porte atteinte à la valorisation de soi et à l’affirmation de la confiance.

Cette conception de la condition humaine n’est pas tolérable dans notre société, où l’épanouissement de l’individu, son élévation sociale et intellectuelle par le travail, la volonté de se sentir utile à la communauté et de contribuer, notamment à travers sa fonction professionnelle, à son développement, sont encore des valeurs qui ont du sens et qui forgent l’identité de notre nation. Enfin, il ne s’agit pas seulement d’agir au service de l’émancipation des individus : la lutte contre le chômage de longue durée est un véritable projet de société auquel sont associés des enjeux économiques forts.

Il m’apparaît impossible de considérer que tout a déjà été tenté. Il est certain que le Gouvernement a déjà engagé de grandes réformes pour remédier à ce problème – je pense notamment aux contrats de génération, aux emplois d’avenir et aux dispositifs créés dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité.

La présente proposition de loi, de manière concrète, présente de nombreux atouts et répond à de multiples enjeux.

À l’échelle locale, elle permet une mise en synergie des territoires, elle appelle chacun d’eux à développer son sens de l’innovation, à déployer son énergie fédératrice pour bâtir un projet constructif avec tous les acteurs locaux. D’ailleurs, la lutte contre le chômage de longue durée ne peut s’ancrer de manière concrète dans notre réalité qu’avec la volonté de tous les acteurs, de tous les élus d’un territoire, par-delà les clivages politiques.

Le rassemblement de ces acteurs au sein des comités locaux, pilotés par le fonds d’expérimentation, renforcera la cohérence de ce dispositif. Plus encore, là où le cadre national ralentit parfois l’application locale, ici, il encourage et stimule l’appropriation du dispositif par les territoires. En cela, cette démarche est particulièrement enrichissante.

L’innovation est une composante essentielle de ce projet. Expérimentée sur dix territoires, privilégiant la progression par étapes, affichant le souhait de s’appuyer sur l’existant, cette proposition de loi est tout à fait inventive. Son approche pour la mettre en oeuvre permet une analyse inédite, une prise de recul et une capacité à dresser les bilans sans précédent.

La valeur qui a animé la définition de ce dispositif et qui constitue sa raison d’être doit être rappelée : il s’agit de la confiance – celle avec laquelle les personnes au chômage doivent renouer, qui doit raviver leur espoir en l’avenir, remettre les demandeurs d’emploi sur le chemin de la réinsertion, les entourer dans la reconstitution d’un réseau, social et professionnel, celle aussi envoyée comme un message de soutien aux employeurs qui doivent concourir à faire disparaître la rupture entre notre société et le marché du travail.

Enfin, il convient de souligner que le dispositif sera financé à budget constant, par réallocation des moyens de la solidarité nationale. Les CDI créés donneront naissance à de nouvelles richesses, permettant l’émergence de services non concurrentiels du secteur marchand existant.

Au regard de la cohérence et de la pertinence de ce dispositif, je formule le souhait de voir cette expérimentation s’étendre à des territoires urbains, les territoires pilotes étant aujourd’hui tous ruraux. Dans ma circonscription par exemple, une commune périurbaine, dont une partie du territoire est classée en politique de la ville et dont la population souffre massivement du chômage – au-delà des 20 % – me semble très légitimement pouvoir prétendre bénéficier du dispositif. Ce nouvel éclairage profiterait à l’expérimentation, la rendant plus complète et plus aboutie. Il appartiendra au Fonds de pouvoir sélectionner cette forme de bassin d’emploi.

L’objectif, au terme de cette expérimentation et des résultats concrets qu’elle révélera, est bien le développement de ce dispositif sur la totalité du territoire national, au nom de notre souci commun de faire disparaître le chômage de longue durée. Il est de notre devoir d’offrir tous les moyens nécessaires à la réalisation de cet objectif.

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