Ce débat arrive tôt, car Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois, souhaitait que ces textes soient examinés très en amont de l'élection présidentielle.
Je remercie Sophie Dessus d'avoir démontré leur caractère ambitieux. Leurs dispositions, qui ne se limitent pas à celles dont nous sommes saisis pour avis, visent effectivement à réformer sur un certain nombre de points les règles applicables à l'élection présidentielle. Il s'agit notamment d'adapter la loi – c'est notre rôle – pour prendre en compte les recommandations et observations du Conseil constitutionnel, de la Commission des sondages, de la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale en vue de l'élection présidentielle et du Conseil supérieur de l'audiovisuel. L'objectif est avant tout d'assurer la libre expression et la liberté de communication dans le débat électoral – et donc dans le débat démocratique –, mais aussi, bien sûr, de protéger la sincérité du scrutin, parfois menacée par des tentatives de manipulation de l'opinion.
Sur internet, la propagande électorale est soumise au droit commun ; ce n'est pas un espace de non-droit. Le compte Twitter d'un candidat, sa page Facebook doivent figurer dans ses comptes de campagne, et le droit commun s'y applique, comme à tout document de propagande électorale. Ainsi, tout candidat à une élection doit fermer son compte Twitter à minuit le vendredi précédant le scrutin, de même que les chaînes de radio et de télévision ne peuvent organiser de débat relatif au scrutin entre ce même jour et cette même heure et la fin du scrutin.
Je remercie Christian Kert d'avoir rappelé ce qui justifie ces deux textes. En fait, le système s'est quelque peu perverti, et le respect de l'égalité de traitement entre les candidats a conduit à ce que le nombre d'heures d'émissions consacrées à la campagne électorale diminue de moitié entre l'élection de 2007, à laquelle douze candidats se présentaient, et celle de 2012, à laquelle nous en comptions encore dix. Il est pourtant bon d'exposer largement les opinions qui font le débat démocratique, et l'électeur vote d'autant mieux qu'il est éclairé, qu'il connaît les enjeux de l'élection et, si possible, les conséquences de son vote. Dans cet esprit, assouplissons quelque peu les règles de cette période intermédiaire de trois semaines qui sépare le dépôt des candidatures du début de la campagne officielle de quinze jours, en substituant l'équité à l'égalité de traitement des candidats.
Je comprends que les « conditions de programmation comparables » interpellent Christian Kert. Le législateur se trouve régulièrement dans cette situation : il doit indiquer des critères, sans les définir trop précisément pour éviter une trop grande rigidité. En l'occurrence, l'enjeu est d'éviter de rendre la vie impossible aux médias audiovisuels, mais nous en débattrons lors de l'examen des amendements. Je vous proposerai, chers collègues, une solution de nature à éviter une inégalité croissante, dans le traitement de l'information, entre chaînes d'information en continu et chaînes généralistes. Ces dernières continuent de jouer un rôle majeur. Lorsqu'un débat politique se tient sur leurs ondes, en première partie de soirée, ce sont plusieurs millions de Français qui le regardent. Lorsque le débat politique est aussi fédérateur, c'est bon pour la société et pour le scrutin qui s'annonce.
L'article 7 de la proposition de loi organique fixe à dix-neuf heures l'horaire de clôture des opérations de vote, sans interdire que le vote puisse se prolonger jusqu'à vingt heures dans les grandes villes. C'est effectivement près du quart du corps électoral qui vote entre dix-neuf heures et vingt heures – environ 74 % des électeurs votent avant dix-huit heures, 4 % entre dix-huit heures et dix-neuf heures, et 22 % entre dix-neuf heures et vingt heures. Les auteurs du texte n'entendent pas faire tomber un couperet à dix-neuf heures : le risque serait trop grand que de nombreux électeurs des grandes villes, à qui ce changement d'horaire aurait échappé, se présentent trop tard au bureau de vote lors de la prochaine élection présidentielle.
Quant aux petites communes, prolonger d'une heure l'ouverture de leurs bureaux de vote représente certes un effort, mais les grandes villes ne sont pas favorisées dans cette affaire, puisque l'on continuera d'y voter une heure de plus qu'ailleurs ! Député de Paris, je peux témoigner, pour avoir fait, comme vous, ce week-end la tournée des bureaux de vote de ma circonscription, de l'effort que représente la tenue d'un bureau de vote pendant douze heures, d'autant que les membres du bureau de vote doivent être présents une heure avant l'ouverture, et je ne parle pas du dépouillement qui suit, avec ces bulletins pliés en huit !
Quel est l'intérêt de ce nouvel horaire ? Aujourd'hui, les résultats des projections faites à partir des premières centaines de bulletins dépouillés dans les bureaux tests offrent de premières indications sur l'issue du scrutin, à partir de 18 h 30 ou 18 h 45, non pas sur les chaînes de radio et de télévision, bien sûr, mais sur les réseaux sociaux. De nos jours, tous nos concitoyens peuvent y accéder, et cela peut avoir des conséquences sur le vote d'un nombre important d'électeurs de la dernière heure, et fausser la sincérité du scrutin. La solution proposée vise un certain équilibre. Elle n'est sans doute pas parfaite, mais elle va dans le bon sens.