Intervention de Marianne Dubois

Réunion du 9 décembre 2015 à 9h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarianne Dubois, rapporteure :

Nous sommes ici pour vous présenter les résultats de nos travaux sur le service national universel.

Qu'est-ce que le service national universel ?

Il s'agit simplement de la forme nouvelle que le législateur de 1997 a souhaité donner au service national.

Il comprend des obligations : l'enseignement de défense, le recensement, la journée défense et citoyenneté et l'appel sous les drapeaux – cette dernière composante étant suspendue depuis 2002. Il comprend aussi des choix sous la forme du volontariat : volontariat dans les armées, service civique ou encore engagement dans la réserve.

C'est à tous ces dispositifs que nous nous sommes donc intéressés pour essayer de dresser un bilan de leur mise en oeuvre, près de vingt ans après la décision de suspendre la conscription.

Avant de vous expliquer le dispositif mis en place en 1997, nous voudrions dire quelques mots sur le service militaire qui suscite, particulièrement en ce moment, d'importantes vagues de nostalgie. Il est vrai que la conscription a incontestablement contribué à favoriser l'émergence de la conscience nationale au point qu'elle était devenue un élément indissociable de l'identité républicaine de la France. L'apport de la conscription à l'histoire de notre pays, tant pour le sort des armes que pour la constitution d'une communauté nationale, est encore très présent dans nos mémoires.

Il faut néanmoins se garder de toute forme de nostalgie. Si le service militaire obligatoire a été supprimé en 1997, c'est ce qu'il n'était plus adapté aux enjeux de la France de la fin du XXe siècle. Tout d'abord, le service militaire obligatoire ne répondait plus aux besoins opérationnels des armées. Conçue historiquement pour opposer des effectifs nombreux à la menace allemande – l'armée française comptait 3,5 millions d'hommes sous les drapeaux à la veille de la Première Guerre mondiale – la loi du nombre ne présentait plus d'intérêt stratégique majeur à la fin des années 1990 – et cela est encore valable aujourd'hui. Ensuite, la réduction continue de la durée du service – dix mois en 1996, conjuguée à la technicité croissante des équipements mis en oeuvre par les armées, limitait la capacité opérationnelle des appelés. Dans les faits, il y avait donc une armée à deux vitesses, ce qui remettait en cause la capacité opérationnelle de l'ensemble de l'armée.

Mais moins que de l'utilité opérationnelle du service militaire, c'est de son rôle social et civique dont les partisans de son rétablissement sont le plus nostalgiques. Là aussi, il faut se garder de toute illusion. Le service national ne jouait plus que de façon tout à fait marginale son rôle d'intégration civique et sociale. Le taux d'exemption – en moyenne de 20 % - était très élevé, notamment chez les jeunes menacés d'exclusion sociale : il était de 53 % dans la population de faible niveau scolaire et de 50 % chez les illettrés profonds, justement pour ne pas obérer la capacité opérationnelle des armées. Dans le même temps, les formes civiles du service se sont multipliées pour concerner 39 000 appelés en 1996, soit 15 % de la ressource totale. Alors qu'il s'effectuait de plus en plus tardivement, vers 22 – 23 ans, le service militaire était plus vécu comme une rupture dans un parcours d'insertion professionnelle que comme un rite de passage vers l'âge adulte. Un jeune français de 1996, et cela est encore plus valable en 2015, disposait d'une expérience de vie, d'un accès à l'information, d'une maturité sans commune mesure avec celle d'un jeune Français de dix-huit ans de 1914.

C'est donc parce qu'il ne répondait plus ni aux besoins des armées, ni aux impératifs de cohésion nationale que le service militaire a été suspendu en 1996.

Mais s'il a suspendu l'appel sous les drapeaux, le législateur de 1997 n'a pas pour autant supprimé le service national mais lui a donné un contenu nouveau. Au terme d'une large concertation et de longs travaux parlementaires, le législateur n'a pas souhaité rompre l'indispensable lien qui doit unir la Nation à son armée mais le renouveler en empruntant des voies nouvelles. La loi du 28 octobre 1997 a ainsi réaffirmé que les citoyens concourraient à la défense de la Nation et que ce devoir s'exerçait notamment par l'accomplissement du « service national universel ».

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