Intervention de Anne-Yvonne Le Dain

Réunion du 9 décembre 2015 à 11h00
Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnne-Yvonne Le Dain, rapporteure :

Je vous remercie d'avoir nourri ce débat, qui montre l'engagement, l'intérêt et les inquiétudes des parlementaires. Il n'est pas anodin que cette prise de conscience soit désormais collective. J'y vois le point de départ d'une dynamique de progrès.

En deux ans, les points de contact pour les consultations de jeunes consommateurs sont passés de 300 à 540. Il n'était pas nécessaire pour cela de passer par la loi. Leur budget a seulement été augmenté et le réseau s'est développé, tandis que des campagnes d'information ont eu lieu, à destination des jeunes consommateurs, tant à la télévision que sur les réseaux sociaux.

La consommation est stable chez les moins de 14 ans, mais elle augmente chez les plus de 17 ans. Le passage au lycée est donc un moment clé. La question de l'implication de l'éducation nationale doit donc être traitée de manière organique. Un système de récolement par établissement devrait être mis en place, soit au niveau national, soit au niveau académique. Les projets d'établissement comportent obligatoirement un volet consacré à l'addictologie, mais leur déclinaison dans le détail laisse parfois à désirer, par exemple sur la question de savoir combien de fois le sujet doit être abordé dans le parcours scolaire.

S'agissant de l'argument de la tranquillité publique développé en faveur des salles de consommation à moindre risque, c'est l'approche qui est retenue aux Pays-Bas. Les autorités de ce pays l'assument, même si l'ouverture de ces salles se traduit par des améliorations sanitaires. Au Canada, la situation est différente, puisque la question est envisagée à Vancouver sous l'angle sanitaire. Nous verrons quelles suites seront données aux déclarations récentes du premier ministre de ce pays.

À titre personnel, au cours de nos débats sur le projet de loi relatif à la contrainte pénale, j'ai déposé un amendement visant à modifier le libellé de l'incrimination retenue en cas d'accident de la route mortel. Il est difficile aux proches des victimes d'accepter que celles-ci ont été victimes d'un homicide « involontaire », même si cela est passible de dix ans d'emprisonnement. Je proposais donc, car je crois que les mots ont un sens, que la loi parle d'homicide par abolition volontaire du discernement. Convenez donc avec moi que je ne suis pas partisane d'une attitude laxiste. Je crois au contraire que nous devons poser le débat en des termes forts.

S'agissant des travaux de notre collègue Martine Pinville sur la médecine scolaire, je pense que nous pourrions en effet voir quelle réflexion commune développer.

Quant à la couverture du territoire, comme je vous le disais tout à l'heure, les CSAPA et les CAARUD ont mis en place des équipes mobiles. En 2014, non moins de vingt antennes et de vingt consultations avancées de CSAPA ainsi que treize dispositifs mobiles de CAARUD ont été déployés. L'engagement a été pris de poursuivre cette politique.

La décision a également été prise, dans le cadre de la récente loi relative à la santé, de ne pas se contenter de s'appuyer sur le réseau des pharmacies pour prendre en charge les programmes d'échanges de seringue, alors qu'elles ne sont aujourd'hui que 1 100 sur 22 000 à le faire volontairement. Outre la distribution dans les officines et dans les CAARUD, une distribution par la poste est explorée, en particulier dans les campagnes. Je privilégie donc une approche pragmatique et morale, politique au sens noble du terme, qui s'appuie sur les professionnels de santé.

Un travail important a été mené pour limiter l'incidence du VIH et du virus de l'hépatite C parmi les consommateurs de stupéfiants. Je rappelle que chaque traitement individuel de l'hépatite C coûte 60 000 euros par an. Il faudrait comparer ce coût à celui de la mise en place de salles de consommation à moindre risque.

La prévention est la clé du dispositif en direction de la jeunesse. Quant aux souhaits de modification de la loi de 1970, il faut en débattre. Une révision est-elle nécessaire, doit-elle être complète ou fragmentaire, en sommes-nous politiquement capables aujourd'hui ? Le débat doit être ouvert. En prônant une légalisation sous contrôle, je n'ai pas hésité à mettre les pieds dans le plat, précisément dans l'intention de susciter des réactions et d'amener des avancées.

Enfin, je vous indique que les Nations unies ont mis cette question à l'ordre du jour de leur session du printemps 2016. La prise en mains du problème est à la fois locale et globale.

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