Monsieur le président, j'ai cru comprendre que vous étiez favorable à l'égalisation de la fiscalité entre les deux carburants principaux : essence et gazole. Pourriez-vous nous préciser comment vous voyez cette égalisation, sachant qu'il n'est pas envisageable de perdre un sou dans l'opération ?
J'ai cru comprendre également que vous étiez favorable à la déductibilité de la TVA sur l'essence pour les flottes automobiles d'entreprises. Qu'en est-il ? Nous en avons encore discuté dernièrement, et des amendements ont été déposés en ce sens – j'en ai moi-même déposé un. Le Gouvernement semble prêt à bouger. J'ajoute que la mesure ne serait pas très onéreuse.
Par ailleurs, pensez-vous que cette modification de la fiscalité pourrait aboutir assez rapidement à un partage du marché automobile à peu près à 5050 ? L'idéal, pour notre industrie pétrolière du raffinage, serait au moins d'arriver au prorata gazoleessence ; mais nous n'en sommes pas là. Faut-il aller encore un peu plus loin ? En effet, on ne doit pas confondre parité et parité énergétique : chacun sait qu'un litre d'essence n'est pas équivalent, du point de vue de l'énergie produite, à un litre de gazole : l'écart est de 5 ou 7 % - en faveur du diesel.
Mais venons-en aux biocarburants. Vous dites, et je partage assez largement votre diagnostic, que les biocarburants de deuxième génération sont d'abord un sujet de colloque et de discours, notamment dominicaux, et vous remarquez qu'il n'y a pas de pilote en place. Ce n'est pas tout à fait exact, parce que le pilote « Futur Oil » est quasiment construit à Bazancourt. Mais peu importe. Le vrai problème qui se pose est celui l'approvisionnement et du coût. Actuellement, les prix de revient sont élevés, même si l'on peut espérer qu'ils vont baisser progressivement, je reste sceptique sur l'avenir des biocarburants de deuxième génération.
Quant aux arguments que vous avancez à propos des biocarburants de première génération, je les entends depuis trente ans et j'y reste insensible. On peut augmenter de 2, 3, 5 %, etc. la proportion du bio dans les moteurs. Cela ne pose aucun problème technique, notamment sur les moteurs diesel.
Il suffit de regarder ce qui se passe dans les stations-service où, pour faire des économies, les automobilistes font eux-mêmes des mélanges. Et ils ne se limitent pas à 7 % : 80 % de biocarburant E85 à la première pompe, et 20 % d'essence à la deuxième. C'est une part significative du marché, notamment pour les plus modestes.
Mais il y a aussi ceux qui rajoutent de l'huile. Si cela sent de temps en temps la friture dans les voitures diesel, c'est simplement parce que l'on a ajouté dans le réservoir de l'huile achetée en grande surface ! Voilà pourquoi, dans certaines grandes surfaces, la consommation d'huile explose. On n'en parle jamais, mais il y a un manque de cohérence entre la fiscalité de l'huile dite de consommation domestique, et l'autre. Et le marché n'est absolument pas étanche.
Qu'en pensez-vous donc ?
Vous avez ensuite évoqué le défi de compétitivité auquel sont confrontées vos industries en général, et vos raffineries en particulier.
Nous ne sommes pas compétitifs. Pourriez-vous nous donner les chiffres des pertes ? Je crois que nous en étions à 500, 700 millions par an, et que nous en sommes maintenant à 100, 200 millions par an. Mais le problème réside dans la rentabilité relative. Nous avons à peu près atteint l'équilibre à coup de fermetures de raffineries, mais il nous en reste huit. Où va-t-on ? Celles-ci ne risquent-elles pas toutes de fermer, comme certains l'annoncent ? Et le phénomène ne touche pas que la France : il touche toute l'Europe et profite aux industries pétrolières du Golfe, des États-Unis ou d'ailleurs.
En dernier lieu, je vous interrogerai sur les véhicules hybrides : pensez-vous que ceux-ci pourront prendre rapidement 50 % du marché ? Je suis très sceptique.
Selon vous, les véhicules électriques devraient atteindre 1,5 % du marché. Je pense qu'on pourrait déjà se satisfaire de 1 ou 1,5 %, dans la mesure où ces véhicules ne peuvent couvrir que de petites distances. Ce n'est pas le cas des véhicules hybrides. Sauf que ceux-ci posent tout de même des problèmes de prix, auxquels les consommateurs sont évidemment sensibles.