Le CPA ne produirait pas une plus grande individualisation de notre système. Aujourd'hui, les droits sont déjà personnels, en fonction de la situation et du parcours de chacun ; et quelqu'un qui n'est pas du tout en emploi acquiert bien moins de droits à formation qu'un salarié. La seule chose qui change, c'est la possibilité de dotations correctrices : un jeune qui sort du système scolaire sans formation pourra par exemple disposer de points qu'un jeune sorti à bac+10 ne recevra pas. On peut aussi imaginer qu'un arrêt pour une longue maladie, qui fragilise le lien avec le marché du travail, permette de recevoir des points supplémentaires.
Bien sûr, les individus sont plus ou moins capables de se servir à bon escient de leurs droits ; mais c'est de toute façon le cas. On sait que la formation professionnelle profite surtout aujourd'hui à ceux qui en ont le moins besoin. Le CPA permet de mettre en place des dotations afin de corriger des inégalités.
S'agissant du calendrier, monsieur le président, il y a beaucoup de choses que l'on peut faire dès le 1er janvier 2017. La commission a voulu insister sur la nécessité d'avoir une vision large du CPA, en partant de l'idée simple que celui qui veut envisager un changement professionnel a besoin d'avoir toutes les cartes en main : retraite, chômage… Le rôle de l'information me paraît vraiment essentiel, et sous cet aspect le CPA est beaucoup moins révolutionnaire : le compte unique de retraite est par exemple en train de se construire.
Il ne faut pas brusquer les évolutions, et 2017 n'est pas une date obligée. Mais les gens sont vraiment intéressés par l'idée d'un point unique d'entrée et d'information.
La sphère sociale est ainsi très en retard dans le domaine de l'information, sur les débouchés à la sortie de telle ou telle formation par exemple. Nous avons rencontré des chômeurs qui nous expliqué que personne ne leur avait dit, par exemple que le CAP « Petite enfance » permettait d'être facilement embauché… L'idée d'informer les individus sur leurs possibilités en fonction de leur situation propre est essentielle. Il faut donc commencer à développer des projets en ce sens.
La question pertinente, c'est bien celle des besoins. Or nous savons que les taux de non-recours aux prestations sociales peuvent être importants, par exemple, et que les transitions professionnelles sont toujours très difficiles. Je pense sincèrement qu'il faut que le CPA soit un outil souple, qui laisse toute sa place à la négociation et aux interactions avec les usagers. Mais, quoi qu'il en soit, ces besoins sont là et ne disparaîtront pas.