Intervention de Hervé Féron

Réunion du 15 décembre 2015 à 16h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Féron :

Toutes mes félicitations, monsieur le rapporteur, pour cet excellent travail.

Cette année encore, le budget de l'AEFE s'inscrit dans un contexte de rationalisation et de participation à l'effort public. Depuis 2010, la subvention pour charges de service public a été diminuée de 30 millions d'euros, soit une baisse de 7,4 % du budget total. Des économies sont opérées à travers non seulement la fermeture de postes de fonctionnaires détachés dans les établissements relevant de l'AEFE et des prélèvements sur le fonds de roulement des lycées, mais aussi une diminution de 10 millions d'euros des bourses versées aux enfants de nationalité française, soit une réduction de près 8 % par rapport à l'an dernier.

Après nous être félicités d'avoir mis fin en 2012 au système injuste de la prise en charge (PEC) des frais de scolarité des lycéens français à l'étranger, sans aucune condition de ressources, mis en oeuvre par Nicolas Sarkozy, il nous faut à présent nous inquiéter devant la fragilisation du système des bourses, plus juste et plus équilibré, que nous sommes parvenus à établir. Alors même que le nombre d'enfants qui étudient au sein des établissements du réseau ne cesse d'augmenter et que le Président de la République a fait de la jeunesse et de l'éducation ses priorités, il est indispensable de compléter le budget global de l'AEFE par des moyens publics plus importants. Ceci est d'autant plus urgent que l'une des missions principales de l'agence mise en lumière dans le présent COM est la coopération éducative dans l'ensemble des pays où nous sommes présents, aux côtés de l'enseignement en français pour le rayonnement et l'attractivité de la France – dont les enjeux économiques sont évidents – et de la formation des élites étrangères. Grâce à cette coopération éducative, nous sommes en mesure d'offrir le bénéfice d'un enseignement au sein d'un établissement de l'AEFE à des jeunes étrangers qui n'auraient pas les moyens de s'acquitter de frais de scolarité élevés. Nous devons maintenir les moyens à un niveau suffisant pour continuer à attribuer des bourses d'excellence aux étudiants étrangers, notamment dans les pays émergents et néo-émergents.

J'estime donc nécessaire de mettre fin à la tendance baissière des crédits de l'AEFE, qui constitue, comme l'a rappelé le rapporteur, le plus important réseau scolaire hors frontières nationales au monde. Nous sommes ainsi favorables à la proposition n° 1 du rapport Cordery-Lepage qui vise à sanctuariser le budget global de l'enseignement français à l'étranger, à l'instar du budget de l'éducation nationale.

Monsieur le rapporteur, vous consacrez une partie importante de votre rapport à l'augmentation des frais de scolarité qui ont bondi de 45 % en moyenne entre 2007 et 2013, même si nous sommes parvenus à endiguer cette inflation à notre arrivée en 2012. Cette explosion était une conséquence directe de la PEC qui a constitué un effet d'aubaine pour certains établissements scolaires. Vous prenez l'exemple révélateur du « plan écoles » à Londres où le montant des frais de scolarité est tel qu'il opère de facto une sélection des publics : plus de 10 000 livres sterling sont exigées des familles désireuses de scolariser leur enfant dans l'un des établissements d'enseignement français. L'objectif de mixité sociale, qui est au coeur de notre projet politique, tant à travers la loi pour la refondation de l'école de la République que de la réforme du collègue, ne peut être atteint avec de telles pratiques discriminatoires. Certains de vos interlocuteurs, précisez-vous, ont estimé l'investissement moyen d'une famille pour la scolarité d'un enfant à l'étranger à 100 000 euros, montant particulièrement important, surtout lorsqu'il y a des fratries.

Le rapport Cordery-Lepage propose que chaque convention indique précisément le montant maximal des frais de scolarité pour contenir leur inflation et éviter que le réseau de l'AEFE ne soit plus qu'un réseau de Français expatriés aux moyens financiers élevés. Pensez-vous que cette proposition pourrait être mise en application ?

Bien sûr, comme nous l'avions déjà proposé il y a quelques années, il faut favoriser des dispositifs innovants moins coûteux, par exemple le dispositif FLAM.

Selon votre rapport, les enseignants du réseau de l'AEFE seraient désormais recrutés dans leur quasi-totalité en droit local. Il serait même prévu de faire passer le pourcentage d'expatriés occupant des postes d'enseignement de 6 % à 0 %. Or les contrats d'enseignants locaux, qui relèvent du droit privé à travers un recrutement assuré par l'établissement, sont souvent bien moins avantageux que les primes d'expatriation. Ce recours aux contrats locaux pour les postes d'enseignants ne risque-t-il pas d'entraîner un manque d'attractivité pour de jeunes professeurs français qui auraient pu être tentés par l'expatriation, comme c'était le cas dans les années quatre-vingt-dix ?

Enfin, la grande disparité entre les différents contrats au sein de l'AEFE – locaux, expatriés, résidents, voire faux résidents qui ont accès à un logement – donne lieu à de grandes inégalités selon les pays. Vous citez le cas de certains professeurs du lycée d'Abou Dabi qui sont contraints de s'endetter pour pouvoir se loger. Ne serait-il pas possible de remettre un peu d'équilibre dans tout cela ?

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