Monsieur Jean-Luc Bleuwen, le programme Africa4Climate permet d'assister des autorités nationales et locales africaines pour la mise en oeuvre de stratégies de développement sobres en carbone. C'est un succès salué par tous nos partenaires. Je souhaite que les pouvoirs publics puissent étendre ce projet, qui correspond parfaitement à l'action à mener dans la foulée de la COP21, au-delà des quatre pays pilotes actuellement concernés.
Monsieur Jean-Claude Guibal, d'autres seraient plus à même que moi d'expliquer le délitement progressif de certains États du Moyen-Orient et du Maghreb à l'occasion des révolutions et des crises de ces dernières années. Cela dit, au regard de l'histoire, nous savons tous que les pays en question étaient de construction hétérogène récente, issus de la colonisation, caractérisés par des États forts dirigés par des élites vieillissantes et parfois corrompues et des rivalités ethniques et religieuses fortes. Cela a sans doute contribué à l'évolution à laquelle nous avons assisté, de même que l'émergence de classes jeunes sans emploi qui composent désormais plus de 50 % de la population. Il s'agissait un cocktail explosif. Nous avons d'ailleurs retrouvé, après les Printemps arabes, des travaux de sociologues établissant que les conditions d'une crise économique et sociale étaient remplies. J'espère que nous parviendrons à accompagner ces pays sur le chemin de la création d'emplois, car l'emploi est bien le nerf de la guerre. On compte plusieurs centaines de millions de nouveaux entrants sur le marché du travail du continent africain, marché qui n'est pas à même de créer autant d'emplois. Avec la question de la sécurité alimentaire, il s'agit là d'un enjeu majeur.
Monsieur Jean-Pierre Dufau, vous évoquiez notre indépendance par rapport à nos tutelles : les financements internationaux représentent 70 % de notre chiffre d'affaires, et leur part s'accroît. Il nous faut trouver un équilibre entre ce financement extérieur et notre identité d'opérateur de l'État. Nous « francisons » aujourd'hui une programmation internationale, mais si nous étions exclusivement financés par l'Union européenne, nous serions avant tout un opérateur européen. Nous avons trouvé notre indépendance financière ; il nous faut trouver un équilibre entre la recherche de financements externes et la poursuite d'une stratégie inspirée par la politique étrangère française.
Comment fonctionnons-nous ? Nous répondons parfois à des sollicitations directes de certains pays : c'est le cas lorsque le roi du Bahreïn fait part au Président de la République de son souhait de bénéficier d'une expertise française en matière d'urbanisme. Nous disposons en effet de compétences reconnues internationalement dans de nombreux domaines – et c'est là, monsieur Michel Terrot, que se situent nos avantages comparatifs. En l'espèce, notre savoir-faire en matière de transports légers, de planification urbaine et d'aménagement du territoire nous a servis. Nous avons donc constitué une équipe, mixant expertises publique et privée, avec le groupe Egis, qui s'est rendue au Bahreïn pour qualifier les besoins. Nous finalisons actuellement un contrat pour un montant supérieur à 8,3 millions d'euros pour la modernisation du ministère de l'urbanisme et la planification urbaine autour de la capitale du Bahreïn. Cela montre bien que nous disposons d'un instrument d'influence économique extrêmement puissant, qui est sans doute beaucoup plus performant que les outils habituels du commerce extérieur. L'élaboration de la planification urbaine permet en effet de diffuser des normes et des besoins auxquelles les entreprises françaises pourront répondre.
Nos chefs de projets sont à même d'évaluer les besoins, de trouver l'expertise, de définir une méthodologie, de suivre les projets et d'évaluer leur déroulement et leur impact. Nous puisons ensuite dans un vivier de dix mille experts issus du public ou du privé. Mais le coeur de métier des salariés d'Expertise France, c'est l'ingénierie de projets.
Oui, monsieur Dufau, la pauvreté est au coeur de nos préoccupations parce que la solidarité est notre préoccupation constante ! Lorsque nous intervenons pour renforcer le système de santé malien, nous luttons contre une inégalité particulièrement criante. L'espérance de vie d'un habitant du Mali est inférieure de trente ans à celle d'un Français. Le taux de mortalité infantile avant cinq ans dans ce pays est celui que nous connaissions durant la Révolution française – un bébé né au Mali a cinq fois plus de chance de mourir avant cinq ans qu'un bébé né en France.