Dans notre système contemporain, il me semble impossible de nier la place du juge, comme vous avez paru le souhaiter tout à l'heure, mais il est vrai que les arrêts du Conseil d'État relatifs à l'assurance chômage et la jurisprudence de la Cour de cassation soulèvent des questions. Entre autres, la notion de « traitement différencié des salariés en fonction d'une situation objective » est de nature à empêcher certaines conventions de produire leurs effets. La question de la place du juge est également au coeur de la réflexion sur une éventuelle réforme du code du travail, sachant que si ce dernier devenait purement principiel, cela laisserait une énorme place au juge. Constitutionnellement et conventionnellement – au sens des accords internationaux auxquels la France est partie –, on ne pourra jamais réduire la place du juge. On peut discuter avec lui du rôle auquel il veut bien se limiter, et il conviendrait d'ailleurs que, dans le dialogue social, on aborde la question de savoir comment dialoguer avec le juge – y compris lorsqu'on estime qu'il marche sur des platebandes qui ne sont pas les siennes. Sachant que l'on ne peut sortir le juge du jeu, comment composer avec lui, en dehors des recours qui lui sont adressés ? Entre autres, comment discuter avec lui de sa jurisprudence ?