Intervention de Laurent Fabius

Réunion du 16 décembre 2015 à 16h15
Commission des affaires économiques

Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international :

Sur le modèle des campagnes « Achetez français », nous devrions inciter nos compatriotes à visiter la France ; non seulement y découvriraient-ils d'innombrables merveilles mais cela aurait un effet économique considérable.

Je vous remercie des appréciations que vous avez portées sur la COP21 qui aura aussi, je vous l'ai dit, des effets bénéfiques pour le tourisme dans notre pays.

J'ai reçu les dirigeants du tourisme social. Ils tiennent à conserver la spécificité idéologique de ce mode de tourisme mais, ayant conscience qu'il est parfois tenu pour vieillot, ils ont engagé des efforts pour lui permettre d'incarner la modernité. Je leur ai promis mon aide pour préserver un mode de tourisme complémentaire des autres. Je suis partisan de ne pas opposer les formes de tourisme mais de les emmener ensemble.

Pour ce qui concerne l'application des normes, nous avons entrepris avec les professionnels de simplifier ce qui peut l'être. Ainsi, pour ce qui est de l'accessibilité aux personnes handicapées, nous avons rendu possible une adaptation progressive des locaux, au lieu que, comme c'était le cas jusqu'alors, les normes doivent être appliquées en bloc, au risque de graves problèmes financiers. Les professionnels étaient satisfaits de ces premières simplifications mais je concède que d'autres restent à conduire, et nous reprendrons cet exercice.

Les plateformes de réservation telles qu'Airbnb, qui continuent de se développer, à Paris et ailleurs, posent un problème compliqué. D'une part, il est illusoire de penser se protéger de ces nouvelles formes de tourisme en édifiant des lignes Maginot ; d'un autre côté, les règles de la concurrence doivent être respectées. J'ai pris acte que la SNCF a mis fin au partenariat qu'elle envisageait avec Airbnb avant même qu'il ne commence d'être appliqué ; l'entreprise publique aurait été mieux avisée de ne pas se lancer dans ce projet, car il n'est pas dans son rôle de conférer un avantage particulier à qui que ce soit. Plus largement, une série d'études est en cours qui vise à définir comment faire entrer cette économie spécifique dans l'économie générale du tourisme en trouvant les modalités qui permettront d'égaliser la concurrence. M. Matthias Fekl y travaille et le ministre des finances a pris certaines mesures en ce sens. Des dispositions réglementaires existent déjà, qui ne sont pas appliquées ; outre cela, il conviendra sans doute de distinguer le particulier qui loue très occasionnellement son appartement et les professionnels déguisés. Je suis très attentif à cette question.

Une partie du fonds consacré à l'hébergement touristique de la Caisse des dépôts et consignations et les possibilités offertes par le programme d'investissements d'avenir permettront de rénover les lits vieillis. Cela étant, il faudra analyser sans démagogie l'impact prévisible du réchauffement climatique sur la basse montagne.

Les attentats commis à Paris ont provoqué une indéniable chute de la fréquentation touristique, singulièrement dans la région parisienne, mais les spécialistes, fondant leur avis sur l'analyse de ce qui est advenu en Espagne après les attentats de 2004, tablent sur une stabilisation puis une reprise du tourisme. M. André Chassaigne a noté justement que la baisse constatée est aussi celle du nombre de touristes français. Nous devons donc expliquer, sans mentir, ce que sont les choses, pour éviter des conséquences dommageables à long terme. Pour toute mesure spécifique, je suis à la disposition des voyagistes, que M. Matthias Fekl rencontre régulièrement.

Nous disposerons en janvier d'une première évaluation des pôles d'excellence touristique ; elle vous sera communiquée.

Les tarifs des visas étant fixés au niveau européen, nous ne pouvons les modifier que marginalement. Mais j'ai obtenu deux choses du secrétaire d'État au budget : la première, je vous l'ai dit, est qu'une part des recettes supplémentaires issues de la délivrance de visas en plus grande nombre soit affectée à Atout France – cela représentera 5 millions d'euros en 2016 ; la seconde, c'est que les créations de postes qu'imposent l'instruction et la délivrance des visas supplémentaires soient hors plafond d'emplois.

Je comprends les considérations morales qui sous-tendent votre recommandation, monsieur André Chassaigne, mais je ne suis pas certain que nous parviendrons à convaincre nos compatriotes de préparer leurs séjours à l'étranger l'oeil fixé sur la liste des pays non coopératifs.

Pour ce qui est de la compétence partagée en matière de tourisme, il faudra voir à l'usage. Certains estiment que cette compétence d'ordre économique revient d'emblée à la région ; d'autres considèrent que les départements et les syndicats d'initiative ont un rôle à jouer. Si chacun tire dans son coin, il n'en sortira rien de bon, mais si les régions, voulant tout faire, privilégient la politique du bulldozer, toutes les bonnes volontés locales seront anéanties. Il faut marier tout cela : c'est l'objet des contrats de destination. La formulation du texte est assez souple pour que les pratiques aillent dans le bon sens.

Nous devons effectivement faire vivre ceux de nos sites qui figurent sur liste du patrimoine mondial ; ils sont un avantage pour nous.

Je salue l'existence de la carte participative dont Mme Audrey Linkenheld a fait mention.

L'hôtellerie de plein air est un des atouts du tourisme en France. J'ai reçu ses représentants, qui se sentent malheureux ; il faudra les intégrer à la politique générale.

Je me félicite que nous soyons à l'unisson pour nous occuper du tourisme, secteur de première importance.

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