Intervention de Axelle Lemaire

Réunion du 13 janvier 2016 à 21h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Axelle Lemaire, secrétaire d'état chargée du numérique :

Avis défavorable. Il faut à mon sens maintenir cet article, pour des raisons qui se résument en deux mots : confiance et liberté, confiance des utilisateurs et liberté de choix de ces mêmes utilisateurs.

L'auto-hébergement est une question d'apparence très technique. Mais il faut souligner que c'est simplement ce qu'a fait Hillary Clinton, qui a auto-hébergé sa propre messagerie électronique – ce qui lui a été reproché par la suite… On peut considérer que c'est une forme de prolongation, finalement, de la neutralité de l'internet, mais cette question n'entre absolument pas dans le champ du règlement européen. L'auto-hébergement en effet ne pose pas de problème d'intégrité ou de sécurité du réseau ; il est déjà autorisé par un certain nombre d'opérateurs de télécommunications, même si d'autres – en France, un seul – le refusent.

Il ne s'agit vraiment que d'utiliser son propre serveur, chez soi, pour éviter qu'un opérateur ou un fournisseur d'accès à internet n'empêche l'accès à certains types de contenu, pour disposer de son propre serveur de messagerie ou de son propre cloud, c'est-à-dire de son propre nuage pour stocker ses données…

Si certains opérateurs refusent ces usages, c'est pour des raisons louables : ils considèrent qu'ils ne peuvent plus alors garantir la même sécurité que pour leur propre réseau, et protéger ces utilisateurs des virus et des spams. Mais peut-être peut-on estimer que les usagers qui souhaitent installer leur propre réseau ont conscience de ces risques et sont prêts à les assumer. Certains opérateurs préfèrent néanmoins interdire ces pratiques, mais encore une fois, c'est loin d'être le cas général.

Nous sommes là face à un usage émergent, mais qui va sans doute se développer fortement avec le déploiement de la fibre : il est en effet nécessaire que les débits entrants et sortants soient symétriques.

Certains opérateurs arguent enfin du coût pour refuser l'auto-hébergement. Mais ce n'est pas à mon sens un argument pertinent : c'est une pratique qui se fait sur demande d'un utilisateur, il n'est pas question de la généraliser ou de l'imposer à tous.

Quant au problème de l'adressage IP, faciliter le recours à l'auto-hébergement obligera, à terme, à constater les limites du système actuel, et incitera par le fait à accélérer le passage à l'IPv6.

L'auto-hébergement permet donc de promouvoir un internet libre et ouvert. C'est finalement une application du principe de souveraineté numérique.

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