Intervention de Huguette Bello

Séance en hémicycle du 19 janvier 2016 à 15h00
République numérique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHuguette Bello :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, premier volet des deux textes consacrés au numérique, ce projet de loi vise à poser le cadre juridique, notamment en matière de protection des données personnelles et de lutte contre la fracture numérique, qui permettra à ce secteur de répondre à ses innombrables promesses.

Irriguant l’ensemble de la société et à l’origine de nouvelles configurations, le numérique est désormais un critère d’attractivité économique. Créateur de nouveaux métiers et de nombreux emplois, il diffuse de nouveaux usages, modifie l’accès aux services publics, élargit la diffusion des connaissances. Les technologies numériques sont devenues des outils essentiels à l’aménagement du territoire et peuvent devenir un facteur de cohésion territoriale.

Cette réalité qui s’impose à tous revêt une importance particulière pour les territoires insulaires, dont la faible superficie et l’éloignement ont toujours été présentés comme des handicaps structurels à leur développement. Pour eux, le numérique représente aussi un puissant vecteur de désenclavement géographique, ce qui suppose des investissements adaptés et des infrastructures performantes.

À cet égard, permettez-moi d’appeler l’attention du Gouvernement sur le nouveau report de l’arrivée de la 4G à La Réunion. Alors qu’elle est presque partout présente et qu’elle est déployée en France hexagonale depuis 2012, cette technologie, qui est la clé du très haut débit mobile, ne devrait être disponible à La Réunion qu’à partir de 2017 ! La décision de l’ARCEP de retarder, une fois encore, l’attribution des licences 4G à La Réunion est d’autant plus mal ressentie que, sur le plan technique, rien ne s’oppose à un déploiement en 2016.

Nous souhaitons donc que cette échéance puisse être respectée pour que La Réunion ne reste pas à l’écart des nouveaux services, des nouvelles applications, et donc des nouveaux emplois que cette technologie permet de créer.

Le deuxième point concerne la souveraineté numérique. Défendue par le ministre de l’économie, notamment lors de la vente de Dailymotion, cette notion n’a subi à ce jour qu’une seule exception. À La Réunion, en effet, la souveraineté numérique n’a pas été considérée comme un principe incontournable au moment des opérations de revente qui ont suivi la fusion SFR-Numericâble. De manière paradoxale, la première et unique entorse à ce principe a eu lieu dans la seule région française qui compte un opérateur local, Zeop, pionnier et leader de la fibre optique dans l’île.

Rappeler ce point est indispensable pour éviter d’aggraver les délocalisations en termes d’emplois, d’activités de formation et d’expertise, de recherche et de développement. J’espère que vous m’écoutez, parce que La Réunion n’est pas seulement une terre sur laquelle on se rend à l’occasion des élections… Il est déraisonnable, dans un territoire miné par le chômage, que l’engagement des opérateurs à créer des emplois locaux ne soit pas un critère de choix.

Pour La Réunion, la continuité territoriale numérique est un enjeu majeur. Avec ces technologies, les chances sont réelles de passer de la logique du rattrapage à celle du développement. D’où notre ambition de devenir un territoire doté de l’internet le plus performant et parmi les moins chers du monde.

Le déploiement du très haut débit fixe s’est accéléré depuis que, après Zeop, les deux opérateurs historiques se sont à leur tour engagés. Il s’agit désormais de mutualiser les investissements pour garantir la couverture de l’ensemble de l’île, ainsi que le préconisent l’ARCEP et la mission Très Haut Débit. La convention-type prévue à cet effet entre les opérateurs, l’État et les collectivités ne peut donc en aucun cas devenir facultative, au risque de conduire à une situation d’anarchie telle qu’elle commence à se profiler à La Réunion.

Mettre à disposition des Réunionnais un internet moins cher renvoie à la question du coût de la desserte internationale. La croissance exponentielle des besoins en débit, la nécessité de diminuer sensiblement les surcoûts de la bande passante mais aussi l’obsolescence des infrastructures actuelles rendent indispensable la construction d’un nouveau câble sous-marin de télécommunications pour relier La Réunion au reste du monde.

En dépit de ce constat unanime, aucune proposition n’a suivi l’abandon du projet de serveur de cache, présenté sinon comme une alternative à la construction d’un nouveau câble, du moins comme une étape avant sa mise en oeuvre.

Aucune amélioration n’a non plus été enregistrée depuis l’avis rendu en avril 2014 par l’Autorité de la concurrence qui jugeait insuffisante la concurrence dans la gestion des câbles sous-marins de la zone La Réunion-Mayotte.

Ces infrastructures sont pourtant décisives, tant pour sécuriser les flux que pour diminuer le coût des accès internet. C’est pourquoi les propositions de la mission Très Haut Débit méritent d’être présentées rapidement.

De même, la France ayant connaissance ou étant associée à la réflexion sur les différents projets en cours dans notre environnement géographique, une communication du Gouvernement à ce sujet serait très appréciée.

Nous approuvons l’essentiel des dispositions du présent projet de loi, mais elles ne trouveront leur pleine application et leur totale efficacité à La Réunion que si et seulement si l’égalité numérique ne reste pas virtuelle.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion