Intervention de Victorin Lurel

Réunion du 13 janvier 2016 à 11h00
Délégation aux outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVictorin Lurel :

Je tiens à saluer la Cour des comptes et son Premier président, pour la tonalité et la qualité de son rapport. Et je partage totalement les appréciations d'Ibrahim Aboubacar.

Il faut tenir compte de l'impatience sociale. On a mis à peu près cinquante ans pour parvenir à l'égalité sociale dans les quatre autres DOM. Mayotte n'attendra pas cinquante ans : ce qui a été arrêté en 2008, s'agissant notamment du RSA, a dû être accéléré face à la demande sociale, et c'est insuffisant. Je suis convaincu qu'il faudra accroître le rythme du rattrapage, car la conflictualité sociale s'est fortement développée à Mayotte. Les gens sont parfaitement informés de ce qui se fait à Paris, l'information arrivant très rapidement à Mayotte.

J'en viens au deuxième risque et à ce qui est arrivé aux quatre départements d'outre-mer. Certains ont parlé de façon excessive de génocide culturel, de disparition des valeurs traditionnelles de la société. Parallèlement à la croissance, on verra se développer une sorte de « satisfaction querelleuse », comme disait Raymond Aron. Il y aura peut-être une sorte de revival culturel, qu'il faut appréhender dès maintenant, pour éviter qu'il vienne à se développer sur une base confessionnelle. Pour l'heure, Mayotte est une société apaisée en termes de pratiques cultuelles et culturelles, et c'est une chance. Mais si nous nous contentons d'agir en termes de dépense publique sans tenir compte de cette dimension culturelle, nous risquons de faire naître les querelles que nous connaissons dans nos propres régions.

J'aimerais savoir si la Cour a entendu les élus sur la question des mineurs en « déshérence ». L'État ne jouant pas son rôle en termes de contrôle des flux migratoires, beaucoup d'enfants sont laissés sur place. Le budget du département en la matière s'élevant à 1 % des dépenses – peut-être un peu plus aujourd'hui en dépenses d'intervention –, comment voulez-vous qu'il consacre beaucoup plus pour contrôler des flux qu'il ne maîtrise pas et qui relèvent de la compétence de l'État, notamment aux frontières ? Il faut, en l'occurrence, une politique plus que partagée avec l'État.

Certains de mes collègues, qui avaient mené des missions sur place, avaient émis le voeu de créer – vous l'avez évoqué à propos de l'investissement – une sorte d'agence technique qui serait à la disposition des communes, et qu'il y ait, pour un temps limité, une reprise de la compétence de l'Aide sociale à l'enfance (ASE). Je ne sais pas si cette question est toujours d'actualité, mais j'aimerais savoir si l'on peut imputer la responsabilité de cette situation au seul département, en laissant entendre que les élus sont irresponsables et se contentent d'ignorer la présence de ces enfants dans les rues…

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